Trois femmes et un confinement/Jour 32

Au final, j’ai pensé que ce discours était un discours de faux-cul… en espérant qu’il n’en était pas un… en craignant qu’il en soit bien un…

fenetre

JOUR 32 – MIMI

Jour 30, j’avais conçu mon billet en deux parties : l’intra-anima que vous avez pu lire, et un commentaire sur le discours d’Emmanuel Macron, celui où il fait acte de contrition, parle des Jours Heureux dessinés par le Conseil National de la Résistance… Tollé des 2/3 du comité de rédaction, soit la majorité des voix. Macron n’avait rien à faire intra-muros, ni, surtout, intra-anima. Je suis démocrate, j’ai supprimé mon commentaire.

Mais têtue, je remets la question sur le tapis aujourd’hui, même si je trouve que l’analyse politique n’est pas si simple à faire que ça. Anouk me fait justement remarquer qu’entre les Orban et autres Salvini, nous ne sommes pas si mal lotis. Sans parler des Poutine, Trump… La crise est inédite, quelles réponses faut-il y apporter ? … Je reviens au discours d’Emmanuel Macron, quand même. Tout d’abord, période de mise en route, il m’a ennuyée. Ensuite, à remercier la première ligne, puis la deuxième, puis la troisième, il m’a « grave énervée », dirait Nina. Voilà un homme qui, il y a deux mois, continuait de mépriser tout ce peuple qui nous sauve aujourd’hui ! Voilà un homme qui restait obstinément sourd aux cris du monde hospitalier ! Comment penser qu’il a véritablement compris qu’il y a urgence à changer de politique ? De quoi être « vénère », vous en conviendrez ! Alors qu’en fin de son discours, il évoquait les Jours Heureux, j’étais effarée. Disant tout cela, il est sérieux ou il continue à me prendre pour une imbécile ? … Encore un exercice de com ? Encore de la pédagogie en direction d’un peuple idiot qu’il faut calmer afin qu’il ne retourne pas, dare-dare, dans la rue au sortir du confinement ? Au final, j’ai pensé que ce discours était un discours de faux-cul… en espérant qu’il n’en était pas un… en craignant qu’il en soit bien un…

JOUR 32 – ANOUK

Bon. Chose promise, chose due. Poursuivons donc notre visite de l’appartement de Mimi. Il y a quelques années, j’avais écrit un album pour enfant, pour tout petits, qui s’appelait « Chez Mimi », et qui racontait les aventures d’une petite fille chez sa grand-mère. Il n’a jamais été publié et j’ai hélas perdu le texte. Mais l’histoire ne s’arrête pas là, car « Chez Mimi » ne cesse de se réinventer. Aujourd’hui, « Chez Mimi » est un phalanstère gynécée, hier c’était encore autre chose, et demain… « Chez Mimi », ce n’est pas un appartement, ce n’est pas non plus une maison de vacances, en tout cas pas seulement. « Chez Mimi » c’est un récit, un album souvenirs, c’est une histoire pleine de digressions, non ! Pas de digressions, de strates et de couches qui se superposent ou se mêlent, comme un mille feuilles de légendes familiales. « Chez Mimi » c’est là qu’on revient, c’est de là qu’on s’échappe, c’est un traquenard, c’est un port d’attache, une boîte de pandore, un piège mortel, un remède à tous les maux, un endroit abrité du monde, où le seul danger qui nous guette c’est l’angoisse, et où l’angoisse se dissout, pour laisser place à la peur de ne plus jamais trouver le courage de l’envol. « Chez Mimi », ce n’est pas ouvert sur l’extérieur, mais sur l’intérieur, c’est propice à l’introspection, et pas tellement au voyage. C’est un endroit parfait pour se confiner. Un endroit parfait pour attendre la fin du monde.

