Certains détruisent, d’autres construisent…

La commune de Port-Lesney, dans le Jura, a accueilli le Camp-Climat organisé par L'association ANV Cop21 et Alternatiba. L'occasion pour Factuel. et grâce à une rencontre avec Marion, une jeune femme engagée, d'inscrire cette initiative dans un débat d'idées.

image_de_fin_2

Sale temps pour la planète, sale temps pour les humains

Les philosophes, écrivait Marx, n’ont fait qu’interpréter diversement le monde : il s’agit maintenant de le transformer.

Dérèglement climatique, agressions diverses de la terre et de la Terre, notre patrimoine commun, catastrophes écologiques, casse sociale, inégalités de plus en plus criantes, terrorisme, guerres, virus assassin… Sale temps pour la planète, sale temps pour les humains, sale temps pour l’espèce animale… Voilà ce que ça donne quand le Capitalisme adossé au libéralisme, à la mondialisation sauvage de ses intérêts, est en action.

En face de cette force dévastatrice qui avance avec la brutalité d’un bulldozer fou, des femmes, des hommes, des citoyennes, des citoyens, des militantes, des militants se dressent devant la machine à broyer. Des ONG, des syndicats, des associations, des gilets jaunes… des penseurs, des philosophes aussi.

Convergence des luttes ? Convergences des pensées ?

Pas facile de s’y retrouver. Alors, il est parfois utile d’aller écouter de plus près ce que disent certaines et certains, et de regarder de plus près ce que font certaines et certains.

Photo Antoine Mermet

Factuel.info a rencontré Marion, une jeune femme engagée. Qui participe au fait de faire, pas uniquement de dire. Faire du bien à la planète, donc aux humains et aux animaux qui la peuplent. Sans oublier le monde végétal. Elle participe à la construction des rouages d’un cercle vertueux. Certaines rencontres ouvrent, non pas la boite de Pandore et tous ses maux, mais ouvrent un chemin d’espoir, aèrent l’esprit, appuient sur le bouton de mise en marche de la pensée, de la réflexion.

Marion a participé au Camp-Climat Doubs-Jura, organisé à Port-Lesney, du 20 au 23 août. Camp organisé par Alternatiba Besançon, et l’association Action non violente ANV Cop 21.

Photo Antoine Mermet

Si l’ambiance de ce camp d’été et régional a été festive, chaleureuse, elle a surtout été militante. Montrant que le militantisme est une forme du vivre autrement les unes avec les autres, les uns avec les autres. Par exemple, le bénévolat des participants a permis de faire face aux questions d’intendance, où chacune et chacun donnait une heure de sa journée pour aider à la préparation des repas, à la logistique ou au pôle enfant…

Lors de ce camp de réflexion, et d’actions même sous des formes minimes, il s’agissait de centraliser des informations sur l’état du monde, en ce qui concerne le dérèglement climatique, la gabegie des biens de consommations, les pollutions diverses des grands groupes… une liste interminable de méfaits, qui, si nous laissons faire nous mènent droit dans le mur, avec un risque d’écrasement de ce qui fait la beauté de notre humanité.

Le Comté en danger !

Deux exemples très concrets et très locaux. Si le réchauffement climatique perdure et s’amplifie, cela aura des répercussions (pour faire court) sur l’élevage des vaches à lait, donc… sur la fabrication du Comté. Quant à la pollution de la Loue, elle inquiète depuis bien longtemps. On peut lire ou relire avec intérêt ce qu’en écrit un romancier et fin connaisseur du problème : Philippe Koeberlé, dans son polar Autopsie d’une truite. Il n’y a pas une façon unique d’éveiller les consciences, le polar en est une.

Revenons au Camp Climat de cet été.

Apprendre à résister de façon non violente

S’informer, mais aussi apprendre à résister. De façon non violente. Voilà qui est intéressant, au regard des violences commises par les Black blocs en vue, parait-il, de mettre à bas le capitalisme.

Résister et agir de façon non violente, résister et agir de façon violente… qu’est-ce qui est le plus efficace, à défaut d’être le plus moral, ou éthique ?

Le documentaire, Merci patron, de François Ruffin, est intéressant à plus d’un titre dans sa façon qu’il a de montrer comment faire face à une injustice. Une façon de lutter par la ruse… qui implique de bien connaitre les faiblesses de l’adversaire.

Alerter. Mobiliser. Déranger. Dénoncer. Et agir.

Par exemple, le pont au-dessus de la Loue a été partiellement bloqué et symboliquement occupé afin d’alerter sur la pollution de la Loue provoquée par notre modèle économique et l’agriculture intensive.

Photo Antoine Mermet

De beaux slogans inscrits sur des banderoles fabriquées par les participant-e-s : Quand je serai grand, je voudrais être vivant, ou encore Le temps nous est Comté.

