Psychodrame institutionnel sur la basse vallée de la Loue

Les travaux de désenrochement peu avant la confluence avec le Doubs semblaient acceptés. Leur refus par le député Jean-Marie Sermier et la maire de Parcey entraînent la démission du président du syndicat mixte chargé d'un aménagement hydrologique plus écologiquement vertueux.

Loue-Parcey

Le bureau du syndicat mixte Doubs-Loue se réunit ce mercredi pour tenter de trouver une solution à la crise qui s'est révélée jeudi dernier lors du dernier conseil syndical à la préfecture de Lons-le-Saunier. Tout le monde était resté sur les décisions prises quelques mois plus tôt à propos de travaux hydrologiques à la confluence du Doubs et de la Loue, au sud-ouest de Dole. On avait notamment convenu de déconstruire la digue Girard, du nom de l'îlot qui est une réserve nationale, de déconstruire la digue de Molay, d'installer une passe à poissons à Rahon, et de désenrocher sur environ 400 m la Loue à la hauteur du golf de Parcey. Ces quatre chantiers avaient obtenu l'unanimité des collectivités constituant le syndicat : le conseil général du Jura, le Grand Dole, les communautés de communes de la Plaine jurassienne et du Val d'Amour.
Or, jeudi, la communauté de communes du Val d'Amour, présidée par le député Jean-Marie Sermier (UMP), s'est rétractée à propos du désenrochement de la Loue au niveau du golf Parcey, à quelques encablures de la confluence des deux rivières. Et la commune de Parcey, membre du Grand Dole, a fait savoir qu'elle avait pris également une délibération opposée à ce désenrochement. Quand le préfet du Jura a demandé la raison de ce revirement, Jean-Marie Sermier a dit, en substance, que sa collectivité ne voulait pas bloquer les autres dossiers. Le préfet a alors indiqué que dans ces conditions, il suspendait la participation de l'Etat et de l'Union européenne pour les travaux, y compris ceux déjà engagés, ce qui est le cas de la digue de Molay où le coût de l'intervention est de 1,3 million d'euros. 

Une rivière canalisée dans les années 1960-1980

Grand malaise autour de la table. Alain Dejeux, qui avait fait voter les travaux lors du précédent conseil syndical, se sentant désavoué, a alors présenté sa démission. Son prédécesseur, l'actuel premier vice-président, Franck David, maire de Rainans et conseiller général de Rochefort-sur-Nenon (UMP) pourrait reprendre du service. « Peut-être », indique-t-il avec une infinie prudence. « Je suis convaincu du bienfondé du volet environnemental sur la confluence, d'où les difficultés actuelles ». Pourquoi est-ce difficile ? « On n'a pas assez communiqué en amont sur les aménagements... Je suis assez environnementaliste, mais comme élu, si j'avais le moindre doute quant aux risques encourus par la population, je le dirais ».
Il veut parler des risques d'inondations. Le village de Parcey en a connues jadis. Les digues construites entre les années 1960 et 1980 ont dépuis protégé le village. Mais on a aussi rectifié le cours méandreux de la Loue qui, dans sa partie jurassienne, a perdu une vingtaine de kilomètres. Conséquence : le courant a accéléré. Comme il ne pouvait plus attaquer les rives enrochées, il a érodé le fond du lit. « Il s'est approfondi de un à deux mètres suite au requalibrage et aux enrochements », explique Marc Forêt, le directeur de l'Établissement public territorial de bassin Saône-Doubs (EPTB, composé des départements, régions et principales villes). L'EPTB a effectué de nombreuses études qui ont conduit à des travaux conduits ou projetés par le syndicat mixte Doubs-Loue : « le projet permet de redonner un espace de liberté et de divagation à la rivière pour qu'elle se recharge en sédiments, cela inquiète quelques riverains... »
Administrateur de l'EPTB lors du précédent mandat, le conseiller régional Éric Durand (EELV) est contrarié : « la Loue mérite mieux que ça. Ce qui se passe est une péripétie qui montre que ce dossier est pourri par les élus locaux - je ne dis pas que ce sont eux qui sont pourris. Quand tous vont dans le même sens, ça avance... » Il en veut en particulier à Jean-Marie Sermier, autre ancien président du syndicat mixte Doubs-Loue : « il soufflait le chaud et le froid, il est à la fois un pilote et un frein... là, il semblait être pour le désenrochement... »
Pour l'heure, la basse vallée de la Loue vit un nième couac de gouvernance. La préfecture indiquait hier soir que « la concertation se poursuit ». Rien de tel que la menace d'une suspension de participation financière, y compris sur des travaux déjà engagés, pour mettre une certaine pression sur les élus. Reste que les financements européens, à force de ne pas être consommés, peuvent un jour disparaître...

 

Contactés à plusieurs reprises par messagerie téléphonique, Jean-Marie Sermier, Alain Déjeux et Brigitte Ongenaed (maire de Parcey) n'avaient pas encore donné suite à nos demandes d'entretien, mardi soir. Leurs positions viendront compléter cet article dès qu'ils nous les aurons fait connaître.
Le syndicat mixte de la Loue est en attente de la décision du pérfet du Jura d'accepter ou non la démission de M. Déjeux de la présidence. Du coup, l'éventuelle élection d'un nouveau président a été reportée.

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