Ça barde pour le glyphosate

Quelques jours le refus du Sénat d'interdire les néonicotinoïdes en 2020, le collectif Une Franche-Comté sans OGM mobilise contre les pesticides. A Besançon, des étiquetages militants ont été effectués vendredi dans deux jardineries (photo ci-contre). Une marche contre Monsanto est programmée ce samedi 21 mai.

pesticides

Ce n'est peut être pas la semaine sans pesticide, mais elle doit se terminer, ce samedi 21 mai, par des marches contre Monsanto dans le monde entier. L'une des trente organisées en France se tient à Besançon et les militants ont commencé à faire entendre leur petite musique alternative ces derniers jours. A la manière des syndicalistes de la FNSEA débarquant dans les grandes surfaces pour poser des autocollants sur de la viande « d'origine inconnue » ou des produits laitiers d'industriels payant mal les producteurs, une dizaine d'activistes du respect des sols et de la santé se sont rendus vendredi 20 dans deux jardineries bisontines, une à Chateaufarine, l'autre à Planoise.

Un client à Jean-Paul Henry : « Je suis favorable à ce type d'action ».

Adhérents ou sympathisants de la Confédération paysanne et du collectif Pour une Franche-Comté sans OGM, ils ont mené une opération d'étiquetage sauvage des produits contenant du glyphosate, la fameuse molécule du célèbre roundup de la firme américaine Monsanto. Mais d'autres produits d'autres marques, européennes comme Bayer, étaient aussi visées. Lisant les composants des produits, ils ont placé chez Jardiland les suspects sur des charriots et distribué des tracts aux clients plutôt réceptifs.

« On dirige les clients sur les produits bio »...

« Je suis favorable à ce type d'action, il y a vraiment moyen de traiter son jardin différemment », dit l'un. « J'ai un brûleur, je paille mon potager... C'est dommage qu'on n'arrive pas à se passer de ce genre de choses ». Comment choisit-il ? « Je lis les étiquettes, j'essaie de prendre ce qu'il y a de moins nocif. Je ne suis pas bio à 100%, mais je ne prends pas de glyphosate. Je n'utilise pas de désherbant. On sait aujourd'hui le mal que ça fait ».

Faucheur volontaire d'OGM, Jean-Paul Henry avise le directeur du magasin à qui il explique l'action : « En France, on n'est qu'au début du roundup par rapport aux USA ou l'Argentine où, à moyen terme, on ne récolte plus sur des dizaines de milliers d'hectares. Le problème, c'est la force de communication de Monsanto... On ne va pas sortir les produits, mais ce serait bien que vous fassiez remonter notre action ». Venant d'un magasin de bricolage, le directeur n'est là que depuis six semaines, mais il connaît la problématique : « On n'est pas la première jardinerie visitée... En fait, on dirige les clients sur les produits bio ».

Le directeur du magasin : « On s'adapte aux consommateurs... »

Un coup d'œil au rayon des semences atteste ses propos. Un autre à celui des outils de jardin témoigne de l'évolution vers des pratiques plus douces pour le sol. Jean-Paul Henry poursuit :
« - Vous avez une belle quantité de rounup... »
« - On s'adapte aux consommateurs... »
« - Ce serait un geste fort de le supprimer... »
« - Sans doute... »

Nous lui demandons s'il s'est préparé à la prochaine mise sous clé des produits les plus polluants et nocifs ? « On y va, c'est qu'on nous disait quand j'étais en formation chez Bayer ». Jean-Paul Henry intervient : « chez les paysans, il y a une alternative aux désherbants, c'est la herse étrille...
« - C'est aux consommateurs de décider. Mais on donne consigne aux vendeurs de donner la priorité aux produits bio.
« - Où se placent les ventes de roundup ?
« - On en vend de moins en moins.
« - Si vous n'en vendiez pas, vous gagneriez des clients...
« - Je suis sûr qu'à terme, ça va disparaître...
« - Le professeur Séralini a prouvé sa toxicité... Les gendarmes sont d'accord...
« - Ils vont venir, on a la consigne de les prévenir... »

« Celui là est bien, il n'y a que de l'acide acétique. »

 A quelques pas, Henri Renaud continue son inspection et brandit, triomphal, un bidon : « Celui là est bien, il n'y a que de l'acide acétique. Je ne fais pas sa pub, seulement celle du composant. Il faut inciter les gens à lire les étiquettes ! » Puis il râle un peu : « c'est écrit sur le mode d'emploi qu'il faut s'équiper de protection, mais l'équipement n'est pas à côté... »

« Les médias devraient davantage mettre en valeur
ceux qui n'en vendent plus... »

La petite troupe conduit le charriot jusqu'aux caisses et l'abandonne. Les gendarmes ne sont pas en vue. Décision est prise de se rendre à Chrysopolis. Pendant le démontage de la banderole, un client pousse son charriot avec quelques plants à repiquer : « Je suis convaincu depuis longtemps que le glyphosate, c'est de la merde. Leroy-Merlin n'en vend plus depuis longtemps, les médias devraient davantage mettre en valeur ceux qui font ce genre de choses ». Sans doute, mais on touche là à la dépendance de certains aux annonceurs...

Quelques minutes plus tard, les militants sont à Planoise. « C'est où le roundup ? », demande L'un d'eux en entrant dans le hall. Les pesticides sont tout au fond d'une allée, beaucoup moins visibles que dans le premier magasin : « Tiens, il y en a moins... Ah, et les équipements de protection sont juste à côté, c'est bien... »

Le roundup n'est pas en tête de gondole !

Le directeur arrive, l'air soucieux : « Je suis choqué par l'ampleur de l'équipe, vous êtes plus nombreux que les vendeurs... On a mis le rayon phyto autour des engrais, on n'est pas prescripteur... » Les militants tentent de le rassurer, il n'y pas de violence, il répond : « Je n'ai pas peur de la discussion, je suis d'accord avec vous... » pourquoi a-t-il un peu de glyphosate ? « On est indépendant, le magasin appartient à des horticulteurs qui sont plus que sensibles sur la question, qui voient partir leurs potes de cancers... »

« Pourquoi en vendre encore ? », demande un militant.
« - Si vous saviez ce que c'est que faire tourner un magasin de dix personnes... On essaie de bien faire, on n'a pas de roundup en tête de gondole. Je suis soumis à certiphyto qui audite le rayon tous les deux ans... Nos vendeurs sont formés et quand on a des solutions opérantes, on oriente vers le bio.
« - Les ventes augmentent globalement de 5 à 10% par an...« - Ce n'est pas là qu'il faut chercher, le marché des particuliers représente 10%... On a ces produits, mais ce n'est pas une stratégie...
« - Quel est votre chiffre d'affaires sur le roundup ?
« - Mais c'est rien, si on vend 24 ou 36 boîtes par an, c'est un maximum... »

Fin de la visite.

 

 

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