Pourquoi la CCI régionale participe à la présentation du Forum Pro-Est, sorte de salon inter-régional du commerce qui se tiendra en octobre à Belfort, au côté de la CCI du Territoire (organisatrice), des CCI d'Alsace, Côte d'Or, Jura, Haute-Saône, mais pas du Doubs ?
Le commerce est une compétence de la chambre territoriale, c'est la CCI 90 qui est chef de file sur cet événément. On accompagne, on vérifie la cohérence, on n'est ni porteur ni acteur...
L'absence du Doubs est-elle due à des divergences de vues à propos de la régionalisation des CCI ?
La loi de juillet 2010 a modifié profondément l'architecture du réseau consulaire. Cela a été validé par CCI France. Il s'agit de donner plus de visibilité au niveau régional et inverser deux siècles d'histoire où le travail se faisait sur un petit territoire. En outre, le niveau régional devient collecteur de la ressource fiscale alors qu'auparavant, c'étaient les CCI territoriales qui alimentaient les CCI régionales. Et le président d'une CCI régionale était un président de CCI territoriale, ce ne peut plus être le cas aujourd'hui. Imaginez le changement que ça procure. La CCI du Doubs existe depuis 1813. Ça ne se fait pas sans difficulté ni appréhension...
A combien se monte cette ressource fiscale ?
Un peu moins de 18 millions d'euros en 2012. Nous avons aussi des ressources provenant de nos actions et le budget primitif agrégé des CCI de Franche-Comté est de 40 millions. Il y a un autre point très important : les collaborateurs étaient dans chaque CCI territoriale, ils sont maintenant tous salariés de la CCI régionale, certains étant mis à disposition des CCI territoriales. On a travaillé en 2012 avec les organisations du personnel pour établir un règlement intérieur, l'équivalent d'une convention collective, commun aux cinq chambres. On a travaillé sur les disparités, travaillé pour que la mutation se fasse sans préjudice pour personne. Le tout avec 5% de recettes fiscales en moins trois ans de suite...
Combien de salariés travaillent dans les CCI ?
280 personnes pour 240 équivalents temps-pleins, et plus de 120 vacataires qui interviennent quelques heures dans nos établissements d'enseignement. On a mutualisé l'administration, les finances, les ressources humaines, l'informatique... Les effets s'en feront sentir plus tard.
Où en est la réflexion pour une CCI de l'Aire urbaine ?
Elle figure à notre schéma directeur... En Franche-Comté, on est exemplaire avec une chambre par département, mais on ne peut pas nier que le bassin d'emploi de l'Aire urbaine soit un territoire avec son fonctionnement, ses cohérences, sa gare TGV, son hôpital, ses deux zones d'activités... Il y a beaucoup plus de synergies entre Belfort, Montbéliard, Héricourt et Delle qu'entre Montbéliard et Besançon. Or, dans cette entité, le Territoire de Belfort appartient à l'Aire urbaine. Pour la Haute-Saône et le Doubs, une partie seulement. C'est donc plus simple pour la CCI du Territoire de Belfort de s'intégrer à une structure Aire ubaine que les CCI de Haute-Saône ou du Doubs. En même temps qu'on menait la réflexion, la réforme de la régionalisation est venue. Il faut laisser un temps d'adaptation à cette réforme pour évoluer vers une structure Aire urbaine. C'est aussi aux présidents du Doubs et de Haute Saône de s'entendre. De toute façon, pour transformer le territoire des CCI, il faut des assemblées générales délibératives prenant la même décision en même temps. Enfin, il faut aussi parler du syndicat mixte de l'Aire urbaine : quand les collectivités territoriales auront identifié ce qu'elles veulent faire demain, il sera plus facile de nous déterminer.
L'Aire urbaine est riche...
Moins qu'hier... Le territoire référent, c'est la région...
Quels sont les handicaps de l'Aire urbaine ?
Elle n'existe pas pour les CCI. Ce qu'il faut rechercher, c'est que les ressortissants ne voient pas la différence. Mais regardez le projet Filauto sur l'Aire urbaine, c'est un projet avec l'Alsace. Le développement s'affranchit des logiques territoriales.
Comment voyez vous la fusion des chambres d'agriculture du Doubs et du Territoire de Belfort ?
