Chamole, laboratoire jurassien d’énergie renouvelable citoyenne

Alors que la centrale de Fessenheim a définitivement fermé ce mois de juillet, la question de l’énergie reste un sujet clé. Certains aimeraient la voir gérée plutôt localement et par des citoyens. C’est le cas d’une éolienne de 193 mètres de haut qui tourne à Chamole depuis 2018, chapeauté par la Société d’Économie Mixte Énergies Renouvelables Citoyenne (SEM) et les 41 clubs d’investisseurs de Jurascic, composés de 650 particuliers.

 

000669

Cela fait bientôt trois ans que le parc éolien de Chamole est sorti de terre, et que l’une des six éoliennes appartient aux citoyens. Et cette année, ses premiers retours financiers tombent pour les 41 clubs d’investisseurs qui l’ont financé. Stéphane Perrard, président du club L’Air de rien, n’avait pas investi dans cette éolienne citoyenne dans un esprit de spéculation. Mais c’est tout de même une bonne nouvelle pour lui. « Ça montre que ça a marché et c’est un bon signe pour continuer à aller dans ce sens. »

Un club d’investisseur, c’est cinq à vingt personnes qui se sont regroupées pour permettre la réalisation de ce projet[GC1] . Les 41 clubs représentent plus de 650 personnes et sont à 90 % installés dans la communauté de commune, et cinq sont même implantés à Chamole. C’est le cas de l’Air de rien, qui comme les autres clubs, n’a aujourd’hui plus guère d’activité. Cela est normal, car comme le commente Stéphane Perrard : « C’est différent d’un autre projet en collectif où on se retrouverait tous les week-ends au jardin partagé. On ne construit pas une éolienne tous les samedis ».

Ces clubs ont cependant une activité de fond qui se dégage : la communication auprès d’un nouveau public. Construire des parcs éoliens comme celui-ci peut avoir une image de mur énorme et infranchissable pour les non-initiés. Ces clubs montrent donc qu’une gestion par les citoyens est possible. Stéphane Perrard s’en aperçoit avec les demandes régulières de personnes qui souhaitent intégrer le projet ou la communauté d’investisseurs.

Une bonne production ces deux dernières années

Cette éolienne est gérée par cinq co-actionnaires, dont la Société d’Économie Mixte Énergies Renouvelables Citoyenne (SEM)[GC2] . Cette dernière est composée de Jurascic, qui regroupe tous les clubs d’investisseurs[GC3] , du SIDEC (le Syndicat mixte d’énergie, d’équipement et de e-communication) du Jura, du SYDED (Syndicat Mixte d’Énergies du Doubs), de la région Bourgogne Franche-Comté, du cabinet d’études Vent du Grimont et de l’ADEME (Agence de l’environnement et de la maitrise de l’énergie). Les autres actionnaires, hors de la SEM, sont Jurascic (qui est aussi un actionnaire direct de l’éolienne), la commune de Chamole, ERCISOL (Energies Renouvelables Citoyennes et Solidaires S.A.S), une société partagée pour investir dans les énergies, et Energie Partagée, un mouvement pour accompagner et financer des projets citoyens de production d’énergie renouvelable.

Cette part d’investissement citoyen, le maire de Chamole à l’initiative du parc, Jean-Louis Dufour, l’a voulu dès le début du projet. Auprès de Factuel Info en 2013, il a demandé des investissements locaux et citoyens pour « que la plus-value reste sur le territoire et pour éviter que les dividendes s’en aillent ». La SEM s’occupe de l’administratif autour de l’éolienne, comme la facture envoyée à ERDF chaque mois par exemple. ERDF doit racheter l’électricité à 8,4 centimes/kWh pendant dix ans, puis le tarif évolue de 3 à 8,4 centimes pendant cinq ans.

Du haut de ses 193 mètres, l’éolienne semble avoir une bonne cadence de production, mais Gérard Magnin, président de Jurascic, commente. « On n’a pas assez de recul, le calcul de production a été fait sur 20 ans. Là, en juste trois ans, c’est trop court et les chiffres ne sont pas très parlants ». Pour les trois dernières années, la tendance est plutôt à une production plus importante que prévu. La première année, le niveau de production normal n’a pas été atteint, car ce fut une année de tests et de réglages. L’année dernière en revanche, il a été produit plus d’électricité que prévu et la trajectoire de production de cette année semble tomber aussi sur un dépassement des seuils anticipés. Sur une année, l’éolienne doit produire aux alentours de 7 GW[GC4] , soit l’énergie d’un peu plus de 4600 foyers.

D’autres projets pour Jurascic

Jurascic, ce n’est pas seulement un parc éolien sur les hauteurs de Poligny, mais un regroupement d’actionnaires prêt à s’investir dans les différents projets énergétiques. La société coopérative possède aussi une centrale solaire de 108,3 kW à Courlans, au-dessus d’un manège au centre équestre « La Jument Verte ». Un dossier sera déposé en automne auprès de la commission de régulation de l’énergie pour couvrir le toit du centre technique et de maintenance de Dole. Ensuite, Gérard Magnin voit « une dizaine de projets similaires au centre technique de Dole dans les deux ou trois prochaines années », avec une taille de 300 kW [soit trois fois la puissance de la centrale de Courlans]. Plusieurs projets de centrales solaires au sol dans le Jura et en Côte d’Or sont aussi en cours de préparation, et les dossiers sont en train d’être étudiés.

Côté éolien, plusieurs projets sont en cours de négociation. Cela dit, le président de Jurascic ne préfère pas en dire davantage, car il n’y pas de garantie que ces projets arrivent à terme ou que Jurascic soit retenu pour y participer, et une touche de confidentialité enveloppe le tout. Pour Gérard Magnin, aussi le fondateur de Energies City, tous ces projets, réalisés ou en cours, sont aussi et surtout un levier d’éducation populaire par le terrain une très bonne façon de former les futures générations aux enjeux environnementaux.

 

Newsletter

Lisez la Lettre de Factuel

ABONNEZ-VOUS À LA NEWSLETTER !