Le travail saisonnier en augmentation en Bourgogne-Franche-Comté

L'enquête annuelle de Pôle emploi et du Crédoc montre que les projets de recrutement de saisonniers augmentent depuis 2013. Les étudiants ne sont plus seuls sur les jobs d'été que recherchent désormais des jeunes en recherche d'un premier emploi, des séniors et même des retraités pauvres, explique la CGT.

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Plus que quatre recrutements envisagés sur dix correspondent à des emplois saisonniers en Bourgogne-Franche-Comté selon l'enquête annuelle de Pôle-emploi et du Credoc sur les besoins de main d'œuvre. Les projets d'embauche saisonnière sont passés de 29,8% du total des intentions de recrutement en 2013, à 41% cette année.

En Franche-Comté, la part des quelque 26.000 projets de recrutement sur des postes de saisonniers varie avec les bassins d'emplois dont les caractéristiques sont spécifiques. Elle représente 55% des projets d'embauche sur le bassin d'emploi de Lons-le-Saunier qui intègre une grande partie du vignoble et l'essentiel du secteur touristique des lacs. Touristique et industriel, le bassin d'emploi de Pontarlier arrive juste derrière avec 46%, puis avec 43,3% celui de Dole où dominent les emplois agricoles et de services.

Dynamique zone frontalière

Importants en nombre sur le bassin d'emploi de Besançon, les recrutements saisonniers ne représentent qu'un emploi sur quatre (24,5%) d'un territoire davantage caractérisé par les emplois d'entretien de locaux, d'animation et des services à la personne. L'enquête met également l'accent sur les difficultés de recrutement. Elle permet par exemple de constater que les employeurs déclarent avoir du mal à trouver des employés dans l'aide à domicile ou la santé, des serveurs de cafés ou restaurants, des cuisiniers, des ouvriers qualifiés ou des attachés commerciaux... Plusieurs de ces secteurs n'ont pas très bonne réputation en matière de salaires ou de conditions de travail.

Tiré d'un document plus complet (accessible ici), le tableau ci-dessous montre l'évolution sur trois ans des tendances relatives aux intentions déclarées de recruter par des entreprises. On voit que la zone frontalière est la plus dynamique, suivie par les deux plus grandes villes.

Source Pôle emploi et Crédoc.

C'est pour s'adapter aux mutations, notamment l'accroissement du travail saisonniers, que les syndicats mettent depuis quelques temps des dispositifs d'information sur les droits des salariés. Les zones touristiques, notamment les stations de sports d'hiver, ont été parmi les premières à se lancer dans l'affaire. Le salon des métiers de la montagne que Chambéry organise depuis une vingtaine d'années, accueille ainsi les stands de plusieurs organisations syndicales et pas seulement des guides ou des moniteurs de ski. On y voie régulièrement CGT, CFDT et FO qui mettent en avant les questions de logements, mais aussi de salaires et d'horaires.

Malbuisson, Métabief et Besançon

La CGT qui organise sa sixième caravane des saisonniers au plan national où l'on recense deux millions de saisonniers, en est à sa deuxième dans le Doubs. Après une halte l'été 2015 à Malbuisson et l'hiver dernier à Métabief, elle était cette semaine à Besançon car « il y a près de 7000 saisonniers sur le secteur », explique Cyril Keller, secrétaire de l'union départementale.

 

Responsable de la caravane comtoise, le cheminot Jean-Louis Morel évoque les « bouleverseements liés à la situation économique. Longtemps, l'emploi saisonnier était par nature réservé aux étudiants. Mais depuis quatre ou cinq ans, on voit arriver des jeunes en recherche d'un premier emploi, des femmes, des séniors, et depuis deux ans des retraités ayant des pensions trop faibles, inférieures à 1000 euros. Un salarié payé au Smic toute sa vie, n'a pas 1000 euros de retraite... »

La caravane, c'est en fait un stand posé dans une rue passante avec des documents sur les droits. C'est un aspect majeur : « les gens en difficulté sont de moins en moins regardant sur les droits. Une dame vient de nous dire que ses enfants sont partis dans le sud sans contrat de travail signé d'avance », ajoute-t-il. Dans le Midi, « il arrive souvent qu'on leur retienne 400 euros de logement », dit Cyriel Keller, « après dix jours de caravane, la plupart des problèmes rencontrés sont relatifs au salaire, aux heures supplémentaires non payées et aux conditions d'hébergement ».

Le saisonnier n'a pas la prime de précarité due aux CDD

Si en été, les campings peuvent faire l'affaire, notamment pour les plus jeunes, l'hébergement devient crucial en hiver : « on voit des gens dans des camions à qui on demande 300 euros de stationnement. L'hiver dernier, à Chamonix, deux jeunes sont morts asphyxiés dans leur camion... » Cela ne se passe heureusement pas comme ça à Métabief, notent les deux militants : « Il y a une grande différence entre les stations appartenant à un groupe et les régies publiques, Métabief est publique ». Autre particularité du Haut-Doubs où Cyril Keller dit avoir eu un « super accueil », les saisonniers sont locaux à 80%, souvent pluri-actifs.

Plus prosaïquement, ils apportent des informations sur la différence entre emploi saisonnier et CDD : contrairement au second, le premier ne donne pas droit à la prime de précarité de 10%. Du coup, il arrive que des employeurs indélicats recrutent sous statut saisonnier des salariés qu'ils auraient dû employer en CDD classique. En fait, tout dépend de l'activité économique. L'agriculture ou le tourisme peuvent recruter des saisonniers pour des tâches saisonnières comme les vendanges ou dans un centre de vacances. « On a même vu des usines et des services publics ayant recours illégalement à des saisonniers ».

Une fois n'est pas coutume, un article de la loi travail - le 39e - apparaît aux militants comme potentiellement intéressant : « il doit redéfinir les activités pouvant avoir recours au travail saisonnier, mais il ne prévoit pas de sanction en cas de non respect », dit Jean-Louis Morel. Un autre point va dans le bon sens, la reconduction automatique du contrat saisonnier d'une année sur l'autre, mais il met un bémol : « il faudrait ajouter "avec l'accord du salarié" ».

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