Marin Ledun : « mes romans ne sont pas des tracts »

Grand Prix du roman noir du festival du film policier de Beaune pour Les Visages écrasés, Marin Ledun était vendredi soir à la médiathèque Pierre-Bayle de Besançon pour une causerie sur la littérature...

Marin Ledun

Grand Prix du roman noir du festival du film policier de Beaune pour Les Visages écrasés, Marin Ledun était vendredi soir à la médiathèque Pierre-Bayle de Besançon pour une causerie sur la littérature avec une vingtaine d'auditeurs. En avant-première du festival Pas Serial s'abstenir, il dit sa conception de l'écriture. Ce livre parmi la dizaine qu'il a écrits, traite de la souffrance au travail à partir de sa propre expérience chez France Télécom. «Comme victime et comme acteur...». Mais attention, c'est bien de littérature dont il est question. Il explore la façon dont l'humain fait face aux situations, aux organisations managériales qui opèrent des «transformations sociales et des transformations individuelles, voire des transformations physiques : la souffrance au travail. Comment des mécanismes artificiels, des théories inventées ont un impact sur les suicides, des homicides dont on parle peu, ou tout simplement des gens qui vont mal, pleurent avant d'aller au travail, ont des troubles musculo-squelettiques...»
Le personnage central des Visages écrasés est une femme médecin du travail, «totalement folle» qui euthanasie des salariés en souffrance.
La Guerre des vanités traite de la responsabilité sociale des scientifiques et des incompréhensions entre générations à partir des expériences avec les objets techniques. «J'imagine la génération de mes grands parents découvrant la télé, celle de mes parents (50-60 ans) encore dans le collectif mais commençant à voir des objets de consommation culturelle comme le tourne-disque qu'on écoutait en groupe. Ma génération [il est né en 1975] a des supports privés, mes enfants n'ont connu que ça : chacun son espace individuel... Pour ma génération et la suivante, la technologie est désenchantée. Ce qui m'intéresse c'est que ce qui est matériellement possible ne le sera peut être pas socialement...»
Les problématiques sont terriblement actuelles. Politiques, économiques, sociales. Sociétales, comme on s'est mis à dire. «Dans le roman, on peut montrer des complots, des rapports de domination. Parce que c'est vrai : il y a des comploteurs et de la participation...» La lecture d'une scène se passant dans un centre d'appels met à nu les petitesses humaines de certaines situations de travail. Mais encore une fois, attention, on est bien dans la littérature, l'écriture qui montre. Dénonce ? «Je travaille beaucoup pour que mes romans ne soient pas des romans à thèse, des tracts ou des pamphlets. Mon objectif est de raconter des histoires et je n'apporte aucune réponse...»
N'empêche, ces histoires partent du réel. D'un réel qui ne passe pas aux heures de grande écoute, qui se noie dans le flot ininterrompu des nouvelles. Comme le prochain livre qu'il est en train d'écrire, inspiré d'un homme enlevé, torturé et dont le corps disparaît : «je m'intéresse au rapport à la torture de ses proches...» 

 

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