Du bitume et des plumes, un art de vivre… bisontin

Le jeune festival concrétise une utopie portée par une trentaines de personnes : permettre à toutes les générations de se retrouver sur la Place du Jura et dans les cours intérieures du quartier Tarragnoz-Citadelle autour d’un événement festif, collectif et indépendant. Bilan de la troisième édition.

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Le quartier Tarragnoz-Citadelle était en fête le week-end des 7 au 9 octobre. Pas n’importe quelle fête. Une fête dédiée à ceux qui vivent là, ouvrent leurs cours intérieures pour accueillir un spectacle, ceux qui s’y promènent parce qu’ils ont entendu parler d’un événement qui sortait de l’ordinaire, ceux qui passent là par hasard, et, trouvent sur la place du Jura un canapé pour s’asseoir, une aire de jeux pour les enfants, un brunch musical. Que sais-je encore ?

Le bonheur est dans les cours

Un peu à l’écart de la modernité de la ville liée au tramway, ce quartier a une allure de village. Il a vraiment changé depuis qu’une poignée de jeunes (une trentaine) ont créé il y a trois ans le festival Du Bitume et des plumes. Le festival s’est agrandi cette année avec de nouveaux lieux d’accueil pour les spectacles et de multiples espaces scéniques naturels à la Gare d’eau ou la Citadelle.

Car il s’agit bien de cela, trouver des espaces poétiques pour le cirque, la danse, le théâtre et la musique. La règle du jeu est simple. Les spectacles sont gratuits. On réserve. On attend les guides. On arrive dans un lieu non connu au préalable. On découvre un spectacle, souvent une cour intérieure, habituellement à l’abri des regards. Samedi  8 octobre, en une heure, mille places étaient déjà réservées. Au total plus de 2000 personnes ont assisté aux spectacles, présentés par des troupes amateurs souvent en passe de devenir professionnelles. Et la frontière entre les deux n’est pas toujours visible au regard de la qualité.

Des spectacles de qualité

Nous voilà dans une cour rue du Porteau. C’est là que la Compagnie Arsène Selavy présente une pièce ubuesque avec des acteurs maquillés à outrance ; Noyons l’poisson propose un univers baroque, hétéroclite avec des jeux de mots dignes de L’Écume des jours de Boris Vian, un rapport aux objets inventif à l’instar du téléphone qui parle (un numéro bien rodé), une histoire de légumes abracadabrante et très drôle. Une troupe à suivre.

Plus tard à la Gare d’eau, le spectacle Les Risks totaux de la Cie The Serious Road Trip a fait le plaisir des petits et grands en évoquant le cirque d’antan où on faisait disparaître les femmes dans des grandes malles, les transperçait avec des couteaux avant de les voir réapparaître en pleine forme. Ici la Gitane sortie de la malle devient une femme moderne aux collants filés. Le numéro bien huilé restaure la magie du cirque avec un sens de la transformation. Plus tard, c’est au Scénacle que l’on retrouve une toute nouvelle troupe La Cie les Engivaneurs dont le spectacle Livère est une approche poétique du monde et de l’hiver.

Un Festival soucieux de l’environnement

Pour les organisateurs, il y a toujours la volonté de décloisonner, d’inventer un nouveau mode de relation avec les habitants du quartier, de partager un espace de fête et d’accueil pour de jeunes compagnies pendant tout un week-end. Le brunch du dimanche matin a eu un vif succès, et, malgré le froid vers 17 h nombreux étaient celles et ceux qui dansaient sur la place du Jura. Sans oublier bien sûr le concert du samedi soir avec la présence de plus de mille personnes.

On peut penser que ce Festival a de belles heures devant lui. Dans l’idéal oui. Le bilan est très positif avec une fréquentation en hausse. Cela impliquerait d’augmenter le nombre de spectacles, donc de lieux d’accueil, et pour les organisateurs, être professionnels avec les spectateurs et les artistes, avec la volonté de maintenir un événement respectueux de l’environnement : « nous sommes débrouillards. Nous organisons un festival propre avec de la récupération ; nous construisons avec des palettes ; nous cuisinons des soupes à partir de légumes de producteurs locaux ou de Biocoop. Les bénévoles sont nourris avec de bons légumes. » Et pas seulement puisque la culture est au rendez-vous.

Une quatrième édition ?

Mais faire une manifestation dans l’espace public qui prend de l'ampleur avec si peu de moyens et une volonté de rester indépendant, demande aux organisateurs de déployer une énergie folle qu’ils ne sont pas certains de pouvoir maintenir à long terme. Aujourd’hui, ils se demandent comment continuer.

La question des moyens financiers se pose, mais pas seulement : « Nous souhaitons rester indépendants et maintenir un événement qui fasse participer un maximum d’habitants du quartier de tous les âges. Nous souhaitons que cette manifestation garde son âme de fête de village où une population éclectique se mélange, s’empare des espaces publics le temps d’un week-end tout en découvrant de jeunes compagnies locales qui ont très peu d’espace de diffusion ».

Le bénévolat (110 personnes) compense l’absence de "moyens" mais cela reste aléatoire. Une ombre plane sur la possibilité d’une quatrième édition. Plusieurs milliers de bénévoles, festivaliers et artistes se retrouvent à chaque édition sur la Place du Jura. Et chaque année la demande grandit de construire ensemble un événement indépendant, festif et collectif. Reste à savoir comment maintenir le cap.

Concert du samedi soir...

 

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