Des pubs plus petites mais plus numériques ?

Besançon devra se doter d’un règlement local de publicité avant juillet, mais les candidats aux municipales sont restés bien discrets sur le sujet alors qu’une consultation publique est prévue au printemps. Nous vous révélons avant les élections le projet des élus : points d’entrées de ville préservées, densité plus faible et réduction de la taille des panneaux de 12 à 8 m². Mais à l’heure où toutes les listes se revendiquent de l’écologie, la publicité numérique ne sera pas interdite. La voie est donc ouverte pour toujours plus d’écrans, alors que le contrat sur le mobilier urbain liant la ville à JCDecaux arrivera bientôt à échéance.

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Il aura fallu plus de 10 ans entre les premières réflexions menées par Besançon et la présentation de son projet de règlement local de publicité (RLP). Celui-ci a été arrêté en toute discrétion en décembre dernier par Besançon Grand Métropole (BGM), qui chapeaute l’élaboration des RPL dans l’agglomération depuis 2007 et qui a entre-temps récupéré la compétence. Mais pas un mot dans le débat des municipales sur la nouvelle politique de la publicité à Besançon. Alors que ce sera l’un des premiers gros dossiers que la nouvelle équipe aura à traiter et qu’une consultation publique est prévue au printemps. Et il y a urgence : faute de règlement adopté avant le 13 juillet, la compétence de police de la publicité reviendrait au préfet.

L’objectif de BGM est d’harmoniser l’affichage publicitaire sur l’agglomération et de la limiter aux entrées de Besançon. Car la capitale comtoise, qui mise sur ses atouts naturels et patrimoniaux pour consolider son image de « ville verte », souffre d’une « forte densité publicitaire », selon le diagnostic même de BGM. On compte dans les limites administratives de Besançon 454 panneaux de 3x4 m² (856 faces), dont 10 lumineux. Ils sont principalement situés sur les grands axes routiers, on en trouve 77 rue de Dole et 37 rue de Vesoul en seulement 1 200 mètres…

875 supports de pubs à Besançon, 1556 faces et un nombre inconnu d’enseignes et de pré-enseignes

Concernant le mobilier urbain, support de publicité et de vidéos, JCDecaux exploite 223 abris voyageurs, 110 sucettes de 2 m² (Mupi), 53 panneaux de 9 m², 30 stations VéloCité et 5 colonnes Morris. Ce contrat, signé en 2007 et qui portait sur 700 faces publicitaires, prendra fin en 2022 et sera donc renégocié par la nouvelle municipalité.

Cet inventaire de la publicité, 875 supports pour 1556 faces, ne tient pas compte des innombrables enseignes et pré-enseignes, dont beaucoup sont illégales. En 2008, la CAGB avait recensé tous ces panneaux dans l’agglomération et avait dénombré 850 infractions avec la réglementation de l’époque. On peut penser que ce chiffre est en hausse du fait du durcissement de la législation nationale en 2012. Les enseignes et les pré-enseignes sont majoritairement concernées par ces infractions. Ainsi, à Châtillon-le-Duc, sur 25 dispositifs illégaux recensés, il y avait 18 pré-enseignes et 7 enseignes.

Alors que la législation n’est actuellement pas respectée, le projet de RPL fixe des objectifs encore un peu plus ambitieux que le Règlement national de publicité. En ayant attendu le dernier moment pour traiter du dossier pub, gageons que Besançon mette plus de volonté à faire respecter son propre règlement dont nous vous révélons sa mouture.

 

Un centre plus joli, mais pas épargné par les écrans intrusifs et énergivores

Le nouveau règlement (à consulter ici) prévoit de diminuer la taille des panneaux publicitaire sur pied ou sur façade de 12 m² à 8 m². Leur nombre devrait aussi baisser du fait d’une règle de densité plus stricte. Il n’y en aurait qu’un par mur et les dispositifs scellés au sol ne seraient exploités que sur une face et interdits en zone d’habitat. Des périmètres relativement restreints situés aux cinq entrées de la ville (voir plan de zonage en bas d’article) seraient préservés. La publicité y serait interdite, exceptée celle sur les abris voyageurs, dans une bande de 10 mètres de part et d’autre de la chaussée.

