Rentrée scolaire : techniquement réussie, mais…

La baisse démographique dans le primaire (moins 1200 élèves) combinée à une légère augmentation de la dotation en postes sur l'académie (dix) ne peut masquer l'impréparation de la réforme du collège contre laquelle les enseignants ont été peu nombreux à faire grève... sauf à Saint-Claude

Jeudi 8 septembre, pendant un rassemblement d'une soixantaine d'enseignants en grève devant le rectorat à Besançon. (Photo Daniel Bordur)
« Malgré la baisse démographique, les conditions budgétaires de la rentrée sont les meilleures que la France ait connu depuis fort longtemps. Il fut un temps où, en dépit d'effectifs en augmentation, la situation était inverse ». Le recteur d'académie Jean-François Chanet positive, autant en évoquant les statistiques qu'en déclinant les évolutions et nouveautés de la nouvelle année scolaire. Certes, avec dix postes d'enseignants en plus en Franche-Comté, il ne peut pas trop pavoiser. Quoique. Le premier degré en avait perdu dix-neuf l'an dernier, il en gagne cinq aujourd'hui alors qu'il y a 1200 élèves de moins, pour la plupart en maternelle. Le second degré en avait gagné quarante-six il y a un an, il en voit cinq de plus aujourd'hui.
Nous n'avons pas mentionné les effectifs enseignants car le rectorat nous a fourni des effectifs en équivalents-temps-plein que l'on ne peut pas comparer avec les effectifs en postes donnés sur ce tableau pour les années précédentes. D'autres informations ne sont pas encore disponibles. Nous compléterons ce tableau dès que possible.

Trompe l'oeil ? Blandine Turki, du Snuipp-FSU du Doubs, principal syndicat d'enseignants du premier degré, ne fait pas la fine bouche : « cinq postes en plus, c'est positif, tant mieux, mais ils n'ont pas permis de couvrir l'ensemble des ouvertures de classes. Comme il n'y a toujours pas assez de moyens, il a fallu prendre sur les postes de remplacement ». Par exemple pour maintenir la quatrième classe de l'école maternelle de la Butte, à Besançon, occupée par les parents. A Saint-Claude (Jura), une huitième classe a été rouverte pour un an à l'école du Truchet.

Le recteur, Jean-François Chanet.

Le recteur assure pour sa part que le « potentiel de remplacement est amélioré ». A prendre en compte l'argument syndical, on comprend que cette amélioration ne concernerait que les écoles avec plus de maîtres que de classes, plus nombreuses que l'an dernier. Mais en comité technique, le 2 septembre, le Dasendirecteur académique des services de l'Education nationale, en fait l'ancien inspecteur d'académie du Doubs, Jean-Marie Renault, estimait que la situation du remplacement n'est pas détériorée.

Plus de maître que de classes :
« la revendication est galvaudée »

Le dispositif « plus de maîtres que de classes », vieille revendication syndicale, passe en effet de 32,5 postes dédiés à 55, ce que le recteur présente comme une « priorité maintenue ». « Notre revendication est galvaudée », dit Blandine Turki (Snuipp-FSU). « Pour nous, il doit y avoir un maître surnuméraire dans toutes les écoles, ça permet aux collègues de travailler autrement, de travailler en petits groupes. Là, c'est seulement en REP+Réseau éducation prioritaire renforcé, à Planoise ou Bethoncourt. Or, il y a des écoles dans des secteurs ruraux en difficulté. Ce serait bien de généraliser cette mesure, notamment dans les écoles rurales ou multi-niveaux ».

L'autre priorité revendiquée par l'administration est l'accueil des moins de 3 ans, « tombé de 35% de la classe d'âge à 11% entre 1995 et 2002, a été relancé et atteint 22% en REP+ » : il passe de 18 postes dédiés l'an dernier à 28.

Mobilisations de parents à Besançon et Pontarlier

Pour afficher ces deux priorités, le rectorat a procédé par « redistribution » ou redéploiement de postes correspondant à une trentaine de classes supprimées au nom d'une orientation, non assumée comme une priorité, visant à l'extinction des classes uniques : « à la nostalgie d'un seul maître dans une petite école », Jean-François Chanet préfère les « classes par groupe d'âges : l'apprentissage se fait plus facilement dans un regroupement rural que le maintien de saupoudrage de moyens sur de tout petits effectifs ».

Le saupoudrage, c'est quand même ce qui parfois permet de régler une situation conflictuelle. Comme à l'école maternelle de la Butte, à Besançon. Une des quatre classes avait été supprimée, mais après comptage par l'inspection académique - excluant étonnement dans un premier temps les enfants du voyage - et occupation de l'école par les parents, elle a été réattribuée. A Pontarlier, c'est à l'école maternelle Vauthier que les parents se mobilisent pour l'ouverture d'une quatrième classe.

Le recteur : « la discrimination positive
joue en faveur de la remédiation sociale »

Le rectorat met aussi en avant la moyenne de 23,1 élèves par classe : « nous l'avons légèrement améliorée », se réjouit Jean-François Chanet. C'est en fait la conséquence logique de la combinaison de la baisse globale des effectifs et des cinq postes supplémentaires. Blandine Turki doute du chiffre avancé : « le rectorat a divisé le nombre d'élèves par le nombre d'enseignants, sans tenir compte des décharges, des temps partiels, des maîtres spécialisés des réseaux d'aide qui ne sont pas devant une classe. Ça fausse les chiffres. On a des classes à 27 élèves en élémentaire, et même 31 en maternelle... Tous les postes supprimés sous Sarkozy n'ont pas été réinjectés ».

C'est cependant dans le second degré que les enjeux sont, de l'aveu même du recteur, les plus importants : « il faut réussir la réforme du collège ». Dans cette perspective, le service formation s'est mobilisé : « il y a habituellement 26.000 journées stagiaires, on en a eu 37.000 cette année dont 16.000 sur la seule réforme », dit M. Pelier, le responsable du service. Le recteur parle de « priorités », veut « éviter le saupoudrage qui donne l'illusion de donner les mêmes moyens à tout le monde alors qu'il faut faire des efforts particuliers sur les zones d'éducation prioritaire et certains territoires ruraux isolés. La discrimination positive joue en faveur de la remédiation sociale. Nous avons ainsi mis huit postes de CPEconseillers principaux d'éducation dans des collèges n'en ayant pas sans en supprimer dans les lycées ».

« Plus on apprend une langue tôt, plus c'est ensuite facile
d'apprendre les autres »

Jean-François Chanet insiste sur les « enjeu disciplinaires », met en avant les « 99 classes bilangues dans 90% des collèges » tout en soulignant « la fin des sections européennes qui étaient des classes de contournement de la mixité sociale ». Il défend l'apprentissage d'autres langues que l'anglais : « plus on apprend une langue tôt, plus c'est ensuite facile d'apprendre les autres ».

Il se réjouit « l'introduction de l'allemand » dans les lycées professionnels du bois, que la fusion des régions et des académies portent en germe de meilleurs liens avec l'Allemagne : « Besançon avait un partenariat avec le land de Brême, Dijon avec la Rhénanie-Palatinat beaucoup plus proche. On pourra donc développer de nouvelles relations ». N'y a-t-il pas aussi, en germe, une recherche future de main d'oeuvre jeune et bien formée de la part de notre voisin d'outre Rhin à la démographie déclinante ? Le délégué académique à la formation, M. Chevillard, s'exclame devant notre question : « la Suisse montre qu'il n'y a pas besoin de politique d'appel pour que nos enfants partent ! »

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