Elles ont tiré les conséquences des tailles des territoires en donnant une solution à la chambre du Territoire de Belfort de continuer à exister dans une entité plus grande en assurant le service aux ressortissants. Les agriculteurs ont du bon sens...
Vous dirigez Epaunova, un groupe textile. Le secteur a pris des coups terribles. Comment êtes-vous encore là ?
Il n'y a pas de bonnes stratégies, il faut faire moins d'erreurs que les autres... Nous avons suivi le mouvement d'internationalisation de nos clients. Nous n'avons pas eu d'autre choix. Si nous ne l'avions pas fait, nous n'existerions plus. Mais j'ai toujours tenu à conserver l'ensemble des métiers en France : service commercial, conception, fabrication de matière première et l'ensemble des métiers relatifs au savoir-faire. On sait fabriquer en France tout ce qu'on fabrique ailleurs. Le siège social est à Mathay, on a des sites en Tunisie, Maroc, Bulgarie, Roumanie. On est plus de 200, dont une cinquantaine à Mathay.
Quel regard portez-vous sur le déménagement des savoir-faire justement ?
Ce n'est pas une impression, c'est la réalité. Le modèle économique de la Commission européenne conduit à un affaiblissement de notre économie. Nous innovons toujours, mais ce qui fait défaut, c'est l'industrie capacitaire. Le modèle économique européen privilégie toujours les consommateurs au détriment des ouvriers, des entreprises, de la production. Il faut revenir à une Europe qui ne soit pas offerte, mais ouverte et où les entrepreneurs ont encore leur chance.
Faut-il des droits de douanes aux frontières de l'Union ?
Je pense que le retour à une Europe avec des capacités industrielles se fera par le retour de la compétitivité, le débat est connu. Il faut remettre à plat la politique européenne, mettre en oeuvre une vraie politique industrielle, mais je me garderais de dire quelles mesures prendre... Quand vous allez aux courses de chevaux, les cracks ont un handicap. Nous sommes en concurrence avec des gens sans protection sociale ni respect de l'environnement. Et nos clients nous disent qu'ils ne veulent pas payer ces surcoûts...
Pensez vous que la politique agricole est un exemple ?
On peut se passer de produire des voitures, pas de se nourrir, il ne faut pas oublier ces fondamentaux. Si les mêmes règles que celles appliquées à l'industrie avaient été appliquées à l'agriculture, il n'y aurait plus d'agriculture dans notre pays. Si on n'avait pas régulé ni assisté nos agriculteurs, ils ne seraient plus là...
A quoi sert la semaine de l'industrie qui commence lundi ?
C'est très important. On doit tout faire pour réorienter les jeunes vers les métiers de l'industrie qui sont loin d'être dépassés. Il y aura 77 portes ouvertes, 25 manifestations, Montebourg est annoncé... Nous allons vers les jeunes à La Rodia avec cinq saynètes pour casser les clichés, donner une autre image de l'industrie, puis une deuxième partie plus festive avec deux concerts.
Qu'écoutez vous ?
Je suis déjà allé à La Rodia, je suis éclectique dans mes choix musicaux, j'ai des enfants...
Que peut apporter l'industrie ?
L'épanouissement ! c'est là qu'on peut gravir des échelons grâce à son métier. Le premier employeur de Franche-Comté, c'est la Suisse, elle offre des qualifications, des emplois... Ils ont besoin de tourneurs, de fraiseurs, de décolleteurs, de travail au millimètre ou au micron... Ce monde de l'excellence de nos amis suisses, pourquoi ne le ferions-nous pas ? Il y a des scieries avec des machines à commandes numériques qu'on pilote d'un cockpit, comme dans le textile... On voit la concrétisation d'un produit : voiture, train, turbine, on participe à une chaîne importante... On doit se tourner vers l'industrie dès le collège et les études secondaires. Ce doit être une ambition territoriale...
La Franche-Comté est la première région industrielle de France...
Par le ratio emplois industriels sur emplois totaux. C'est 15% en France, 25% en Franche-Comté, 45 à 50% dans l'Aire urbaine...
C'est la troisième édition. Quels sont les retours des précédentes ?
Pas toujours faciles. Il faut faire évoluer les mentalités. Tant que nous aurons des postes ouverts en CFA et dans les classes techniques, on a encore du travail...