Citoyens et Insoumis pour « une règle verte » à Besançon

Claire Arnoux a tenu dimanche son meeting avec la liste Besançon verte et solidaire, qu’elle présente comme « citoyenne et soutenue par la France Insoumise ». L’opposition au projet des Vaîtes est un de leur argument majeur face à un « maire bâtisseur », et « épinglé à de multiples reprises pour ces liens avec la promotion immobilière. » Cela les démarque de la liste des écologistes et de partis de gauche menée par Anne Vignot, encore au conseil municipal. Les Insoumis dénoncent le bilan d’un maire « autoritaire » et entendent instaurer par exemple « l’état d’urgence écologique », une mutuelle de santé municipale et un RIC local.

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En cette journée pour les droits des femmes, Claire Arnoux tenait meeting au Kursaal au nom de la liste Besançon verte et solidaire, qu’elle définit comme « citoyenne et soutenue par la France Insoumise ». C’est sa « camarade », Séverine Vézies qui lance la soirée, intitulée « Redonnons le pouvoir aux Bisontin.es ! » Pour favoriser cette réappropriation citoyenne de la vie politique et répondre à « l’urgence démocratique », la numéro 3 sur la liste propose trois mesures à appliquer à l’échelle communale. « Ce sera la mise en place d’une assemblée constituante, qui permet de redéfinir entre nous les règles du jeu démocratique. Elle aura à déterminer les modalités de mise en œuvre du RIC local. L’idée c’est de permettre aux citoyens de proposer une disposition à la discussion. On veut aussi des élus exemplaires, on propose le référendum révocatoire à mi-mandat pour les élus qui ne respecteraient pas leurs engagements. » Voilà l’occasion d’une belle pique. « Nous à Besançon on sait de quoi on parle, parce que personne n’a élu un maire En marche, et pourtant on a un maire En marche. »

Maxime Renahy, Bisontin, lanceur d’alerte et auteur de l’ouvrage « Là où est l’argent », vient apporter son soutien, et son crédit, à Claire Arnoux. « Pour moi il est important de mettre en pratique ses idées, et c’est le cas des personnes qui ont rejoint Besançon verte et solidaire », dit-il en évoquant les actions menées contre le projet des Vaîtes, l’arrêté anti-mendicité ou de l’opposition au doublement de la RN 57. Il signale ses propres combats contre la fraude fiscale après avoir espionné la finance pour le compte de la DGSE. Ses actions en justice, menées avec son frère Alexandre et leur association Lanceur d’alerte, ont aussi contraint de grosses multinationales à dévoiler leurs comptes. « Même s’ils sont frauduleux, on a suffisamment de pistes pour obtenir ou tenter d’obtenir la participation due aux salariés ou le juste prix du lait ou de la viande pour les producteurs qui se suicident en masse ». Il citera une prochaine enquête les 2 milliards d’euros de Lactalis qui part au Luxembourg et sur l’argent des Ehpad qui partent dans d’autres paradis fiscaux.

« Le but de cette campagne n’est pas seulement de gagner la ville ou de créer une opposition, mais de créer un réseau de résistance locale »

« Toute la corruption que je combats dans le cadre de mes enquêtes n’existerait pas si les citoyens n’étaient pas éloignés de la chose publique », poursuit-il. « Or Besançon verte et solidaire propose aux citoyens un contrôle des élus qui me parait tout à fait remarquable. Notamment avec la communication du nom et du vote des élus au Conseil municipal, la possibilité d’informer, consulter et associer les citoyens sur les grands projets, notamment d’urbanisme, de garantir un contrôle citoyen de gestion des services publics locaux à tous les associations et citoyens qui le souhaitent, etc. »

Pour lui, cette campagne ne devrait d’ailleurs pas se cantonner aux élections. « L’important c’est de partager et de défendre nos valeurs sur le terrain. Ces actions passent par le fait d’être organisés et d’avoir une technicité dans un domaine, mais rien ne peut se faire sans l’amitié. Le but de cette campagne n’est pas seulement de gagner la ville ou de créer une opposition, mais de créer un réseau de résistance locale qui fait des propositions de vie alternative en société en prenant en compte l’urgence climatique et le désir de justice sociale et fiscale. »