 Chez Mimi, il y a un long couloir qui traverse tout l’appartement (en tout cas l’étage du bas), jusqu’à une grande pièce donnant sur la rue, et qui n’est ni le salon, ni la chambre de Mimi, mais qui est à la fois le salon et la chambre de Mimi. La chambre de Mimi, à proprement parler, est une petite alcôve cachée sous l’escalier, et qui n’est accessible que par une ouverture dans le mur opposé à la fenêtre. Ce « salon » qui n’en est pas un est composé d’un coin bureau/bibliothèque, et d’un coin qu’on est obligé de qualifier de « salon » (canapé, fauteuil, table basse, cheminée condamnée servant de coin musique). On s’y croirait ! On s’y croirait tellement que tout le monde appelait cette pièce « le salon ». Mais ce n’est pas le salon, protestait Mimi ! C’est ma chambre ! Aujourd’hui que toute la maison est à elle, et rien qu’à elle, je crois qu’elle a finalement accepté de considérer le salon comme un salon. Après tout, il lui reste sa chambre alcôve et les deux chambres du haut ! Car poursuivons : un escalier en bois très raide et usé permet de monter dans les anciennes combles. À droite de l’escalier, une vaste pièce ouverte, avec un mur en pierres apparentes. De là, un autre escalier en fer forgé rouge (œuvre de Serge Filippini, qui n’écrivait pas que des poèmes et des romans, mais savait aussi fabriquer des escaliers) monte dans une mezzanine, l’ancienne « chambre » de Serge. En réalité, toute la pièce était sa chambre à l’époque. Il y avait un bureau sous le vélux, un petit canapé, et une bibliothèque qui servait de paroi. À gauche, en haut de l’escalier, une porte (la seule porte qui ferme dans tout cet appartement), donne sur ma chambre. C’était ma chambre d’enfant (j’avais choisi un papier peint avec des petits lapins et c’est comme ça, en clignant de l’œil pour faire bouger les petits lapins, que je me suis rendue compte que j’étais myope de l’œil droit) puis d’ado (un petit lit fait de deux matelas empilés, un grand bureau sous le vélux, une affiche de Taxi Driver, une autre de Stranger Than Paradise). Aujourd’hui, un grand lit, un bureau en bois, des livres, des tableaux, du parquet. L’endroit idéal pour écrire. Oui mais voilà. Nina considère que c’est celle-là, SA chambre, alors que je considère moi que c’est MA chambre, et que la sienne est l’ancienne chambre de Serge ! Cela donne lieu à quelques dialogues intéressants : Nina, as-tu vu la carafe ? Dans ma chambre ! Laquelle ? Ma chambre que tu considères comme ta chambre ou la chambre que je considère comme ta chambre ? Vous suivez ? C’est un peu confus. C’est normal. Mimi déteste plus que tout la normalité, surtout pour tout ce qui concerne la maison. Redescendons au rez-de-chaussée, où se trouvent les deux seules pièces qui ne font pas débat : la salle de bain et la cuisine. La salle de bain serait presque normale : une baignoire, un parquet traité spécialement pour les salles de bain, des toilettes, un Tancarville bringuebalant… Seule anomalie : une fenêtre donnant non pas sur l’extérieur (comme je vous l’ai dit, on évite) mais sur la cuisine ! Comment se fait-il qu’il y ait une fenêtre au beau milieu d’un appartement ? C’est un mystère. La fenêtre est d’époque, placée à environ 60 cm du sol, et elle donne sur la table où nous mangeons. Nous y voici enfin, dans la cuisine, le cœur de la maison, là où tout le monde se retrouve (car pourquoi s’installer au salon quand on peut s’installer dans la cuisine ?). La cuisine est la seule pièce de la maison qui n’ait pas encore été rénovée par Mimi. Unique élément de modernité : le lave-vaisselle. Mais voilà que nous avons largement dépassé les quatre mille signes que nous nous sommes imposés comme limite ! Flute ! je ne vais pas pouvoir vous parler du lave-vaisselle ce soir. Je vous en parlerai donc lundi. Je sais, vous êtes déçus. Mais passez tout de même un bon week-end. Et surtout, restez confinés, c’est dangereux, dehors… 

JOUR 32 – NINA

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