Des rapaces empoisonnés près de Besançon

Depuis une dizaine de jours, un héron cendré, deux milans royaux et six buses variables ont été retrouvés morts à Merey-sous-Montrond et Montrond-le-Château. Des appâts de viande imbibés de pesticides ont été retrouvés sur les cadavres. La LPO et le Centre Athenas ont porté plainte.

milan royal, Sabina Clément

La Ligue de protection des oiseaux et le Centre Athenas de soins aux animaux sauvages réclament une nouvelle fois l'interdiction des produits chimiques dangereux pour la faune sauvage et la fin de la circulation des produits interdits. Les deux associations déplorent en effet des « empoisonnements en série » à Merey-sous-Montrond et Montrond-le-Château, entre Ornans et Besançon, ayant touché depuis une dizaine de jours un héron cendré, deux milans royaux et sept buses variables. « L'examen clinique évoque une intoxication à l'aide d'un produit à effet rapide », peut-être un « pesticide inhibiteur de la cholinestérase », précise un communiqué envoyé aux rédactions ce jeudi.
L'autopsie a permis d'établir que les oiseaux avaient ingurgité des « charognes imbibées de pesticides », précise Gilles Moyne, du Centre Athénas, en l'occurrence un filet de dinde et du gras de porc. Cela lui permet de très fortement supputer des « empoisonnements à dessein ». Ces indices confirment le tableau clinique. Des prélèvements ont été effectués et doivent être analysés en laboratoire spécialisé. Il s'agit notamment d'identifier le pesticide, ce qui permettra peut-être de remonter la piste du délit. Une plainte a été déposée auprès du procureur du tribunal d'instance de Besançon. Si enquête il y a, elle pourrait être confiée comme souvent, à la gendarmerie et à l'Office national de la chasse et de la faune sauvage. 
Tous ces oiseaux sont protégés en France. Avec 2500 couples nicheurs recensés, notre pays abrite d'ailleurs la seconde population mondiale de milan royal, une espèce nécrophage, après l'Allemagne. C'est dire que la survie de l'espèce est « menacée », assurent la LPO et le Centre Athénas en rappelant qu'elle figure sur la liste rouge actualisée en 2008 des espèces vulnérables. Les deux milans tués revenaient de leurs quartiers d'hivernage et, « selon toute vraisemblance avaient rejoint leur site de nidification ». Le milan royal se reconnaît à sa longue queue rousse triangulaire échancrée, le mâle pèse de 800 à 1050 grammes, la femelle de 950 à 1300 grammes, pour une envergure de 145 à 165 centimètres. Le massif jurassien est l'un de ses cinq foyers principaux en France, avec le piémont pyrénéen, le Massif central, les plaines du Nord-Est et la Corse.
Les buses sont quant à elles des prédateurs précieux des campagnols, petits rongeurs faisant des ravages dans les pâturages.
Gabriel Laithier, le maire de Montrond-le-Château, n'était pas au courant de ces morts d'oiseaux quand nous l'avons contacté en fin d'après-midi. Le secteur du château ruiné où  un cadavre de milan a été retrouvé, est un site de « zones humides et de pelouses sèches avec une faune remarquable, c'est même une réserve de chasse, avec pas mal de buses, de corbeaux, de merles », indique-t-il, « dans ce coin là, les gens n'utilisent pas beaucoup de pesticides... Et les rapaces sont plutôt protégés par les agriculteurs... »
C'est bien l'avis de Gilles Moyne. Qui peut bien vouloir s'en prendre à des oiseaux ? « Des gens qui n'aiment pas les rapaces, il en existe... Ou des personnes peu informées... ». Christophe Morin, de la LPO, s'interroge : « ce peut-être une opération ciblée pour éliminer un prédateur de sa basse cour, quelqu'un qui voulait empoisonner un renard et tue un milan... »
Il y a deux ans, des rapaces avaient été empoisonnés au carbofuran à Montenois et Evette-Salbert, mais il ne s'agissait pas d'actes intentionnels : les oiseaux avaient été les victimes collatérales de ce pesticide interdit utilisé en plein champ. En revanche, à Frotey-les-Vesoul, un cocktail de trois pesticides avait été retrouvé sur des cadavres d'oiseaux avec une dose capable de « tuer un cheval », dit Christophe Morin. L'an dernier, c'est à Mandeure et Bouclans que des faits similaires se sont produits... Reste que sur les sept buses retrouvées ces derniers jours, deux avaient les pattes cassées : victimes d'un piège ?
   

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