« Même si on est content de ces petites avancées, ce sont des trompe-l’œil », les intermittents en attendent davantage pour la culture

L’annonce d’une prolongation de quatre mois de leurs droits au chômage, d’aides pour le secteur et la réouverture sous conditions des lieux culturels aujourd’hui ne sont pas des mesures suffisantes pour les intermittents. La CIP FC annonce qu’elle poursuivra ses actions et l’occupation du CDN de Besançon, mais qu’elle cohabitera avec les activités culturelles qui y seront présentées.

Les intermittents appellent à manifester samedi 22 mai contre l'assurance chômage. Photo : LC

Ils demandaient la reconduction de l’année blanche, qui avait prolongé le versement des allocations chômage pendant un an alors qu’ils ne pouvaient presque pas travailler. Le gouvernement vient de les prolonger de 4 mois, ce qui permettra aux intermittents de percevoir leur chômage jusqu’à fin décembre au lieu de la fin août. Pas de quoi satisfaire la Coordination des intermittents et précaires de Franche-Comté, qui occupe le CDN de Besançon depuis 67 jours. L’occupation va continuer et « se transformer en cohabitation », indique Elliot, régisseur lumière qui participe à l’organisation des actions. Les intermittents veulent pouvoir laisser leurs collègues professionnels et étudiants travailler, tout en continuant à se mobiliser pour le secteur de la culture.

« Ce sont des mesurettes, voire un effet de communication. Ça ne répond qu’à une toute petite partie du problème », commente Didier Rolot, électricien audiovisuel qui participe à l’occupation du CDN. « Initialement, on demandait une année. Là, quatre mois, ce n’est pas un an. On ne fait pas 507 h en quatre mois », ajoute Lionel, un musicien qui participe également au blocage. Il continue : « Tout cela se base sur une réouverture à l’automne. Mais les saisons seront finies à ce moment-là. Il n’y aura plus vraiment de travail. Déjà que celle du théâtre arrive à sa fin. Sans parler des festivals… ».

Charline, backlineuse, ajoute : « Je ne peux travailler que dans des grosses tournées ou des gros festivals. Ce n’est pas vraiment une réponse qu’on a pu avoir. » Par conséquent, ils demandent une prolongation jusqu’à fin août 2022, voire après, le temps que l’activité culturelle reprenne vraiment.

La prolongation des droits n’est pas la seule annonce. Ainsi, les personnes qui arrivent pour la première fois dans le statut, et qui ont moins de 30 ans, n’auront à faire que 338 h au lieu des 507 h habituelles. Là encore, même si les occupants du CDN se réjouissent que la question des jeunes primo entrants soit évoquée, cette annonce pose problème. Tout d’abord, ils se demandent pourquoi il y a une limite à 30 ans, alors que des personnes rentrent dans le statut plus tard. Didier Rolot va plus loin en se demandant pourquoi la limite n’est pas abaissée à 200 h. Voir pourquoi ce n’est pas une ouverture symbolique du statut à partir du moment où les nouveaux arrivants choisissent leur métier.

Des chiffres et des annonces incomplètes

Début février, les ministères du Travail et de la Culture ont commandé le rapport Gauron pour faire état du monde culturel pendant la crise. Sorti en avril, il indique que 75 % des intermittents pourront conserver leur statut sur l’année qui vient. Ici encore, les intermittents de la CIP tiquent. Ce chiffre est une moyenne nationale qui prend en compte au même niveau Paris, et sa forte activité culturelle, et le reste de la France. Ainsi, ils estiment que ce chiffre serait plutôt de 50 % pour la Franche-Comté. Selon eux, 80 % des intermittents qui travaillent dans le domaine du spectacle vivant ont travaillé moins de 300 h depuis l’année dernière.

Les réouvertures d’aujourd’hui ne devraient pas non plus résoudre le problème du manque d’heures. Avec les jauges réduites (35 % des salles puis 65 % en juin) et l’embouteillage de spectacles prévus, les intermittents n’auront pas tous la possibilité de travailler. « Avec la jauge des 35 %, ce ne sont pas tous les théâtres qui vont pouvoir ouvrir, seuls ceux qui peuvent fonctionner à perte », ajoute Mélanie, comédienne, lors d’une conférence de presse de la CIP. Absente au tableau des annonces, la réforme de l’assurance chômage pose toujours question. Ici, Didier Rolot rappelle que le mouvement souhaite le retrait complet du projet : « Qu’il soit modifié ne nous irait pas. Nous voulons son retrait pur et simple. » Il est d’ores et déjà prévu une manifestation intersyndicale samedi 22 mai à Besançon, mais aussi une « action sanglante », sans plus de détails pour le moment. Hors des luttes, les intermittents continuent les actions d’aide et d’accompagnement alimentaire et administratif à ceux qui en ont besoin.

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