La précarité énergétique touche 35% des ménages francs-comtois

L'INSEE décline régionalement les résultats d'une étude nationale sortie en janvier. La « vulnérabilité énergétique » concerne davantage de monde pour le chauffage des logements que pour le carburant des trajets contraints en voiture. Dommage que la question sociale passe un peu à la trappe.

Le chauffage au bois est le moins concerné par la précarité énergétique.

Selon l'INSEE, 35% des ménages francs-comtois sont en situation de « vulnérabilité » énergétique, indique la déclinaison régionale d'une étude nationale de l'institut. Cela signifie que 178.000 ménages ont des dépenses de chauffage et eau chaude, ou de carburant pour les trajets obligatoires, qui grèvent leurs budgets. 131.000 ménages consacrent ainsi plus de 8% de leurs revenus pour chauffer leur logement et avoir de l'eau chaude. 70.600 ménages consacrent plus de 4,5% de leurs revenus en carburant pour le travail, les études, les courses, la santé ou des démarches administratives. Le total de 201.600 ménages, supérieur à 178.000, signifie que 23.600 ménages sont confrontés aux deux problèmes.

Vulnérabilité ou précarité ?
La question énergétique a de forts enjeux sociaux, et donc politiques, comme le souligne le premier rapport de l'Observatoire national de la précarité énergétique. Il évoque aussi l'enjeu du vocabulaire : « les difficultés d’appréhension statistique de la précarité liée à la mobilité amènent à parler de vulnérabilité.Néanmoins, différentes notions se cachent derrière ce terme qui complète la notion de précarité définie comme situation de difficultés multidimensionnelles et elle-même parfois nommée vulnérabilité sociale par les travailleurs sociaux. » (page 16).
On peut aussi prolonger la réflexion sur le site du Réseau d'acteurs précarité énergie logement : ici.

Les Francs-Comtois sont nettement plus touchés que l'ensemble de la population française. Ils le sont surtout pour les dépenses de chauffage où ils sont 26% contre 14,4% des Français et 16% des provinciaux, n'étant dépassés que par les Auvergnats (27%) et les Lorrains (27,4%). Pour les dépenses de carburants les Francs-Comtois sont 14% en situation de vulnérabilité contre 10,2% des Français, 12% pour les provinciaux avec des sommets de difficultés en Limousin (17,5%) et surtout en Corse (28%).

Différences territoriales et sociales

Les deux types de vulnérabilité sont distinctes car elles touchent des populations aux caractéristiques différentes sur le plan social alors que plus proches sur le plan territorial. Plus on habite dans un secteur peu densément peuplé, plus on a de risques d'être vulnérable pour le chauffage : c'est le cas 42% des 225.850 ménages des communes « peu denses » et de 55% des 25.800 ménages des communes « très peu denses ».

On retrouve cette distinction entre villes et monde rural dans les budgets carburant. On dépense en moyenne 880 € par ménage et par an dans la région, mais 1500 € dans les communes peu denses et 450 € dans les secteurs urbains où « les trajets sont plus courts et l'offre de transports alternatifs à la voiture davantage développée ».

Ouvriers et agriculteurs des zones rurales particulièrement vulnérables
L'étude nationale de l'INSEE présente une analyse croisée des aspects territoriaux et sociaux absents de l'étude régionale : « Dans les grands pôles urbains, les ménages vulnérables pour les déplacements peuvent être des travailleurs, en particulier des ouvriers et des professions intermédiaires, ou au contraire des inactifs de moins de 30 ans, vraisemblablement étudiants. Dans les couronnes de grands pôles, les ouvriers et les employés sont les catégories les plus vulnérables (respectivement 34,7 % et 29,9 %). Dans les petits pôles, les professions intermédiaires sont les plus exposées (13,4 %) : leur facture moyenne en carburant est élevée, proche de celle des cadres, alors que leur revenu est généralement inférieur. En couronne des petits pôles, la consommation de carburant augmente très fortement, entraînant dans la vulnérabilité énergétique professions intermédiaires (23,4 %), employés (27,6 %), ouvriers (29,1 %) et agriculteurs (24,5 %). Dans les territoires multipolarisés, la proportion de travailleurs consacrant 4,5 % ou plus de leur revenu augmente nettement, qu’ils soient cadres (21,2 %) ou ouvriers (40,0 %). Ce phénomène est encore amplifié pour les ménages habitant hors des aires urbaines, en particulier chez les ouvriers (47,9 %) et les agriculteurs (51,2 %). Les retraités (17,2 %) et les inactifs (22,2 %) restent relativement épargnés, malgré un accès aux équipements moins aisé qu’en milieu urbain. »

Le mode de chauffage et le type d'habitat jouent également beaucoup : les énergies exposant le plus à la vulnérabilité sont le fuel (50%) et l'électricité (27%), devant le gaz de ville (15%) et le bois. « Chauffer une maison coûte en moyenne 1940 € par an en Franche-Comté contre 1290 € pour un appartement », écrit l'INSEE qui constate que « les logements construits avant 1975 sont, en général, plus énergivores avec 2000 € en moyenne »

L'angle mort de l'étude régionale

La vulnérabilité est plus fréquente parmi les ménages d'une personne (53%), particulièrement chez les moins de 30 ans et les plus de 75 ans. Parmi les 10% des ménages aux plus bas revenus, 61% sont en situation de précarité énergétique pour se chauffer. Mais être mieux loti financièrement n'est pas une garantie : « un tiers des ménages vulnérables a un revenu supérieur ou égal au revenu médian ».

Ces deux derniers points sont les seules références du document de l'INSEE de Franche-Comté aux questions sociales. On n'y trouve curieusement pas les statistiques de vulnérabilité selon les catégories sociales figurant dans l'étude nationale de l'INSEE qui souligne les disparités territoriales et sociales. Elle mentionne ainsi la fragilité qui touche plus particulièrement la jeunesse, les employés, les ouvriers et les agriculteurs. C'est l'angle mort de l'étude régionale qui aurait mérité d'aborder cette dimension.

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