Comique, le dernier spectale du Théâtre Group’ n’est pas drôle

Le Théâtre Group' nous avait habitués à l'audace et à la fraicheur. Avec Comique (titre provisoire), la compagnie lédonienne a présenté jeudi à l'Amuserie la première d'un spectacle mal ficelé, parfois intéressant mais mal fagoté, pas terminé, par moments consternant, où seul surnage l'accordéoniste Laurent Peuzé.

Comique, du Théâtre Group'

Le Théâtre Group' nous a habitué à oser, à faire rire, à faire réfléchir, à ne pas se vautrer dans la facilité. Avec Comique (titre provisoire), il a présenté à l'Amuserie de Lons-le-Saunier la première d'un spectacle mal ficelé. Parfois intéressant mais mal fagoté, pas terminé, par moments consternant. 

A leur décharge, Patrice Jouffroy et ses comparses ont cherché la difficulté. Il ont cherché à mettre en boîte ce qu'ils appellent « l'humour de masse », notamment celui des professionnels du rire gras, raciste, sexiste, bref du rire ignoble, ignare, abject, décérébré qui caracole dans les médias incultes. Ils ont cherché à rire et faire rire aux dépens de ces tristes sires pour qui l'humour n'est que distraction sans esprit, mépris des faibles, des intellos, des vieux, des femmes, des juifs, des arabes... Comble de l'ironie, ils leurs ressemblent. Comble du tragique, le personnage de Jouffroy lui-même, qui incarne les valeurs d'humanisme critique du Théâtre Group', n'est absolument pas convainquant, ni même drôle, quand il les défend - les valeurs - pour clamer son refus des dérives proposées par ses personnages. Il va même jusqu'à passer pour un censeur de la liberté d'expression contre qui le public est invité à se prononcer ! 

Exemple. Bernard Daisey, excellent comédien au demeurant, joue les trois personnages d'une saynète du quotidien de voisinage. Il joue à merveille le vieillard aux portes de l'agonie, mais pourquoi faire ? Pour arriver à un dérapage à connotation sexuelle où l'on se moque méchamment de la libido d'une vieille dame. C'est terriblement dérangeant, mais Jouffroy intervient pour tout arrêter : « ce n'est pas ce que veut le Théâtre Group' ». Daisey prend alors le public à partie pour lui demander s'il est choqué. Il ne l'est pas ! Mais c'est une mauvaise question : on peut ne pas être choqué, mais tout simplement consterné, notamment par le premier degré qui aplatit tout, met tout sur le même plan : ignominie, valeurs, rire, et donc négation du sens.

Au coeur de ce massacre, Laurent Peuzé, l'accordéoniste, réussit là où ses compères échouent grâce à la distance introduite par la musique, la mémoire, la culture, une attitude... Daisey lui demande de jouer l'agonie, il propose une réinterprétation sublime, clownesque, inspirée, de Child in time de Deep Purple... Et ça marche. Tout au long de la pièce, par son incapacité à dire, à simplement parler, il sauve l'honneur car lui seul a de l'humour.

Quant au personnage du clown de la pièce, joué par Pio D'Elia, il est sans consistance car sans poésie, sans profondeur. Il fait rire jaune, devient lui aussi ignoble, sort de mauvaises blagues avant une saillie antisémite que Jouffroy interrompt en révolvérisant le fautif qui avait déjà été averti pour une précédente incartade. « Pas de ça chez nous ». De ce fait, persistant dans sa position d'empêcheur de rire bête et méchant, de censeur de braves gens riant de tout et n'importe quoi avec n'importe qui, mais lui-même trop sérieux pour faire sourire, il rate sa démonstration. 

Il tente de rattraper avec une dissection du clown sacrifié, mais ça tombe à plat. Il n'a rien dans le bide que des mirlitons et des éléments de farces et attrapes.

Il reste un espoir pour que ce spectacle s'en sorte : retravailler la mise en scène, j'allais dire la mise au point, pour mettre le jeu à bonne distance. 

 

 

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