Panurge, un grand texte et un acteur complet

A l'occasion du Festival de caves, le comédien strasbourgeois Luc Schillinger signe une interprétation époustouflante de l'œuvre de Rabelais qui est bien davantage qu'un aimable divertissement : un conte sur les illusions de la communication et les vertiges de l'imagination...

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Le public descend les marches de la cave et s'installe sur les chaises disposées en L. Sur l'une d'elle, un homme est déjà là qui mange dans une assiette posée sur ses genoux. Quand tout le monde est installé, il se lève, jette son repas à la poubelle située à l'avant du petit espace scénique. C'est Pantagruel. Il raconte aussitôt sa rencontre avec Panurge qui lui répond dans quatorze langues avant de parler français...

Le comédien, Luc Schillinger, vient d'entamer un extraordinaire voyage en littérature. Il joue tous les personnages, toutes les situations, les dialogues imaginés par Rabelais. Des plus cocasses aux plus philosophiques, des plus drôles aux plus scandaleux. Panurge doit-il prendre femme ou risquer d'être cocu ? Il n'y a évidemment pas que cette alternative dans ce texte complexe qui interroge la communication à coups d'extravagances et de provocations, mais aussi d'une finesse psychologique que révèle le fameux épisode des moutons où il roule avec autant de délice que de méchanceté le marchand en ne lui payant qu'un seul animal...

Entre non-sens du discours et évidence des faits, l'œuvre de Rabelais est interprétée avec bonheur par un acteur complet. La mise en scène de Simon Vincent suggère qu'on le voie en écrivain testant ses trouvailles dans son bureau transformé en laboratoire où tout est permis. Du coup, c'est un personnage en constante recherche de lui-même qui se démène devant les spectateurs, les faisant hurler de rire. D'un rire de bon coeur, mais aussi de désarroi, voire d'un rire coup de chapeau à l'audace, celle que la bienséance empêche parfois de mettre à exécution, celle que seule la création permet d'oser concevoir.

En ce sens, ce spectacle d'un vagabond perpétuellement provocateur, parle de la liberté et de la tolérance, de la distance entre le sens de la vie et le non sens des mots. A moins que ce ne soit l'inverse.

 

Aspect sympathique du festival de caves : après la représentation, les organisateurs paient un verre au public qui peut discuter du spectacle avec les acteurs...

 

 

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