Clair Jura : procédure de sanction, plainte et nouvelle grève

La situation s'est tendue à l'Ehpad de la Croix rouge de Montain. Le médecin coordonnateur a été licencié, la directrice a porté plainte pour harcèlement, une partie des salariés a observé une grève d'une journée samedi 28 mai. Le diagnostic proposé par le cabinet FACT va-t-il être accepté ?

cl-j

La situation reste tendue à l'EHPAD Clair-Jura de Montain où une partie du personnel a observé samedi 28 mai une journée de grève. Un débrayage d'une heure avait été suivi mercredi 25 mai en soutien au médecin coordonnateur des soins, le docteur Christian Mouhat, convoqué au siège national de la Croix rouge française pour un entretien préalable à sanction pouvant aller jusqu'au licenciement.

Il est notamment reproché au médecin de ne pas avoir rédigé de rapport d'activité l'an dernier et de ne pas s'être rendu à trois comités de direction. « J'ai répondu que l'Agence régionale de santé préconise pour un établissement de cette taille un temps de travail de 0,5 équivalent temps plein, or je n'en ai que 0,2, ce qui explique que j'ai rédigé en retard l'avant dernier rapport d'activité et que je n'ai encore fait le dernier. Quant aux absences en comité de direction, l'une s'explique par un congé de maladie, les autres parce que le lieu n'est pas précisé et change de manière impromptue », témoigne Christian Mouhat.

Christian Mouhat, entre une salariée et le secrétaire départemental de la CGT action sociale.

Dans le même temps, la directrice a porté plainte pour harcèlement et une enquête préliminaire de la gendarmerie a été engagée. Tous les salariés ont été ou vont être auditionnés.

Le mouvement de samedi a permis la rencontre d'une dizaine de familles, d'un élu municipal de Montain et de salariés au moment des pauses. Il intervient six semaines après un droit d'alerte déclenché par les délégués du personnel, et moins d'un mois après que l'antenne régionale de l'Agence pour l'amélioration des conditions de travail, FACTFranche-Comté Amélioration des Conditions de travail, a restitué le 3 mai la synthèse de ses consultations et formulé des propositions pour sortir des difficultés. FACT constatait un « malaise » selon les dires d'une « très grande majorité » des salariés, tout en soulignant les divergences quant à l'origine de ce malaise.

« Faiblesse de l’anticipation » et « suivi de projet aléatoire »

« Pour la direction », souligne le rapport, « ces difficultés d’ambiance proviendraient de quelques personnes, en lien avec une histoire et des changements intervenus depuis son arrivée ». Ces personnes contesteraient « les nouvelles méthodes » et auraient des « difficultés à s’adapter à de nouveaux modes de fonctionnements ». 

Le rapport indique que « plusieurs salariés et les représentants du personnel » mettent en cause des « dysfonctionnements » relatifs au « management quotidien et à la régulation du travail : faiblesse de l’anticipation, de l’appui technique, travail non collégial, décisions unilatérales, passage d’informations, suivi de projet aléatoire ». Ces salariés se plaignent aussi d'un « manque de reconnaissance des compétences, des spécialités, des coopérations existantes... et d'une insuffisance d’information et de communication sur les projets de l’établissement, les évènements, les aléas ».

FACT note également une « divergence sur les faits et leur enchainement ayant conduits à la situation actuelle (...) se caractérisant par de nombreux arrêts maladie en lien avec le travail ainsi qu’un conflit ouvert donnant lieu à des mouvements sociaux ». Pour l'agence, tout le monde, direction comme représentants du personnels, « déplore cette situation ». FACT estime dans ces conditions que l’intervention d’un tiers lui paraît « indispensable pour sortir de cette situation conflictuelle et comportant des risques psychosociaux ».

Trois hypothèses à « confirmer ou invalider »

FACT, qui a une longue expérience des ambiances de travail plombées, prévient que « les difficultés relationnelles apparaissent souvent comme des causes de dysfonctionnement alors que, dans la plupart des cas, elles n’en sont que leur conséquence. Les propos entendus de la part de la majorité des catégories d’acteurs sembleraient aller dans ce sens ». L'agence régionale formule ensuite des recommandations qui consistent essentiellement à suggérer qu'un tiers fasse un diagnostic après que l'on se soit posé une série de questions. Il ne s'agit pas seulement de s'interroger sur les relations interpersonnelles, mais aussi sur l'organisation, la stratégie, l'existence ou non de visions différentes.

Cette étape est importante, car les actions varient selon les réponses. FACT propose de considérer trois hypothèses qu'il s'agit de « confirmer ou invalider ». Selon la première, les difficultés seraient dues à l'opposition entre vision soins et vision administrative, selon la seconde elles viendraient des carences du management. La troisième externaliserait en partie les responsabilités en mettant en avant « les contraintes financières et les réductions d'effectifs ».

Si cette dernière hypothèse venait à être privilégiée, c'est tout l'édifice du financement de la dépendance des personnes âgées qui serait mis en cause : l'objectif politique affiché il y a dix ans était d'avoir un ratio d'un salarié pour un résident. A Montain, on est à 0,6 temps-plein par résident, dans la moyenne française.

La directrice de l'Ehpad étant absente pour plusieurs jours, Factuel a sollicité le siège national de la Croix rouge. Ses réponses et précisions complèteront cet article quand elles nous parviendront.

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