Chamole : éolienne citoyenne cherche encore quelques investisseurs

Onze clubs d'investisseurs réunissant plus de 150 Jurassiens ont promis d'apporter la moitié de l'objectif de 500.000 euros. Cette somme permettrait que les citoyens soient les premiers actionnaires d'une société d'économie mixte qui doit acheter l'une des six machines du parc éolien. La mise en service est programmée pour décembre 2017.

chamole

L'histoire est belle et ceux qui l'écrivent enthousiastes. L'éolienne citoyenne du parc de six machines en projet à Chamole parait en bonne voie d'être réalité. Sauf retournement de situation, la propriété de cette éolienne citoyenne devrait être partagée entre plusieurs collectivités locales et quelques centaines d'habitants des environs de ce petit village du plateau surplombant Poligny. Onze clubs d'investisseurs ont d'ores et déjà été constitués et réunissent environ 150 personnes du secteur (Bersaillin, Arbois, Miery, Brainans...) ou vivant un peu plus loin comme Macornay (près de Lons-le-Saunier) ou Champvans (près de Dole).

Tous ont pris des noms très évocateurs comme Vent debout, En Avant, Hisse et haut, Courant d'air, Le Vent en poupe... Ils ont ont bien fait sourire la centaine de convives du pique-nique organisé mardi 5 juillet sur le site, occasion d'une plantation symbolique d'un mini éolienne sous les applaudissements. Sept des onze clubs ont indiqué des promesses d'investissements de 231.500 euros. La somme rend l'objectif de 500.000 euros à l'automne d'autant plus atteignable que d'autres clubs sont en gestation, que des réunions d'information dites tupperwatt sont programmées. La prochaine se tient ainsi le 27 juillet à Domblans.


Réunis dans une société coopérative d'intérêt collectif, les clubs d'investisseurs apporteront les 500.000 euros à une société d'économie mixte au capital d'1,4 million à laquelle devraient participer la fruitière de fromagerie de Plasne, la société Ercisol, l'Ademe et le Conseil régional Bourgogne-Franche-Comté, le syndicat d'énergie du Jura (Sidec) et celui de Côte d'or (Ciceco), la SEM Nièvre-Énergie. La régie municipale d'électricité de Salins-les-Bains s'est donné le temps de la réflexion jusqu'à l'assemblée constitutive de la société d'économie mixte, en septembre. Sensible à l'énergie propre, elle a aussi besoin de savoir comment s'articuleront les relations juridiques entre ces multiples partenaires, quels sont les gains prévisibles.

« Les citoyens seront les premiers actionnaires,
les choses ne peuvent se faire sans eux »

La première question est celle de la gouvernance. Elle intéresse au premier plan les citoyens petits actionnaires. Comment éviter qu'ils ne soient floués à l'avenir, comme ont pu l'être les investisseurs d'Eurotunnel ? « L'épargne doit être accompagnée de la gouvernance. La structure coopérative aura la main, sera décideur. A 500.000 euros, les citoyens seront les premiers actionnaires, les choses ne peuvent se faire sans eux », répond Christophe Nouzé, le président de l'AJENA dont un chargé de mission suit le projet pas à pas.

Le capital de 1,4 million d'euros doit permettre d'emprunter les 3,9 millions restant afin de financer l'achat d'une éolienne qui coûte 5,3 millions, selon une lettre d'intention du développeur mulhousien Intervent. L'emprunt serait remboursé avec les recettes issues de la vente d'électricité qu'EDF a obligation de racheter à 8,4 centimes/kWh pendant dix ans, puis à un tarif évoluant entre 3 et 8,4 centimes pendant cinq ans, selon la rentabilité. A plus de 2500 heures de pleine puissance, le tarif baisserait, mais il y a un peu de marge car la théorie a conclu à une moyenne de 2355 heures permettant de produire 42 GWh par an. 

« On nous a annoncé
4% d'intérêt au bout de cinq ans, mais on ne fait pas ça pour ça ! »

Pour importants qu'ils soient parce qu'ils conditionnent la rentabilité de l'affaire, ces détails techniques n'étaient pas au cœur des réjouissances du pique-nique de mardi. On sentait plutôt comme une envie de contribuer à un projet bien inscrit dans la transition énergétique. « On n'est pas écolo à fond, mais on s'intéresse à l'avenir, on pense à nos petits-enfants », dit Françoise, membre du club Eh oh le vent de Bersaillin.

Elle n'a pas mobilisé une partie de son épargne dans le but d'avoir un retour sur investissement : « ce n'est pas le but, je vise plutôt un projet écolo, je me serais aussi intéressée à un projet de centrale hydraulique sur une rivière ou à un méthaniseur. C'est juste une démarche citoyenne, on verra ce que ça donne. Si ça ne marche pas, on aura au moins essayé... » Colette est dans le même esprit : « on nous a annoncé 4% d'intérêt au bout de cinq ans, mais on ne fait pas ça pour ça ! »

« Changer la vision de l'énergie facile »

Fondateur de l'AJENA, Jean-Pierre Bresson est tout sourire. « On s'est beaucoup appuyé sur les Bretons qui avaient levé très vite un million d'euros avec une quarantaine de clubs d'investisseurs... Ici, je me suis attaché à créer le premier club, ce sont des clubs familiaux... » Jean-Louis Dufour, le maire de Chamole, qui s'est très vite lancé dans la construction du projet, est également ravi : Passer par des clubs permet de rassembler le plus de monde possible, on y arrivera par grappe, il s'agit aussi de changer la vision de l'énergie facile ».

Pour Christophe Nouzé, implication citoyenne et acceptation du projet vont de pair. Le choix du site y est également pour quelque chose. Les éoliennes ne seront pas cachées à la vue, mais ne devraient pas être omniprésentes dans les champs de vision alentour.

Le contexte énergétique et politique joue aussi un rôle important. Le projet éolien s'inscrit dans le schéma régional air climat énergie (SRACE), déclinaison des objectifs tant nationaux que planétaires de mutation des énergies fossile vers les énergies renouvelables. Il s'inscrit également dans le processus, en partie contradictoire, de libéralisation du marché de l'énergie. L'obligation de rachat instituée par le Grenelle en 2008, censurée par la Commission européenne qui y voyait une entorse à la trop fameuse concurrence libre et non faussée, a été remplacée par un dispositif très proche, mais transitoire.

Source : schéma régional air climat énergie.

 

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