Alerter. Mobiliser. Déranger. Dénoncer. Agir. Convaincre les pouvoirs publics

Et s’adresser aux pouvoirs publics, aux décideurs… afin de les convaincre de la nécessité d’agir. Après tout, derrière les pouvoirs publics, derrière les décideurs, on trouve des femmes et des hommes concernés par leur avenir dans ce monde, par celui de leurs enfants, de leurs petits-enfants.

Puisqu’il est question des pouvoirs publics, Marion insiste sur le fait que le Maire de Port-Lesney a apporté son soutien à l’organisation de ce Camp-Climat. Soutenir cet évènement, c’est reconnaître la nécessité de changer le système actuel : pour un élu, c’est une position assez rare qui mérite d’être soulignée.

D’habitude, le Camp-Climat est national. Cette année, pour cause de Covid et peut-être aussi dans le but de vitaliser la réflexion régionale, il s’est déroulé dans le Jura. 18 autres Camp-Climat ont eu lieu ou se tiendront dans d’autres régions. Une façon d’essaimer les idées de façon horizontale, et non pas verticale.

Le but de ce camp, outre le fait de donner des éléments d’information, de réflexion et d’action aux militants, mais aussi aux personnes curieuses de connaître ANV Cop 21 et Alternatiba, était également d’interroger le système qui organise les sociétés et le monde, de savoir comment et pourquoi organiser une opposition à ce système, d’alerter l’opinion publique. Cela passe par des actions de communication et d’explication des actions.

Dans l’esprit, il n’est pas question de développer l’idée d’une écologie culpabilisante

Mais on peut conduire les citoyennes et les citoyens à s’interroger sur l’inondation des villes par des panneaux publicitaires. Lesquels panneaux n’ayant pour but que de pousser à la consommation de produits qui ne sont pas nécessaires à notre équilibre de vie, pire même, qui sont produits de façon indigne dans des pays où les droits sociaux, ceux des travailleurs sont quasi inexistants. Sans parler des images sexistes qui ravalent les femmes au rang d’objet sexuel… Alors, démonter, sans casse, certains panneaux, sonne une alerte bienvenue.

On peut s’interroger sur les commandes faites grâce à l’Internet, commandes qui vont à l’encontre de la vie, de la survie, de certains commerces de proximité.

Manger bio ? C’est peut-être plus cher, c’est peut-être le moment de s’interroger sur le contenu du panier de courses alimentaires, de supprimer les produits gorgés d’huile de palme, par exemple, de favoriser l'agréable au goût et à la santé, plutôt que les produits remplis de sucre et de mauvaise graisse…

Quand est-il légitime de s'opposer à certaines lois ou à l'État ?

Photo Antoine Mermet

L’industrie alimentaire à les moyens, et la volonté (profits obligent) de nous rendre addicts à ce qui nous est néfaste. Il a donc été aussi question de désobéissance civile. Sujet délicat. À partir de quoi, et quand, décide-t-on qu’il est légitime de s’opposer à des lois, à un État ? Le débat est ouvert...

Qui étaient les participants au Camp-Climat ?

L'analyse n'est pas exhaustive. Marion note que la participation à ce camp a rassemblé une centaine de personnes, sur les quatre jours. Elle note une bonne parité hommes-femmes, âgés de 20 à 35 ans en majorité. Il y avait également des personnes plus âgées, et des enfants.

Ce Camp-Climat, cette rencontre avec Marion qui en était une des intervenant-e-s, sont des portes ouvertes vers l’espoir qu’en face de ceux qui détruisent, on peut construire, reconstruire.

Le secours des philosophes, après ou avec celui des scientifiques

Si ce texte commence avec une citation de Marx, il peut se terminer par une citation d’un philosophe et historien des civilisations, Thibault Isabel, (dans la revue front Populaire dont Factuel se fera l’écho). Et par une citation du philosophe Dominique Bourg, dans son opus : Une nouvelle Terre

Le sursaut de la citoyenneté passera par le rétablissement d’une authentique capacité d’agir, permettant à chacun d’entre nous de ne plus être seulement une particule élémentaire perdue au milieu d’un néant universel, mais un citoyen en mesure de lutter avec les autres, auprès d’eux, pour transformer l’environnement au sein duquel nous évoluons. […] Thibault Isabel

Force est de l'admettre, l'idéologie du progrès selon laquelle l'avancée des sciences et des techniques, via l'industrie, ne pouvait que déboucher sur une amélioration générale de la condition humaine, a vécu. Les dégâts, qui s'annoncent en termes environnementaux à moyen terme sont sans précédents dans l'histoire des relations de l'homme à la nature. Sur un plan plus immédiat, géopolitique, l'heure est plutôt au sauve-qui- peut pour épargner nos grandes valeurs, à savoir nos libertés, nos institutions démocratiques, les droits humains, etc. Et encore, pour la part des populations occidentales qui y reste attachée. Dominique Bourg

Newsletter

Lisez la Lettre de Factuel

ABONNEZ-VOUS À LA NEWSLETTER !