A Planoise, Franche-Comté-Boussole combine social et environnement

L'association participe avec Miroirs de Femmes et une dizaine de structures à Semons le Printemps, samedi 24 mars au Centre Nelson-Mandela où seront présentés un projet de jardin partagé et une action de coopération environnementale impliquant le lycée agricole de Montmorrot (Jura) et la ville marocaine de Demnate.

boussole

Mohamed Annachate est un bâtisseur solidaire impliqué dans plusieurs aventures collectives que relie Franche-Comté-Boussole, l'association qu'il préside. Sa création en 2015 a sanctionné une trentaine d'années d'accompagnement informel des habitants des quartiers populaires de Besançon dans des domaines variés. Elle porte aussi le projet d'un jardin partagé à deux pas de l'école Fribourg de Planoise, qui doit être présenté samedi 24 mars au centre Nelson-Mandela à l'occasion d'une journée intitulée Semons le printemps. Elle y montrera également son engagement dans une opération d'éducation à l'environnement menée en partenariat avec Demnate, la ville de l'Atlas marocain où Mohamed Annachate a grandi.

Que fait Franche-Comté-Boussole ?

De l'assistance et de l'aide administrative pour les jeunes et les adultes de Planoise et des quartier prioritaires de la politique de la ville... C'est pour les gens qui ont des problèmes avec les démarches, les papiers à remplir, sont confrontés à la barrière de la langue, à la complexité du système administratif français...

Par exemple ?

Des femmes seules avec des enfants employées dans le secteur du nettoyage ont des problèmes de droit du travail, de compréhension de leur fiche de paie, d'amplitude de travail de 5 heures à 23 heures... On les met en contact avec la CFDT ou la CGT. On a eu six ou sept cas de personnes ayant des difficultés de remplissage de dossier MDPH. Cela peut aussi être des demandes de logement, de médiation avec des bailleurs quand il n'y a pas d'eau chaude... Parfois il suffit d'un simple coup de fil pour régler un souci... D'autres fois, ça peut traîner : il arrive que le prestataire d'un bailleur impose un délai de cinq ou six jours qui peut poser vraiment problème quand il y a des enfants en bas âge...

La question de la « barrière de la langue » revient souvent...

Oui. On travaille au cas par cas. Les gens viennent nous voir avec des papiers. Ils peuvent avoir besoin de rédiger un courrier en réponse à une demande de la CAF pour un trop perçu et risque de leur couper les vivres. On fait un peu l'assistante sociale. Quand je fais la tournée des marchés, les gens m'arrêtent pour m'expliquer leurs problèmes... Ça fait trente ans qu'on fait ça. On était un petit groupe d'étudiants marocains : avec le temps, on a fini par faire l'association.

Tirez-vous un enseignement de votre expérience ?

Les gens qui ont des problèmes ont souvent peur des institutions, se méfient, surtout quand ils ont peu de bagage scolaire. Mais ce n'est pas toujours une question de scolarité : je suis tombé une fois sur un Turc qui avait une maîtrise de droit dans son pays, mais avait un problème de langue...

Qui anime l'association ?

Une petite bande d'une dizaine de personnes, mais nous sommes trois animateurs dont deux consultants, Hamid Mbarki, qui fait de l'ingénierie de la formation, et moi, et un professeur de math-physique en lycée professionnel, Majid Rakhou. On se connaît depuis 33 ans... Quand des situations sortent de notre domaine de compétence, on fait appel à d'autres Marocains... A un moment, on s'est dit : on va faire une permanence, donc une association. Ça a été notre première démarche administrative.

Ce qui vous a conduit à agir pour les jeunes ?

Oui. On s'est mis à chercher des stages en entreprise pour ceux qui n'arrivent pas à en avoir. On est là pour orienter, mettre en contact...L'association PARI nous accueille sur certaines plages horaires en attendant que nous ayons des locaux attitrés au centre social Bourgogne : il y a des locaux vides au rez-de-chaussée depuis le départ de la Sécu et de la CAF... Autrement, on travaille beaucoup à distance, par ordinateur, avec des bases de données numériques...

Quelles sont vos ressources ?

Pas grand  chose. On paie les consommables de notre poche. On a eu 500 euros de subvention de fonctionnement de la part de la ville. On a cherché longtemps, puis on a eu en septembre 2017 un entretien avec l'adjoint Jean-Sébastien Leuba qui nous a mis en contact avec PARI et nous a promis des locaux prochainement...

Combien pensez vous avoir aidé de personnes en trente ans ?

(Rire) A Pratz, près de Moirans en Montagne, où j'ai habité un temps, notre maison était quasiment l'annexe du consulat du Maroc ! On trouve des stages, on aide à faire des CV, on parle de l'attitude, on aide à comprendre les codes vestimentaires...

Les conditions d'insertion professionnelle ou sociale ne sont-elles pas difficiles pour des jeunes des quartiers populaires ?

Je ne veux pas faire de misérabilisme, mais les jeunes sont en confrontation avec tout ce qui est administratif. Ils ont du mal avec les papiers, surtout les garçons. Quand il y a un problème d'actualisation avec Pole emploi, c'est souvent la mère ou la sœur qui apporte les papiers... 

D'où vient le projet de jardin partagé ?

Il s'agit de maintenir le lien social. Ça fait un an qu'on travaille dessus. On a demandé un permis de végétaliser au service espaces verts. Il ouvrira en avril. On a monté le projet avec Miroir de Femmes et le centre Jacques Weinman (une maison de retraite médicalisée). On a l'appui des bailleurs qui mettront à disposition un local pour les outils. Avec tous ces partenaires, on a créé un groupe de travail en mai dernier sur la thématique du jardin lancée par la Maison de quartier, et ça débouche sur cette journée du 24 mars où on échangera des semences, parlera environnement, pédagogie...

Vous avez aussi un partenariat avec Demnate, au Maroc...

Ce volet international fait la grandeur de l'association ! Nous adhérons au BFC-International, le réseau régional de solidarité internationale où j'ai intégré deux groupes de travail : énergie-déchets, et éducation à l'environnement. Ça a donné naissance à un travail sur Demnate qui est confronté à une problématique eau et biodiversité avec les déchets liés à la démographie et au tourisme. Le pont naturel d'Iminifri attire beaucoup de monde et, par ignorance, certains habitants vendent aux touristes des traces de dinosaures ! 

En quoi consiste l'action ?

Des membres du CPIE Bresse jurassienne, du lycée Edgar-Faure et de BFC-International ont assisté à la COP22 à Marrakech avec des représentants de la commune de Demnate. Dix étudiants de BTS du lycée agricole de Montmorrot ont aussi effectué en avril 2017 un voyage d'étude de onze jours à Demnate, certains y ont même fait un stage dans le cadre de la biqualification pour le cursus d'accompagnateur en montagne... Ils ont conduit des actions sur le tri sélectif dans une douzaine de cafés et de restaurants, instauré un prix du quartier le plus propre... La prochaine action sera une visite de l'association Tiwzi pour la promotion de femme rurale d'Aït Oumghar. Avec une aide de la ville de Besançon, on travaille à une mini station d'épuration pour protéger l'eau de l'oued M'Hacer qui passe sous le pont naturel d'Iminifri qui est dans le Géo-Parc du M'Goun, labellisé Unesco en 2014.

 

 

Newsletter

Lisez la Lettre de Factuel

ABONNEZ-VOUS À LA NEWSLETTER !