Davantage d’oiseaux dans la région depuis 1990

Selon une passionnante étude de la LPO, l'augmentation observée de 50% cache des disparités importantes selon les territoires (très forte hausse dans le Doubs) et les espèces : les généralistes qui s'adaptent sont en hausse, les oiseaux spécialisés qui exigent un habitat de bonne qualité sont en baisse...

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Les centaines d'ornithologues amateurs et professionnels, d'une trentaine de structures de Franche-Comté, ont constaté une augmentation de l'ordre de 50% du nombre d'oiseaux de 143 espèces nicheuses entre 1990 et 2013 dans la région. Ils les ont tous repérés, explique le rapport de le LPO où figurent les premiers résultats d'une étude de suivi de l'avifaune. Il y a les espèces rares dont on a exclu le pic tridactyle pour manque de suivi, les oiseaux des zones humides comme les foulques marcoules, les oiseaux communs comme les hirondelles qu'il est question à l'avenir de toutes compter, ceux faisant l'objet de plans nationaux d'actions comme les milans royaux ou les râles des genets...

Les ornithologues se sont basés sur la méthode dite de l'« indice planète vivante » (LPI ou living planet index) qui consiste à compter ou estimer les populations d'une observation à l'autre sur un même site. On a ainsi une idée de la « variation de l'abondance » par espèce et pour tous les sites observés. 

Deux indices pour mesurer demain la spécialisation et l'effet du climat

Responsabilité franc-comtoise majeure
Parmi les espèces généralistes en augmentation en franche-Comté, la LPO cite la corneille noire, le corbeau freux, l'étourneau sansonnet, le héron cendré, le cygne tuberculé. Parmi celles qui ont régressé, elle mentionne le courlis cendré, le pic cendré, le vanneau huppé, la bécassine des marais « pour laquelle la Franche-Comté a une responsabilité majeure en terme de conservation à l'échelle nationale ».

La poursuite des observations dans les années à venir permettra d'intégrer deux autres méthodes : l'indice de spécialisation des communautés (CSI) et l'indice thermique des communautés (CTI). Le premier doit « permettre de distinguer les comportements des espèces spécialisées qui sont inféodées à un type d'habitat, des espèces généralistes moins exigeantes quant à la qualité du milieu ou plus enclines à s'adapter à un milieu perturbé ».

Le second « décrit la corrélation entre les déplacements des espèces et les changements des conditions thermiques liés au climat ». S'il renseigne sur la « réponse à l'évolution du climat », il peut aussi « cacher un phénomène local d'adaptation ».

La bonne santé des oiseaux du Doubs
La bonne santé des populations d'oiseaux dans le Doubs peut expliquer l'augmentation des espèces généralistes et notamment l'apparition de certains oiseaux. Pour les espèces spécialisées, la LPO évoque une « meilleure santé » des espèces forestières comme le grand tétras, en hausse depuis 2005, sans qu'il ait retrouvé le niveau des 1990. Quant au harle bièvre, il est arrivé en Franche-Comté par le Doubs, passant en 20 ans de un à 75 couples.

Cette augmentation de 50% du nombre estimé d'oiseaux observés pourrait réjouir la Ligue de protection des oiseaux. « Ce résultat, au premier abord positif, masque une réalité plus contrastée et inquiétante sur l'état de conservation des milieux naturels », indique-t-elle pourtant. Le contraste dont elle fait état est de deux ordres. Le premier est l'augmentation très importante des oiseaux généralistes « présents dans de multiples habitats » tandis que les oiseaux spécialisés « vivant dans un seul type de milieu naturel » sont en baisse « considérable ».

Deux fois moins de nicheurs en Haute-Saône, quatre fois moins dans le Territoire de Belfort

Le second constat réside dans les différences très nettes entre les départements de la région. L'indice planète vivante (LPI) est de 2,5 dans le Doubs et de 1,9 dans le Jura en 2013, témoignant d'une multiplication par 2,5 ou presque 2 des oiseaux observés en 1990. Le LPI n'a jamais dépassé 1,5 en Haute-Saône où il est redescendu à 1,4 en 2013. Et dans le Territoire-de-Belfort, s'il a également atteint 1,5 entre 1998 et 2000, il est redescendu à 1 en 2013.

Indices de « banalisation » ou de « dégradation » des milieux
Selon la LPO, parmi les oiseaux nicheurs, les espèces généralistes peuvent « être considérées comme indicatrice de la banalisation ou de l'homogénéisation des milieux », alors que les espèces spécialistes, « exigeantes dans le choix de leur habitat, peuvent être indicatrices de la régression ou de la dégradation de cet habitat ».

Calculé également pour les oiseaux nicheurs et hivernants, le LPI montre des différences notables selon les départements. Toujours à une valeur de 1 en 1990, l'indice pour les hivernants atteint 4 dans le Doubs en 2013 en présentant une courbe croissante quasi régulière. La même régularité croissante s'observe dans le Jura jusqu'en 2006 à l'indice 2,7 qui n'a que très peu varié depuis. Quant aux oiseaux nicheurs, ils atteignent dans le Doubs l'indice 1,8 de 2010 à 2013. Dans le Jura, l'indice est descendu à 0,8 en début de période (1992 puis 96 à 2000) avant de croître très lentement jusqu'à 1,3.

C'est très différent en Haute-Saône et dans le territoire de Belfort dont les courbes sont très proches. Les hivernants dont atteint, voire dépassé un peu 2 entre 1998 et 2003, avant de retomber à 1,3 et 1,2.  La LPO met cette évolution en regard de la météo et des périodes de gel prolongé. Les populations de nicheurs ont également chuté, entre 0,4 et 0,6 en Haute-Saône, autour de 0,25 dans le Territoire de Belfort. Autrement dit, les populations de nicheurs ont été divisées par deux en Haute-Saône, régression imputable à quelques espèces comme la pie grièche à tête rousse ou le vanneau huppé, voire le busard cendré proche de l'extinction. Les nicheurs ont été divisés par quatre dans le Territoire, notamment en raison de la diminution du peu fréquent vanneau huppé ou de la « florissante » cigogne blanche.

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