Avec 2500 manifestants en Franche-Comté dont 450 à Besançon, 300 à Montbéliard dont 120 salariés de PSA, on hésite à parler de franche réussite de la mobilisation de ce jeudi 26 mai. Surtout que l'intersyndicale, CGT en tête, paraît engagée dans un rapport de forces qui pourrait laisser des victimes sur le pavé : Manuel Vals s'il cède ne serait-ce que d'un pouce, ou une grande partie du salariat qui voit de réforme en réforme ses droits actuels et anciens rognés plus vite qu'il n'en acquière de nouveaux.
Car personne ne conteste que le travail change, que le rapport au travail évolue. Restent les rapports salariés-employeurs qui restent définis à la fois par une communauté d'intérêts (l'entreprise doit marcher) mais aussi par des divergences. Restent le travail en miettes, parcimonieusement distribué, mal partagé, l'important turn-over dans les tâches mal payées ou peu intéressantes, une forme d'objection de conscience d'une partie de la jeunesse qui refuse la perspective d'emplois, voire de métiers éthiquement discutables...
Peu de manifestants, mais déterminés. A Besançon donc, ils ont bloqué dès 8 heures 30 le carrefour du boulevard Kennedy et de la rue Jouchoux où se tient le siège du Medef régional. Ironie de l'histoire, Auguste Jouchoux fut responsable de la CGT au début du siècle dernier, mais aussi socialiste... Des militants soulignent aussi que les salariés qui manifestent une fois ne le font pas forcément systématiquement.
De fait, l'observateur du mouvement dans la durée constate que de nouvelles têtes apparaissent à chaque fois. Il serait hasardeux de penser que ceux qui renoncent une ou plusieurs fois à défiler sont soudain convaincus par la loi travail ! Globalement, le nombre de personnes qui auront manifesté s'accroît à chaque mobilisation.
Vers 11 heures, le rassemblement bisontin s'est un peu étoffé et l'attroupement s'est déplacé devant l'immeuble du syndicat patronal dont l'entrée était gardée par des policiers du Groupe départemental d'intervention, casqués et munis de boucliers. Joyeusement chahutés par des slogans (« combien on vous paie pour faire ça ? », « assez gazés, assez matraqués »), ils n'ont pas bronché et les manifestants ne se sont pas approchés : le face à face s'est déroulé sans incident.
Un cortège s'est ensuite rendu devant Micropolis où la rocade a été bloquée plusieurs dizaines de minutes, ainsi que la rue de Dole. Chemin faisant, ils sont passés sous les fenêtres des trois tours de la cité de l'Amitié, quartier populaire s'il en est.
Le mouvement anti loi travail compte-t-il pour l'instant sur le fort pouvoir de pression des salariés des raffineries de pétrole ? Sans doute. Des responsables CGT nous expliquaient aussi qu'on embarque pas l'ensemble des salariés dans des blocages loin des traditionnels lieux de ralliement, en des lieux compliqués d'accès, mais plutôt des militants. La démonstration de force populaire est-elle repoussée à la manifestation parisienne du 14 juin ? Est-ce pour cela que les mêmes nous disaient qu'il fallait « économiser » les forces pour que le mouvement dure ?
Pour l'heure, s'ils peinent à trouver des cars pour la capitale, ils se préparent à accueillir la ministre du travail qui vient inaugurer une école de cuisine vendredi à Palente, dans l'ancienne usine Lip. Un symbole dans lequel la CGT voit une « provocation de la classe ouvrière » de la part de la « ministre fossoyeur du code du travail ».
Quoi qu'il en soit, la CFDT et la CGT ont obtenu audience auprès de la ministre, mais séparément... Mais un nouvel appel à manifester est lancé pour 17 h devant le bowling.