Confusion politique

Les organisateurs de la Primaire populaire tentent désespérément de sauver la candidature mal engagée de Christiane Taubira qui patine. Ce faisant, tout en désignant Emmanuel Macron comme un « adversaire », ils ont une formule accréditant l'idée que le président sortant pourrait représenter un vote utile à gauche ! Il fallait oser. Serait-ce si douloureux, en cas d'empêchement de Taubira, d'appeler à voter pour des candidats qu'ils ont fait participer contre leur gré à leur primaire : Mélenchon et Jadot, voire Hidalgo ?

Mais quelle mouche a piqué les organisateurs de la Primaire populaire ? Soit ils ont un sens politique proche du néant, soit ils participent à une opération consistant à refuser de voir que la candidature de Jean-Luc Mélenchon est quasiment la seule à gauche à avoir une chance, apparemment faible, de figurer au second tour. Dans un communiqué et un message aux participants de la Primaire populaire, ils tentent de sauver la candidature de Christiane Taubira. Bien qu'arrivée sans surprise en tête d'une opération faite pour elle, elle peine tant à imprimer dans la campagne qu'elle a été lâchée par son ancien parti, le PRG, et n'avait le 22 février que 104 parrainages.

Pire, les organisateurs de la Primaire populaire laissent entendre qu'ils font leur une petite idée bien surprenante qui semble titiller quelques électeurs centristes confessant timidement pencher un peu à gauche. Celle-ci vise à suggérer que le vrai vote utile à gauche serait, non pas Mélenchon comme l'a souligné Ségolène Royal, mais Macron ! On rêve, on se pince. Macron de gauche ? Peut-être peut on lui accorder un relatif libéralisme culturel et sociétal que l'on retrouve généralement à gauche, mais celle-ci n'en a pas le monopole. Pour le reste, sa politique économique et sociale ne favorisant en rien les classes populaires, elle est carrément à droite. Son penchant pour la verticalité du pouvoir n'a pas grand chose de « partageux ». Son usage de la police, ses orientations en matière d'éducation, son soutien au nucléaire, ses reculades sur les pesticides sont soit bien à droite, soit vraiment pas écolo.

Donc, avec cette petite phrase « ne laissez pas l’abstention ou le vote utile en faveur d’E. Macron devenir la première force de la gauche et de l’écologie en 2022 » balancée aux médias et aux votants de la Primaire populaire, les organisateurs de cette dernière laissent entendre qu'ils partagent sinon cette idée chère à Manuel Valls, du moins sa fatalité. Et que faute de Taubira leurs « électeurs » pourraient être tentés par Macron. Ils ont ont beau écrire quelques lignes plus loin dans le communiqué, mais pas dans le message aux participants à la primaire, que « nos véritables adversaires [sont] Macron, la droite et l’extrême droite », le mal est fait.

On comprend bien leur déception au regard de la situation de Christiane Taubira. Qu'ils cherchent désespérément à la tirer d'affaire est une chose, mais ils pourraient aussi envisager son échec. Et dans ce cas se préparer à appeler dès le 7 mars, quand le Conseil constitutionnel publiera la liste des candidats retenus, à voter pour les candidats qu'ils ont fait participer contre leur gré à leur primaire : Mélenchon, Jadot, Hidalgo. Ce faisant, ils iraient au bout de leur démarche et retrouveraient un minimum de cohérence, voire de décence. Faute de quoi, ils passeront pour ceux qui auront lancé malgré eux des dizaines de milliers de sympathisants de gauche et de l'écologie dans une très contestable et grotesque opération « Taubira sinon rien », voire « Taubira sinon Macron ». 


PS du 15 mars : en choisissant de soutenir finalement Jean-Luc Mélenchon sans chercher, faute de moyens, à consulter les participants à leur consultation de fin janvier, les dirigeants de la Primaire populaire ont achevé de discréditer leur démarche. Certes, Mélenchon paraît - dans les sondages - le mieux placé à gauche pour se qualifier pour le second tour, mais il n'était arrivé que troisième fin janvier... Et de toute façon, comme les autres suivants de Taubira, il avait par avance refusé de postuler à l'opération... Tout ça pour ça ?

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