Un engagement sans réserve pour la paix

Parti le 23 mars 2012 de Salins-les-Bains, à pied avec son âne Isidore pour promouvoir la paix à Bethléem, le prêtre Lucien Converset dit Lulu s'est arrêté cet hiver en Serbie. Il va reprendre son chemin au jour anniversaire de son départ. Ses amis jurassiens organisent à la même date une marche de soutien.

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« Avoir du souffle pour bâtir une société toute autre… Marcher, me semble-t'il, permet de quitter les zones de l'idéalisme ». Actuellement en Serbie, à Kovilj non loin de Novi Sad la deuxième ville du pays, Lulu attend le retour du printemps, la veille de la fête chrétienne des Rameaux, un an tout juste après son départ. Il n'attend pas, en fait il poursuit sa démarche, son combat pour une humanité réconciliée avec elle-même. Il marche aussi huit à dix kilomètres chaque matin et vient tout juste de recevoir des sandales neuves. Des amis franc-comtois, Jean-François et Armelle de Fournets-Luisans, les lui ont envoyées. Il les a étrennées ce jeudi matin, se sent « les pieds comme dans du velours », a-t'il dit avant que nous échangions par internet.

Avec l'âne Isidore, il a parcouru 2.500 km pour arriver en Macédoine en novembre dernier. Là il s'est trouvé confronté à une forte sècheresse. Il a pu confier Isidore pour l'hiver à une écurie chez de nouveaux amis et est retourné en Serbie chez Radenko « Bracha » Kolarov et Nicole Girardier une Jurassienne installée dans le village au bord du Danube. Lulu consigne chaque jour ses réflexions et les fait partager sur un blog tenu en France par Elisabeth Lamy. 

« Je ne veux pas garder pour moi ce que les gens me donnent » dit-il pour commencer. Une vive émotion le saisit, il la surmonte aussitôt. « Je mènerai jusqu'au bout une lutte non violente, pour que nos relations soient fondées autrement que sur la domination. J'ai trouvé tout le long de mon chemin beaucoup de sympathie, un bon accueil de mon action. » Lulu s'est évertué à communiquer avec celles et ceux qu'il a rencontré(e)s en France, en Suisse, en Allemagne, en Autriche, en Hongrie, en Serbie et en Macédoine. On lui a demandé « d'où viens-tu, où vas-tu, que veux-tu dire ? » Il se félicite d'avoir pu expliquer pourquoi il conteste l'armement nucléaire, la menace destructrice que cet armement fait peser et les milliards engloutis quand une grande part de l'humanité manque de l'élémentaire. Lulu est engagé dans ce combat depuis son retour d'Algérie en 1961 aux côtés d'un autre prêtre, Gaby Maire, engagé dans les quartiers populaires de Vitoria au Brésil et assassiné le 23 décembre 1989, et de Jean Marie Muller le fondateur du Mouvement pour une Alternative Non violente (MAN). Il rappelle les qualificatifs récents du pape Benoît XVI à propos de l'armement nucléaire : « fallacieux et funeste ». Sa vision de l'Eglise est celle d'une communauté engagée au service des déshérités, des fragilisés plus qu'une institution prescriptrice de conduites et de dogmes. « On a un travail à faire en amont des drames que nous vivons » dit-il, « toutes les stratégies à base de violence ont échoué. Gândhî, Martin Luther King et Tolstoï ont montré d'autres voies ». A ce moment de notre conversation, derrière lui, son hôte Bracha citoyen d'un pays que la guerre et la violence ont ravagé il y a peu, se fait entendre en français : « on cherche une lutte différente ! » 

Bracha accueille également Nicole qui a vécu dix ans au Liban, vingt-trois ans au total dans quatorze pays différents autour de la Méditerranée et en Afrique noire dont le Mali. Elle a trouvé là « une maison de retraites 10 étoiles » où elle entretient ses liens transfrontaliers et s'adonne à la peinture qui est « plus une raison d'être qu'un hobby. » Ce sont ses neveux, animateurs de Loisirs populaires à Dole, qui ont permis ce contact avec Lulu. L'un d'eux, Christophe est venu marcher avec lui pendant 48 heures. 

« Je me rends compte en étant parti depuis un an de ce que c'est que d'arriver le soir et de ne pas savoir où dormir, pas savoir où s'arrêter. Pour moi ça va, mais pour ceux qui sont obligés de se sauver, de se cacher, pour les réfugiés… C'est bouleversant ! Je reçois beaucoup de sympathie et je vois aussi des gens qui me font comprendre : cause toujours, marche toujours ! » Lulu n'hésite pas à parler d'utopie pour la perspective qu'il défend. Il sait le monde où il marche. C'est justement pour ça qu'il ne s'agit pas de renoncer. « Je me battrai jusqu'à la fin de mes jours. Savoir mes amis en marche le 23, ça me donne du souffle. J'ai la chance d'avoir avec moi des gens très coordonnants. Et Isidore me fait savoir quand je prends des nouvelles : dépêche toi de revenir ».

Des amis encore ont offert des ânes à Lulu et ceux avec qui il  organise des campements pour les enfants des quartiers populaires à Dole. C'était il y a plus de trente ans. « Ils m'ont dit alors : tu verras ces animaux sont des médiateurs, ils vont te mettre en lien avec plein de gens. L'idée de partir est née au contact de l'âne, l'idée de partir au pas de l'âne ». Lulu se réjouit, très ému encore : « je suis heureux si je peux redonner tout ce que les gens me donnent. C'est grâce à plein d'amis que je suis parti. C'est beau ça ». 

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