Une mutuelle de santé municipale

Marc Paulin, quatrième sur la liste, infirmier au CHU de Besançon, engagé dans le mouvement des blouses blanches et des Gilets jaunes évoque lui le droit à la santé. « On mettra en place une mutuelle municipale solidaire de santé basée sur le système de la sécurité sociale. Chacun paie selon ses moyens et reçoit quand il en a besoin. On va faire fi de l’âge et on gommera les antécédents de santé. Cette mutuelle sera associée à un centre de santé municipale installé à Planoise dans lequel on utilisera le tiers payant. »

Il partage sa présentation orale avec Jérôme Scherer, jeune militant écologiste engagé sur la question des déchets et deuxième sur la liste. Il fait aussi part de son souhait de favoriser le jardinage. « C’est un acte politique fort, un signal de résistance et d’indépendance face à la grande distribution et ses dérives. On veut préserver les jardins populaires, notamment aux Vaites et dans d’autres espaces, comme à Planoise ». Il y aura beaucoup de mentions des Vaîtes ce soir, car c’est là l’un de leurs principaux arguments dans cette campagne municipale de Besançon. Eux souhaitent abandonner le projet, ce qui n’est notamment pas le cas de la liste de l’union des écologistes et de partis de gauche menée par Anne Vignot.

Celle qui mène la bataille, Claire Arnoux, revient sur la triple urgence sociale, économique et démocratique qui a conduit à l’élaboration de sa liste pour les municipales à Besançon, où « 20 % de la population vit en dessous du seuil de pauvreté, que 80 % des leviers pour lutter contre le réchauffement climatique sont à l’échelle locale et où on a été gâtés par un maire autoritaire, qui a gouverné tout seul, contre ses habitants, qui est passé à En marche alors que personne n’a voté pour un maire En marche. »

« On réorganise toute la politique municipale en fonction de ce principe de la règle verte »

Elle annonce avec force sa première mesure : la déclaration de l’état d’urgence écologique et la mise en place de la règle verte. « C’est qu’on part du principe qu’on ne prend pas plus à la planète que c’est qu’elle est capable de reconstituer. On réorganise toute la politique municipale en fonction de ce principe. On réexamine l’ensemble des dossiers à l’aune de cette urgence. On va reprendre l’ensemble des décisions prises par la municipalité précédente, et on va revoir si ça correspond à cette règle verte et si c’est bon pour la planète. Un certain nombre de projets ne vont pas passer le cap. Et je vais commencer par un projet en particulier, ce n’est pas trop une surprise, c’est les Vaîtes », dit celle qui est aussi la présidente de l’association Les jardins des Vaîtes, qui avait obtenu la suspension des travaux par la justice.

« Quand des gens font des plans d’urbanisme du haut de leurs bureaux, ils ne regardent pas où ils font leur truc, s’il y a des gens, que font ces gens sur place, comment est la terre », poursuit-elle. « Aux Vaîtes c’est une terre maraichère de très grande qualité, sur une terre humide. On considère qu’à ces endroits-là, on ne commence pas à bétonner à tout va. D’autant plus que notre maire, Jean-Louis Fousseret, a déjà été épinglé à de multiples reprises pour ces liens avec la promotion immobilière. C’est un maire bâtisseur. » Elle donne ensuite des chiffres de la vacance immobilière, passée de 6 à 10 % en moins de 10 ans dans la ville. « C’est énorme. Cela veut dire que l’on a construit des tonnes de logements qui, en fait, sont vides. »

Ce point posé, elle estime que le dossier des VaÎtes est aussi un « révélateur de l’endroit politique d’où on parle ». Elle cible alors Nicolas Bodin du PS, adjoint à l’urbanisme dans l’actuelle municipalité et numéro 2 sur la liste d’Anne Vignot. Il avait déclaré après l’avis défavorable du CNPN sur le sujet qu’il n’y avait que 20 m² d’enjeu environnementaux. « Ce sont des personnes qui n’y connaissent rien et qui continuent de défendre ces projets de bétonnage. Et cette mairie, Nicolas Bodin en particulier, a mis l’association des Jardins des Vaîtes au Conseil d’État ».