Dans le centre ancien et vers les sites classés, le paysage devrait s’embellir. Les autocollants sur les vitrines et les stop-piétons scellés ou posés au sol seraient interdits. Les enseignes des boutiques sur les façades en pierre devront se composer de lettres découpées apposées sur le mur, comme celles sur linteau qui pourront aussi être peintes directement sur le bois. La publicité n’y sera pas autorisée, à l’exception notable de celle présente sur le mobilier urbain après avis de l’Architecte des bâtiments de France. Sachant que l’une des orientations choisies en 2012 par le Conseil municipal était de « réintroduire de façon mesurée la publicité en site patrimonial », la renégociation du contrat avec JCDecaux, ou avec un nouveau partenaire, sera déterminante pour l’image de la ville et de ces espaces publics.

Rien n’interdira les écrans numériques au centre-ville, sur les axes routiers ou les zones d’activité. Ils ne devront pas dépasser 4 m² en zone d’habitat, où ils seront éteints de 20 h à 6 h. Ailleurs, l’extinction des dispositifs publicitaires lumineux, énergivores et captant fortement notre attention, est prévue de 22 h à 6 h, alors que la loi préconise une extinction à 1 h. Mais cela ne concernera pas le mobilier urbain. Les pubs éclairées sur les abribus resteraient toujours allumées, tout comme celles des sucettes numériques ou des écrans plus gros de 8 m², considérés comme du mobilier urbain et qui pourront afficher une image fixe la nuit.

Des candidats frileux sur le sujet

Les candidats aux municipales sont un peu frileux sur le sujet, car tout semble écrit sans qu’un véritable débat n’ait eu lieu. La seule réunion publique sur le sujet s’étant déroulée en 2013. La liste menée par Anne Vignot, candidate EELV d’une union de la gauche et des écologistes nous indique vouloir « produire un règlement local de publicité plus exigeant, en interdisant à terme les écrans lumineux, et en réduisant tant la taille que la densité d’implantation des panneaux publicitaires à Besançon ». Elle a voté le projet et ne semble pas vouloir l’amender. Elle évoque un hypothétique RPL intercommunal. Sans parler du délai, rien n’indique que cela soit réalisable. L’agglomération est déjà parvenue à chapeauter et à harmoniser les RLP adoptés récemment par presque toutes les communes. Et certaines semblent réticentes à l’adoption d’un RLP intercommunal.

Claire Arnoux, des Insoumis, nous répond que la liste Besançon verte et solidaire a signé le Pacte pour la transition et « s’est engagée au niveau 3 concernant la mesure 22 sur la publicité dans l’espace public ». Cela revient à n’autoriser uniquement les affiches papier ne dépassant pas 2 m ² et en autorisant qu’un seul panneau par tranche de 2000 habitants, « reprenant ce qui se fait pour l’affichage d’opinion », indique les auteurs du Pacte pour la transition proposé aux candidats par un collectif écologiste. Nous n’avons pas reçu de réponses des autres, mais Éric Alauzet, candidat LREM et Ludovic Fagaut, candidat pour les Républicains ont aussi voté pour le projet de RLP ici décrit et adopté à l'unanimité le 20 décembre 2019 au Conseil de communauté.

Reste à savoir quel suivi sera mis en place pour mettre en conformité les publicités avec le nouveau RPL, et si celui-ci sera amendé après la consultation publique. Sans restriction réglementaire locale, il est possible qu’un bon nombre de panneaux de 12 m² soit remplacé par des panneaux de 8 m² numériques, la taille maximum qu’a fixée la loi pour cette catégorie. Place au débat ?

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