La Guerre d’Algérie pèse encore son poids de morts et de disparus

La traditionnelle commémoration du massacre du 17 octobre 1961 a rassemblé 150 personnes à Besançon. Après la reconnaissance macronienne de la responsabilité d'un « système » dans l'assassinat de Maurice Audin, le site 1000 Autres initié par l'historien bisontin Fabrice Riceputi se base sur une archive récemment ouverte pour continuer la recherche de disparus depuis 60 ans en suscitant des témoignages...

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La cérémonie est devenue rituelle chaque 17 octobre sur le pont Battant de Besançon. Cette année, environ 150 personnes se sont rassemblées pour commémorer le massacre de 1961. Le contexte de l'époque est celui, très tendu, des négociations de paix entre le gouvernement français et le gouvernement provisoire de la république algérienne.

A Paris, la fédération de France du FLN avait organisé une manifestation pacifique de protestation contre le couvre-feu qui ne touchait que les Maghrébins. Interdite par le préfet de police Maurice Papon, elle fut très violemment réprimée et les morts de manifestants, dont certains « noyés par balle », font encore l'objet d'évaluations divergentes, de plusieurs dizaines à 300 morts ou disparus.

Cette année, l'anniversaire du massacre vient après qu'Emmanuel Macron a reconnu la responsabilité de l'armée et de l'Etat dans l'assassinat de Maurice Audin dans le cadre d'un « système ». L'historien bisontin Fabrice Riceputi, estime que le président de la République a fait un pas important, mais n'est pas allé assez loin : « il ne s'agit pas de faire plaisir à l'Algérie, c'est une affaire universelle qui concerne tous les Français... »

Poursuivre la recherche sur les disparus

Fabrice Riceputi entend ne pas s'arrêter à la seule disparition de Maurice Audin. Son « meurtre grossièrement maquillé en tentative d'évasion (...) fut l’un des nombreux cas d’enlèvement, séquestration, torture, suivis souvent de mort, produits, à Alger, de janvier à septembre 1957 », explique le site 1000 Autres qu'il a créé mi-septembre avec l'association Maurice-Audin et le site Histoire coloniale.

Ayant l'objectif d'aider à la résolution de nombreuses autres disparitions – 3024 recensées par Paul Teitgen, secrétaire général à la préfecture d’Alger – le site 1000 Autres publie notamment plus de 1000 notices individuelles et suscite des compléments d'information et des témoignages. Pour les proches des disparus, il apporte également des pièces d'archives confirmant ce qui ne l'avait jamais été. Une soixantaine d'identifications ont été ainsi confirmées grâce au site.

Ces notices sont majoritairement tirées des restes du fichier du Service des liaisons nord-africaines conservés aux Archives nationales d’Outre-mer et accessible depuis l'an dernier. Points communs aux personnes disparues y figurant : « elles furent arrêtés au cours de l’année 1957 par l’armée française ; leurs proches réclamèrent aux autorités de connaître leur sort, très souvent en vain ; beaucoup furent torturées et certaines ne reparurent jamais ».

« Porté disparu jusqu’à nos jours, il a laissé 4 filles, entre 1 et 5 ans, dont ma mère... »

A peine le site était-il mis en ligne qu'il suscitait une première réaction émanant du petit fils d'un disparu : « Merci pour ce document qui nous permet d’avoir la preuve irréfutable de son arrestation par l’armée, même si nous n’avons jamais douté du récit de notre grand-mère. Elle nous raconte cette nuit du 21 juin, nuit de son enlèvement, comme la fin du monde. Il est porté disparu jusqu’à nos jours. Il a laissé cette nuit 4 filles, entre 1 et 5 ans, dont ma mère... »

Avant cette brève présentation de Fabrice Riceputi dans une sono trop faiblarde, Jean-Jacques Boy et Brahim Sedki avaient évoqué l'importance de la reconnaissance des mémoires. Après quoi, une chorale entonna l'émouvante chanson d'Idir, Avava Inouva... Puis des fleurs furent lancées dans le Doubs.

Une anecdote : un passant d'une quarantaine d'années s'arrête au mitan de la manifestation immobile, interloqué : « Qu'est ce qui se passe ? » Je lui réponds en deux phrases. Il me remercie et reste jusqu'au bout...

 

 

 

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