« Nous on dit que les engagements on ne les prendra pas devant les promoteurs immobiliers, mais devant les citoyens »

Elle rappelle que la mairie a aussi saisi le Conseil d’État sur les cantines, qui n’ont pas assez de place pour accueillir tous les enfants. « La mairie a été condamnée et elle fait appel. Voilà le respect qu’a la mairie vis-à-vis de ses citoyens et ses habitants. Voilà d’où on part et pourquoi à Besançon verte et solidaire, on a monté cette liste. On a des candidats qui nous disent ah ben non, on va continuer les Vaîtes parce qu’on a des engagements avec les promoteurs. Nous on dit que les engagements on ne les prendra pas devant les promoteurs immobiliers, mais devant les citoyens ».

Elle redit son opposition au doublement de la RN 57, un chantier à 30 ou 45 millions d’euros. « Avec 30 à 45 millions d’euros, on ne va pas doubler une route nationale, par contre on peut lancer notre programme de végétalisation de la ville. Et ce n’est pas mettre des petites fleurs, c’est une nécessité pour avoir une ville vivable avec les canicules qui s’annoncent. On peut avoir 10 °C de différence entre des endroits tout végétalisé ou tout bétonné. » Elle compte par exemple mettre en place des « rues aux enfants » devant toutes les écoles qui seraient fermées à la circulation motorisée et revégétalisées. Une partie de la somme servira aussi à l’aménagement de voies cyclables et d’un réseau de bus en voie propre. Avec en toile de fond une autre mesure forte de la liste : la gratuité des transports en commun.

« Quand on parle de gratuité, il y en a qui deviennent fous, qui ne se maitrisent plus », tonne Claire Arnoux, qui mentionne cette fois Éric Alauzet. « Il a une plaquette bien verte, et se rend bien compte qu’il y a des problèmes de pollution et que c’est lié aux voitures. Comme solution, il propose la gratuité des transports en commun lors des pics de pollution. Peut-être que la prochaine fois, ils se rendront compte du lien entre pollution atmosphérique et transport tout au long de l’année. » Elle souhaite aussi remettre en cause la délégation de service public sur le transport qui lie Ginko et Keolis jusqu’en 2024, et qui pourrait rapporter selon elle à peu près 12 millions d’euros. Soit, dit-elle, le montant de la billetterie des transports en commun à Besançon, donc de quoi financer la gratuité des transports publics…

Un attachement à la sûreté et un « écoquartier populaire pour Planoise »

Concernant les problèmes de sécurité et de violences à Planoise, elle rappelle son attachement au principe de la sûreté. « C’est un droit constitutionnel, inscrit dans la Déclaration des droits de l’Homme depuis 1789. Auparavant, elle était réservée aux bourgeois, aux aristocrates et on considère que la sureté et la sécurité c’est pour tout le monde, y compris dans les quartiers populaires. » Elle entend « remettre de l’humain » à Planoise, notamment en réintroduisant les correspondants de nuit supprimés par la municipalité, remettre des concierges et réclamer à l’État d’assumer son rôle en matière de lutte contre la drogue. Elle critique aussi la vieille rengaine de la tolérance zéro prônée par la droite, « mais qui ne font rien ».

Sur le plan local de renouvellement urbain qui sera mis en œuvre à Planoise, elle regrette qu’il ait été voté « sans aucune consultation des habitants » et prévoit de l’attaquer en justice pour cette raison. Il est prévu de détruire 1200 logements et de n’en reconstruire qu’un tiers. « Mais ils veulent en construire 34 % en périphérie, sans les accès aux services publics et aux infrastructures de transport. » Lors de ces séances de porte à porte, elle affirme que les gens n’étaient pas au courant des projets de renouvellement urbain dans leur quartier de Planoise, où elle souhaiterait bâtir « un écoquartier populaire. »

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