Violence verbale et mélange des genres

On attendait l'entrée dans le débat public des responsables politiques qui portent le projet de Center Parcs de Poligny. Nous voilà servis... Qu'on ne s'étonne pas que la discussion prenne l'allure d'un pugilat où les coups bas sont permis.

On attendait l'entrée dans le débat public des responsables politiques qui portent le projet de Center Parcs de Poligny. Nous voilà servis : violences verbales, coups tordus, mélange des genres...

On comprend bien que le président du Conseil général du Jura, Christophe Perny (PS), ait pris un ton résolument offensif, le 17 décembre dernier lors d'une réunion publique qu'il avait organisée, pour défendre un projet présenté comme porteur d'emplois et de développement alors qu'il est engagé dans une difficile campagne électorale.

De ce point de vue, il aurait tort de ne pas utiliser ses points forts, sa belle aisance en public, un certain bagout, un indéniable dynamisme. Ce qu'on comprend mal, c'est qu'emporté par son élan, il en oublie parfois d'être élégant dans l'échange et ne dédaigne pas cogner, verbalement s'entend, sur ses contradicteurs. Sans doute est-il, comme Nicolas Sarkozy, un adepte du philosophe Schopenhauer et de son Art d'avoir toujours raison... Marie-Odile Mainguet (EELV) et Hélène Pélissard (UMP) en avaient fait les frais dans les séances du conseil général, voici maintenant le tour des citoyens critiques...

Qu'on ne s'étonne pas dès lors que la discussion prenne l'allure d'un pugilat où les coups bas sont permis. Ainsi le piratage du site de l'office de tourisme de Poligny par des hakers radicaux anti Center Parcs. Ça n'a pas beaucoup plu aux très légalistes opposants de l'association Le Pic noir qui se sont empressés de faire savoir qu'ils « déplorent » l'attaque dont ils font porter la responsabilité à « l'opacité » du discours des élus (lire leur lettre ouverte ici). 

On s'étonne cependant de l'incroyable maladresse de l'hebdomadaire La Voix du Jura qui n'a pas trouvé d'autre reporter pour narrer la réunion du 17 décembre que son correspondant local qui n'est autre que le responsable de la communication de la ville de Poligny ! Un employé du maire, Dominique Bonnet (UMP), ardent défenseur du projet ! C'est pain béni pour Le Pic noir qui s'offusque, à juste titre, d'un article tendancieux où les questions des sceptiques sont considérées comme « farfelues ». On voudrait démontrer la collusion entre la presse et le pouvoir, on ne s'y prendrait pas autrement. C'est pourquoi les relations publiques - donc la communication - et le statut de fonctionnaire sont légalement incompatibles avec le journalisme professionnel.

D'ailleurs, le Pic noir tombe dans le panneau en demandant au maire de « rappeler » à son salarié d'être plus objectif quand il se fait journaliste ! Voire de l'écarter du traitement du dossier ! C'est oublier que cette responsabilité est de l'unique ressort de la direction de la rédaction du journal. Un journal qui, il y a quelques mois, a su faire preuve d'indépendance en exposant publiquement un contentieux avec le maire de Lons-le-Saunier qui venait de lui retirer un contrat publicitaire en guise de rétorsion après un article critiquant sa gestion de la crise de la MJC de la ville.

Violences verbales, coups tordus, mélanges des genres... Il n'y a rien de tel pour éviter de parler des enjeux : emploi, développement, environnement, montage financier du projet...

Quand on sait que la niche fiscale Censi-Bouvard, qui permet à Pierre & Vacances de faire miroiter des crédits d'impôts aux particuliers qui investiraient jusqu'à 300.000 euros dans les cottages des Center Parcs, a été prolongée jusqu'en 2016 après que son patron a rendu visite à Jérôme Cahuzac encore ministre du budget, on se dit qu'il est urgent de bien réfléchir, par exemple à la notion de conflit d'intérêts...

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