Dans l’immense hall de Palexpo qui abritait du 1er au 5 mai le Salon du Livre de Genève, le stand du Centre régional du livre de Franche-Comté accueillait les éditeurs francs-comtois et leurs auteurs.
Samedi matin. Le salon s’ébroue. Jean-Marie Ravey et son épouse Suzanne installent les livres. La couverture est sobre, blanche avec un titre style caractère de machine à écrire. Un petit dessin de Suzanne personnifie chaque ouvrage. Le décor est planté. Dans la famille Ravey, on aime les livres et l’étal a une signature maison : l’arbre aux marques pages (qui fait penser à un arbre à vœux) apporte la touche finale : on emporte avec soi un marque page avec la phrase d’un livre…
Debout dans la grande allée, Jean-Marie Ravey parle de littérature : «En 2007, Nous avons créé notre maison d’édition parce que notre fille cherchait un éditeur. Ensuite, nous nous sommes pris au jeu et à ce jour nous avons édité onze auteurs. Notre ligne éditoriale est bien définie. Nous éditons de la littérature contemporaine, des auteurs d’origines diverses : deux Parisiens, deux Lyonnais, deux de l’Ain, une Aixoise et une Suissesse. Les livres sont des tranches de vie. Il ne s’agit pas d’autobiographie même si dans le roman, l’auteur met toujours quelque chose de lui-même. L’objectif final est de découvrir de nouveaux talents et qu’ensuite ces auteurs soient édités au niveau national pour se faire connaître. Si on y parvient, ça nous donnera la possibilité d’en éditer plus. ».
Un catalogue de 18 titres
L’éditeur reprend : « Nous avons un comité de lecture composé de six personnes : quatre lecteurs de livres et deux spécialistes de lettres. Quand les six personnes sont d’accord, je sais que le livre se vendra et qu’il plaira aux férus de littérature et à monsieur tout le monde. Notre objectif est de faire trois romans par an. Aujourd’hui nous avons dix-huit titres».
Jean-Marie Ravey aime les livres mais être éditeur n’est pas un métier facile : « il ne s’agit pas de rêver. Nous ne sommes pas dans le virtuel mais dans le commercial et il faut que cela marche pour pouvoir continuer. Si quelqu’un de jeune veut se lancer dans l’édition, c’est très difficile aujourd’hui. Mon épouse et moi sommes à la retraite et c’est plus simple, mais nous devons vendre des livres pour continuer d’en fabriquer... »
Si la recette paraît simple, le travail de l’éditeur ne l’est pas. Il faut surtout bien connaître les livres : « Pour vendre des livres en librairie il faut les avoir lus sinon ils restent sur les présentoirs. Nous avons mis des livres dans deux librairies. Dans l’une, le livre s’est vendu à cent exemplaires parce que la libraire le défendait, dans l’autre il ne s’est pas vendu. Il faut travailler sur toute la chaîne du livre ».
«Le livre numérique ne remplacera pas le papier»
Et la présence sur les salons ? « Pour nous c’est évident, les salons et les dédicaces sont très utiles. Simplement il faut être patient. Ici à Genève les lecteurs reviennent à notre stand et disent : l’an dernier nous avons acheté ce livre, qu’avez-vous de nouveau ? Cela veut bien dire qu’il faut insister. L’auteur vient la première année. Il n’est pas connu mais à force de venir, il finit par être repéré et cela change tout »
Être un éditeur est un métier exigeant. Les commandes sur internet rendent-elles les choses difficiles ? « Internet a changé le système commercial traditionnel. Cela révolutionne le monde du commerce. Avec les difficultés d’accès aux centres ville, les gens achètent de plus en plus sur internet. On ne peut pas occulter cette réalité. Aujourd’hui, celui qui se met en marge est décalé. Je suis convaincu que le livre numérique ne remplacera pas le papier, comme la télévision n’a pas remplacé la radio. Les lecteurs qui utilisent les tablettes le font souvent parce qu’ils voyagent et que c’est plus simple. La tablette est un outil qui aide la culture littéraire. Lorsque le magnétophone est arrivé, tout le monde a pensé que cet outil allait remplacer les enseignants, mais ce n’est pas vrai. Tous nos livres existent sous forme numérique. On les vend en ligne. Les grands éditeurs le savent bien. Les petits éditeurs sont plus frileux : en Amérique 18 % des livres sont numérisés pour environ 2 % en France. Le gros problème des petits éditeurs est la diffusion. Internet fait connaître les livres dans le monde entier ».
Bientôt à Salins-les-Bains et Nantua
Jean-Marie Ravey bichonne les livres : il se déplace dans de nombreux salons. Alors qu’il est présent à Genève avec sa fille Christelle (De couleur mauve, Partition singulière, les étrennes de Russie) et Clémence Guinot (Au bon moment au bon endroit), deux autres auteurs sont au salon de Saint-Louis, près de Bâle. Nous participons aux Mots Doubs, à la manifestation d’été de Salins-les-Bains, à Nantua et prochainement à un salon à Orange. »
Le couple Ravey se déplace en caravane : « On se pose à Divonne. On pique-nique et on reste cinq jours au Salon de Genève. » Le camping est leur seconde passion puisque Jean-Marie est responsable du Groupement de Campeurs Universitaires, une association qui fonctionne en autogestion depuis les congés payés et l’époque de l’éclosion des mutuelles. Il en parle aussi avec passion tout en me mettant en garde : « Aujourd’hui ici, on parle uniquement de mon métier d’éditeur… »
Le Salon s’anime. D’autres éditeurs arrivent. Les deux romancières plaisantent derrière leurs piles de livres. Aujourd’hui, c’est sûr, les éditions de la Boucle sont sur orbite…