Transports publics bisontins : vers une baisse du service en 2018 ?

La négociation de la nouvelle délégation de service public entre l'agglo et deux candidats pour la délégation de service public, Transdev et Kéolis, a lieu sur fond de réussite commerciale du tram dont les coûts de fonctionnement et de maintenance sont préoccupants. Le déficit cumulé est de 25 millions, et la CGT craint la poursuite de la baisse du kilométrage des bus et un plan de départs volontaires...

La réussite du tram ne peut cacher les problèmes des bus...

La question de l'opportunité rétrospective d'avoir construit le tramway bisontin revient à l'occasion de la négociation de la future délégation de service public. Elle est régulièrement posée par des élus de la droite bisontine et des communistes qui militaient alors pour d'autres solutions, les premiers souhaitant s'appuyer sur la croix ferroviaire, les seconds penchant pour des bus à haut niveau de service.

Cette fois, les conséquences de ce choix sont à nouveaux soulevées par la CGT de Besançon-Mobilités, la filiale du groupe Transdev qui avait obtenu le marché des sept premières années d'exploitation du réseau. Ce marché se termine le 31 décembre prochain et des quatre postulants initiaux au prochain, il en reste deux : Transdev et l'ancien gestionnaire du réseau Kéolis. Confidentielles par nature, les discussions en cours avec la CAGB devraient notamment porter sur le budget alloué par la collectivité au délégataire retenu, aujourd'hui 21 millions par an, mais aussi sur le niveau de service, et par conséquent sur l'emploi.

Les 25 millions de déficit d'exploitation cumulé depuis 2011 pèseront forcément lourd dans la balance. Devraient s'y ajouter la charge de la maintenance jusque là supportée par le constructeur, CAF, pour « 2 à 3 millions d'euros par an », souligne Florian Cholley, le délégué syndical CGT de l'entreprise. Qui les prendra en charge ? On voit mal le prochain délégataire le supporter, pas plus que la collectivité à l'heure où ses recettes sont plus contraintes que jamais, alors qu'elle vient d'investir dans la nouvelle ligne 3 en site propre qui doit entrer en service en septembre entre la gare Viotte et le parc scientifique Témis via le campus de la Bouloie. Restent les variables d'ajustement classiques que sont l'emploi, la tarification et l'offre de service des bus.

Certaines ont déjà été utilisées, note la CGT : « 150 départs de bus ont été supprimés en 2011 en raison du sous-effectif », explique Florian Cholley. En outre, la suppression de ligne 13 l'an dernier, et le « non départ de 20 à 25 bus quotidiens », notamment à l'automne quand le taux d'arrêts maladie a doublé pour atteindre 15%, ont conduit à parcourir 220.000 kilomètres de moins que prévu... La CGT estime que le maintien de la subvention publique à 21 millions par an conduirait à la perte d'un million de kilomètres...

« Le  tram, c'était pour marquer le coup dans la guéguerre avec Dijon... »

Ce qui inquiète aussi le syndicat, c'est une petite phrase prononcée en comité de groupe par le DRH, Clément de Villepin : « il a lâché que Besançon serait le prochain réseau à avoir un plan de départs volontaires », après qu'une mesure du même ordre a été appliquée à Nancy pour des motifs similaires : 16 millions de déficit en quatre ans, 400.000 kilomètres de moins...

Participant à la conférence de presse du délégué CGT, Thibaut Bize, président du groupe communiste au conseil municipal, explique que, lors du précédent mandat où il n'était pas élu, ses camarades avaient déjà « alerté » de la probabilité du déficit au moment du débat sur le tram. « Nous avions voté contre en pensant au risque de déséquilibre du réseau, on aurait fait le BHNS à moindre coût que le tram... »

Les défenseurs du tram, dont Jean-Louis Fousseret, argumentaient alors notamment sur l'économie de masse salariale : une rame transportant davantage de voyageurs qu'un bus, il y a besoin de moins de conducteurs. Florian Cholley n'est pas convaincu : « un grand bus transporte un tiers de voyageurs en plus qu'un bus, donc ça fait un tiers de conducteurs en moins... Et un bus articulé et un tram ont la même capacité ». La capacité du tramway est en effet de 132 places. Pour qu'une rame emmène 230 personnes, il faudrait un module complémentaire, solution évoquée avant les travaux, mais pas à l'ordre du jourCet article a été légèrement modifié le 27 avril pour corriger une erreur relative à la capacité d'une rame : nous avions écrit 230 places au lieu de 132.... A Metz, où Florian Cholley considère que le bus à haut niveau de service « marche », la capacité est de 150 places... Ce n'est cependant pas ce point qu'il estime essentiel, mais plutôt la concurrence et le prestige : « l'idée du tram, c'était pour marquer le coup dans la guéguerre  avec Dijon... » 

Ce désaccord de fond ne l'empêche pas de « souligner que le budget initial a été tenu ». De même, Florian Cholley salue la réussite commerciale du tram : « l'objectif de fréquentation a été atteint en six mois, et on est à 21 km/h de vitesse commercial contre un objectif de 22... » Ce constat d'un tram marchant bien est fait par de nombreux bisontins, mais la médaille a un revers : la moindre qualité des dessertes de bus, qui entraîne une moindre fréquentation, qui conduit à moins de recettes qui génèrent des baisses de service. La spirale est la même que pour les bureaux de poste ou les petites gares dont on justifie la fermeture en raison d'une baisse de la fréquentation consécutive à une baisse de l'offre de service...

« Les plus gros réseaux du pays sont en régie »

Du coup, la logique d'un service public pris en charge par une régie publique refait surface. Les communistes avaient fait inscrire dans le contrat de majorité municipale la mise à l'étude de cette éventualité. « La gestion publique a fait ses preuves avec le centre de tri, pourquoi ne pas sérieusement l'étudier pour le transport urbain, les plus gros réseaux du pays sont en régie », argumente Thibaut Bize. Cette étude a cependant été faite, mais n'a pas été concluante...

L'élu, qui ne veut pas passer pour un « ayatollah de la régie », considère que la solution devra, quelle qu'elle soit, « maintenir le niveau de service et la tarification », s'inscrire dans les enjeux de la transition écologique, et respecter les conditions de travail. Il ne dit pas comment cela se finance, mais assure que les moyens existent... Dans le programme keynésien de Mélenchon dont il ne cite pas le nom ?

Pour l'heure, deux syndicats (CGT et CFDT) étudient un éventuel droit d'alerte que pourraient voter les comités d'entreprise de Transdev national et de Besançon Mobilités. Et la CGT a mis en ligne une pétition pour le « maintien du niveau d'offre actuel »...  

 

 

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