Les IUT prêts au bras de fer

Il y a trois ans, étudiants et enseignants de nombreux IUT s'étaient mobilisés contre l'une des conséquences de la loi LRU, la loi Liberté et Responsabilité des Universités votée à l'été 2007. En accordant une large autonomie aux présidents d'universités, elle leur permettait de récupérer les crédits « fléchés » destinés à leurs composantes que sont les IUT, en les noyant dans leur budget.

« Cela fait deux ans qu'on se bat avec le ministère pour qu'il fasse appliquer des textes que ne respectent pas les présidents d'universités. » Faisant mercredi dernier aux professeurs le compte rendu d'une assemblée générale des directeurs et des présidents des 115 IUT du pays, le directeur de celui de Besançon-Vesoul, Joël Pierre-Eugène, n'a pas caché son agacement et son inquiétude.
Il y a trois ans, étudiants et enseignants de nombreux IUT s'étaient mobilisés contre l'une des conséquences de la loi LRU, la loi Liberté et Responsabilité des Universités votée à l'été 2007. En accordant une large autonomie aux présidents d'universités, elle leur permettait de récupérer les crédits « fléchés » destinés à leurs composantes que sont les IUT, en les noyant dans leur budget. Il s'agit notamment de gestion de ressources humaines et de taxe d'apprentissage versée spécifiquement aux IUT par les entreprises.
Le mouvement de 2008 avait débouché sur la promesse du ministère de l'Enseignement supérieur de faire respecter cette autonomie dans l'autonomie que constituent ces recettes affectées. Mais, aujourd'hui, après un nouveau rendez-vous avec le ministre, Laurent Wauquier, les patrons des IUT constatent que rien n'a changé : « Le ministre demande que nous lui fassions remonter les dysfonctionnements, mais ça fait trois ans qu'on le fait, on a eu tort de lui faire confiance », dit Joël Pierre-Eugène. Seule satisfaction : le ministre « demandera aux recteurs de refuser les budgets des universités s'ils ne respectent pas les IUT, s'il n'y a pas de contrat d'objectifs et de moyens signé entre universités et IUT ».
Pour l'IUT de Besançon-Vesoul, la situation n'est « pas catastrophique » et son budget n'a baissé que de 10 000 euros, sur 10 millions. En revanche, l'IUT de Belfort-Montbéliard voit d'un assez mauvais oeil « la sortie du budget de 1,3 million d'euros d'heures complémentaires », explique le directeur, Philippe Pracht. Ces heures complémentaires d'enseignement sont dues à un « sous-encadrement conséquence d'un faible budget », ajoute-t-il.
Claude Condé, le président de l'université de Franche-Comté, n'est pas du même avis : « Ce million en plus tous les ans nous paralyse. On a décidé de les centraliser afin de ne pas transformer les heures complémentaires en investissement ou en fonctionnement. » En clair, cela signifie que des classes ont été artificiellement gonflées en effectifs pour financer du matériel !
Quant au contrat d'objectifs et de moyen (COM), basé sur un modèle imposé par le ministère, Claude Condé « confirme » qu'il le signera « avant la fin de l'année », même s'il n'était, comme la conférence des présidents d'université, « pas trop d'accord » avec le préambule. « On a de bonnes relations avec les IUT », tempère-t-il, « on leur a proposé un COM général pluriannuel avec un avenant budgétaire annuel...»
Cela comprendra-t-il les recettes d'apprentissage ? « Cela doit être dans le COM sur lequel on doit se mettre d'accord. Si on ne l'est pas, on ne signera pas...» Et de rappeler que « les IUT ne sont pas des établissements, ils ont une autonomie relative. mais on n'a pas baissé leurs dotations ».
On le voit, l'ambiguïté de la LRU n'est pas estompée...

 
 
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Fédérer les cinq IUT de Bourgogne et de Franche-Comté
 
« Le réseau des IUT est en danger », dit Joël Pierre-Eugène, directeur de l'IUT Besançon-Vesoul, 1 500 étudiants. « Le système se délite », souligne son collègue de Belfort-Montbéliard, 1 700 étudiants. Deux entités, deux « composantes » de l'université de Franche-Comté faisant partie des 30 % des 115 IUT français ne disposant pas des heures complémentaires sur leur unité budgétaire, selon un état des lieux effectué par les associations des présidents et des directeurs d'IUT. Ce même baromètre souligne la baisse des dotations pour un IUT sur trois, une « ponction des ressources » pour 46 % en 2011, 56 % en 2012.
Ayant le sentiment d'être mal aimés des universités, les tenants des études supérieures technologiques ont décidé de réagir. Les deux IUT de Franche-Comté et les trois de Bourgogne (Dijon-Auxerre, Le Creusot, Chalon) sont engagés dans un processus de constitution d'un collégium, mot savant désignant une association ou un regroupement qui pourrait intéresser les écoles d'ingénieurs.
Il s'agit d'« éviter que les IUT se diluent dans les grands domaines » où ils sont rattachés (santé, sciences humaines, sciences, droit-économie), mais aussi de construire une représentation au niveau décisionnel du PRES, le Pôle de recherche et d'enseignement supérieur Bourgogne-Franche-Comté, voire de la future université fédérale.
Alors que les élections aux conseils d'administrations se profilent avant l'été, les IUT, qui n'ont aujourd'hui qu'un seul élu sur trente à l'UFC, cherchent à défendre un système où les étudiants, plus encadrés qu'en fac, préparent un diplôme professionnel. Reste que 80 % poursuivent leurs études et un iutien coûte quatre fois plus qu'un étudiant de fac, lequel passe moins souvent son examen...
 

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