Le rêve et le caprice

La comparaison est tentante quand on observe les aventures parallèles - ou croisés ? - de la cabane suspendue au grand hêtre de la forêt de 800 ares qu'aquit Xavier Marmier à Cléron il y a sept ans, et du projet du groupe Pierre & Vacances de construire dans la forêt de Poligny 400 bungalows et une piscine à vagues couverte où il fait toujours beau.

Comparaison n'est pas raison. N'empêche...

La comparaison est tentante quand on observe les aventures parallèles - ou croisés ? - de la cabane suspendue au grand hêtre de la forêt de 800 ares qu'aquit Xavier Marmier à Cléron il y a sept ans, et du projet du groupe Pierre & Vacances de construire dans la forêt de Poligny 400 bungalows et une piscine à vagues couverte où il fait toujours beau. Leurs destins respectifs en diront beaucoup sur l'état de notre société. Le cas échéant, leurs destins judiciaires diront peut-être si le droit défend l'humain ou la raison du plus fort.

La première est le fruit d'un rêve de gosse. Le second est le fruit de la pensée rationnelle d'un entrepreneur d'un pays où l'espace si est rare et l'organisation vertu, les Pays-Bas, que l'évasion y a sa place impartie. (A tel point que de nombreux Neerlandais viennent chercher l'aventure et l'improvisation paysagère dans les montagnes françaises.)

La première a été construite à la main avec l'aide de quelques talentueux et techniciens amis, se veut économe en eau, en énergie, non polluante. Le chantier de la seconde mobilisera des dizaines d'engins et, qui sait, peut-être une protection policière.

La première envisage de récupérer l'eau du toit, comme on récupère l'eau de pluie dans les citernes des alpages de la haute chaîne. La seconde créé l'émoi chez les pêcheurs et les habitants qui craignent pour leur propre et vitale ressource en eau, réclame de quoi chauffer douze mois par an un univers tropical artificiel.

On grimpe à pied jusqu'à la première par un sentier à peine aménagé. On arrive jusqu'au second comme au péage d'une autoroute.

On entend le vent et les oiseaux dans la première, on y vit une expérience unique. On entend le vent et les voisins dans la seconde, on y vit une expérience commune.

On part tranquille aux champignons de la première, on voit défiler les saisons, on sait le risque de la rencontre avec la tique et on l'affronte en connaisseur. On vit dans la forêt et on l'apprend. On est derrière des grilles dans le second, on vient une fois ou deux par an pour la piscine à vagues où il fait toujours chaud. On est dans la forêt comme chez Disney, elle n'a plus rien à nous apprendre sinon qu'elle fut.

La première, qu'un maire audacieux a laissée construire, est aujourd'hui la cible d'un successeur pour qui la règle ne souffre aucune exception, surtout appliquée à un simple citoyen. Le second, que des élus un temps ont secrètement accompagné, a aujourd'hui besoin de beaucoup d'argent public et d'épargne populaire, besoin qu'on lui aménage les règles communes et lui offre toutes facilités, comme un dû.

La première est un rêve, le second un caprice.

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