La première demi-ligne de bus sur voies dédiées à Besançon

Les travaux d'une partie de la ligne 3 démarrent pour deux ans entre la gare Viotte et le quartier scientifique Témis. Le TCSP, transport en commun en site propre, doit entrer en service en 2017, mais il se sera vraiment efficace qu'en 2018 avec l'élargissement du pont de la Gibelotte. La portion Viotte-Rivotte restera dépendante des flux de circulation...

Le pont de la Gibelotte, montré par le doidt de Jean-Paul Michaud, devrait doubler de largeur. Ph D.B.

La communication est un métier et les élus qui durent sont passés maîtres dans l'art de présenter les projets sous leur meilleur angle, sans même un regard pour leurs faiblesses. Il en va ainsi du TCSP Viotte-Témis à Besançon. Le TCSP, c'est le transport en commun en site propre. Sur 4,1 km, entre la gare Viotte et le parc scientifique Témis, les bus seront prioritaires et déclencheront le feu vert à leur approche. Sur 2 km, ils circuleront sur de nouvelles voies qui leur seront dédiées. Les travaux commencent ces jours-ci.

 On en attend confort et régularité, on annonce que les 4,1 km se franchiront en 16 minutes, ce qui doit représenter un gain de 4 minutes, permettant d'atteindre la vitesse supersonique de 18 km/h, presque aussi bien qu'un vélo. D'ailleurs, on en profite pour réaliser des bandes et pistes cyclables le long des voies du bus. On espère convaincre des automobilistes de prendre le bus et l'on prévoit à leur intention un parking-relais à la Bouloie, le site universitaire traversé et accessible depuis la rocade de contournement.

Le génie des communicants

Jusque là, tout va bien. Cette ligne 3+ comme on l'appelle dans les documents officiels circulera donc entre Viotte et Témis et inversement. Mais la réalité n'est pas exactement celle décrite. La ligne 3+ est une invention de communicants. C'est la portion de l'actuelle ligne 3 après les travaux du TCSP. Car cette ligne 3 ne fait pas 4,1 km en allant de Témis à Viotte, mais 7,5 km en allant de Témis à Rivotte via la gare Viotte qu'il ne faut, au passage, plus appeler une gare mais un centre d'échange multimodal. Parce qu'on peut y prendre le train, emprunter un vélocité, sauter dans un autre bus, descendre en ville à pied par les Glacis et Battant si la circulation automobile bloque votre bus n°3...

Lundi 18 au palais des Sports

 

Car c'est là le génie des communicants. Pendant qu'ils braquent leur projecteur sur la ligne 3+ Témis-Viotte, ils laissent dans l'ombre la portion de ligne 3 Viotte-Rivotte où les temps de trajet sont totalement indexés sur la densité du trafic. Certes, les bus ont une voie dédiée sur 700 m entre la Cité des Arts et le pont de la République, mais ils subissent les aléas des flux de circulation rues de la République et Proudhon, puis avenue Foch, ce qui conditionne durement leur régularité et le respect des horaires. Et comme les bus ayant quitté le terminus de Rivotte sont sensés poursuivre jusqu'à Témis après être passés par Viotte, ils conserveront vraisemblablement le retard accumulé avant...

Une ligne 3 à 60% en site propre

Car en fait, il n'y aura pas de ligne 3+. Il y aura une ligne 3 dont 60% seront en site propre. C'est évidemment un progrès. Les 4 minutes gagnées le sont bel et bien entre Viotte et Témis, mais cette portion est tout autant sur-vendue par les communicants que sont devenus les élus. Car à quoi sert d'aller plus vite si on n'est pas à l'heure... Et reconnaissons aussi que ceux qui partiront de Témis pour prendre un train à Viotte devraient pouvoir se fier aux horaires de la ligne 3. S'ils ont rendez-vous au conservatoire ou à la Rodia, ils risquent de se faire un peu attendre...

L'ambiguïté de la communication du site de Ginko

 

Pourquoi ne pas avoir prévu d'améliorer la partie restant engluée au milieu des voitures ? La question a été posée par l'un des deux cents participants à la réunion publique sur le TCSP qui se tenait lundi 18 janvier au Palais des sports. « Pour des problèmes de coûts, c'est très compliqué d'aller de la gare au centre-ville », a répondu le président de l'agglo Jean-Louis Fousseret ». Patrick Noblet, le président de l'association des usagers des transports qui soutient le projet, a insisté : « Il faudra trouver, dans le cadre du plan de déplacements urbains, les moyens d'étudier l'ensemble de la ligne 3 car Témis-Rivotte n'est pas satisfaisant ». Fousseret a fini par en convenir sans s'étendre sur le sujet : « on reverra les flux pour améliorer à Rivotte ».

De 10 M€ en 2011 à 21,6 M€ aujourd'hui

Côté financement du TCSP, il n'est pas mécontent de lui : « une partie du projet est financé par les 10 millions d'économie sur la tram qui a été moins cher que prévu ». A une dame qui s'inquiète de l'impact sur les impôts locaux, il ne peut s'empêcher de répondre comme il aime à le faire : « c'est une bonne question qui montre que vous ne m'avez pas bien écouté : le TCSP n'est pas financé par le budget de la ville ou de l'agglo, mais par la taxe du Versement transport qui représente 1,8% de la masse salariale des entreprises de plus de 11 salariés ».

Jean-Louis Fousseret, les adjoints Michel Loyat et Marie Zehaf et l'ingénieur en charge du projet, Pascal Gudefin.

 

L'addition se monde à 21,6 millions d'euros, dont 5 M€ de subventions de l'Etat, et peut-être plus si la région, sollicitée, ouvre sa bourse. C'est quand même plus du double des 10 M€ initialement estimés en 2011 quand ont commencé les premières études. C'est davantage que les 15 M€ figurant dans la délibération votée par la CAGB le 12 février 2015. Quelque temps plus tard, après l'enquête publique qui s'est tenue du 8 juin au 17 juillet, le commissaire enquêteur Gabriel Laithier avait recommandé qu'on ajoutât 2,5 M€ aux fins d'élargir le pont de la Gibelotte, option qui a finalement été retenue... mais pas encore présentée au vote de la CAGB. Elle est cependant programmée puisqu'un créneau a été discuté avec la SNCF qui doit anticiper longtemps à l'avance l'arrêt de circulation des trains, même pendant un ou quelques jours en 2018.

« On n'est pas têtu, ni des gens qui savons tout... »

Tenue juste avant le démarrage des travaux qui vont générer un an et demi de gêne pour les riverains, de coupures et de déviations d'itinéraires, y compris pour les bus, la réunion du 18 janvier était aussi destinée à faire passer un message à l'opposé de la posture de communicants : « on a l'expérience du tram, il y avait des choses qu'on n'avait pas vues et sur lesquelles on est revenu. On n'est pas têtu, ni des gens qui savons tout... »

Bref, à ceux qui s'inquiètent de ne pouvoir sortir leur voiture de chez eux, qui craignent de changer d'habitude, ou redoutent les éclats de voix des voyageurs attendant un bus sous leurs fenêtres à minuit, le vice-président de l'agglo au transport, Jean-Paul Michaud, répond : « notre principal souci pendant les travaux, c'est la communication ». La vraie, celle où l'on se parle, par exemple en appelant le médiateur dédié, José Moreira, qui a déjà officié sur le chantier du tram...

Le planning prévisionnel des travaux

 

Le tracé de la ligne 3 : en trait plein, le TCSP, en pointillés Rivotte-Viotte...

 

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