La courte échelle à l’extrême-droite… mine de rien

Chroniqueur de l'hebdomadaire Voix du Jura dont il fut auparavant conseiller ecclésial, Pierre Compagnon est un grand lecteur. Chaque semaine il traite d'un livre. Le 18 novembre, son choix s'est porté sur Survivre à la désinformation d'Alain de Benoist. Il compare ce dernier à l'érudit médiéval Pic de la Mirandole, en raison de son caractère de « touche à tout de génie » et à ses « capacités d'analyse et de synthèse, sublimées par une culture invraisemblable ». Admiratif, Pierre Compagnon évoque les « conclusions d'une évidente clarté, comme si la hauteur du propos permettait de donner aux problèmes les plus divers le meilleur éclairage » sur des sujets aussi variés que « la décroissance, le respect dû au vivant, le fléau des addictions contemporaines, la souveraineté, la surpopulation, le populisme », etc.

Est-ce le manque de place qui a empêché Pierre Compagnon de rappeler qu'Alain de Benoist a été l'un des théoriciens de la nouvelle droite dans les années 1970 au sein du GRECE, autrement dit un chantre du dialogue entre extrême-droite et droite républicaine ?

Simon Blin faisait d'ailleurs il y a deux ans dans Libération un portrait de cet intellectuel « à qui l'on doit le rhabillage écolo-identitaire du RN des dernières années (...) Depuis les années 70, il s'est fait une spécialité du détournement de la pensée de gauche. C'est ce qu'il a lui-même appelé un «gramscisme de droite», du nom du penseur marxiste italien Antonio Gramsci selon qui la conquête du pouvoir passe par des victoires culturelles. Un objectif : rendre acceptable par le plus grand nombre une vision du monde réputée inacceptable selon les canons progressistes. Une méthode : dépouiller la gauche de ses références intellectuelles en les remixant à la sauce identitaire. »

Voir aussi cette analyse de Razmig Keucheyan qui estimait en 2017 dans La Revue du crieur que « le projet politico-intellectuel d'Alain de Benoist n'a pas varié : adapter les arguments de l’extrême droite à une époque où ils sont devenus inaudibles sous leur forme historique, celle des fascismes de la première moitié du xxe siècle. »

Newsletter

Lisez la Lettre de Factuel

ABONNEZ-VOUS À LA NEWSLETTER !