Tribunal administratif : les « contentieux étrangers » ont doublé en cinq ans

L'augmentation de l'activité de la juridiction compétente pour les quatre départements comtois est largement indexée sur les conséquences du désordre international. Les contentieux sont également en hausse dans la fonction publique et le droit de l'urbanisme...

ta

Ouverts et à l'écoute. Voilà ce que le président du Tribunal administratif de Besançon, Xavier Faessel aimerait que soient les magistrats de sa juridiction, a-t-il assuré jeudi 4 octobre lors de la traditionnelle rentrée solennelle au cours de laquelle il a présenté l'activité de l'année écoulée. « La compassion et l'arrogance sont sœurs jumelles, comme disait Baudrillard, ne soyons ni l'un ni l'autre », a-t-il ajouté avec une certaine assurance : « quand nous jugeons, nous parlons de choses que nous avons expérimentées ou vécues... »

Voire ! Mais place aux chiffres...

Les « entrées », autrement dit les nouvelles procédures, ont augmenté de 3,4%, passant de 2145 à 2218 pendant que les « sorties » croissaient de 9,4%, passant de 2120 à 2319. Il en résulte une diminution du « stock » d'affaires en attente de 5,4%, essentiellement due à celle de 41% du nombre d'affaires de plus de deux ans. Conséquence : hormis les urgences, le délai moyen de jugement est passé d'un an 8 mois et 25 jours à un an 8 mois et 17 jours. Ce n'est pas très spectaculaire si l'on compte en jours : il en fallait 635, il en faut 627...

Ce qui est en revanche marquant, c'est la forte augmentation du nombre de contentieux relatifs à la situation des étrangers : + 10% en un an, ce qui conduit à 40% du total des dossiers traités entre le 1er septembre 2017 et le 31 aout 2018. Pour le président Faessel, cet accroissement du contentieux étrangers n'est « ni un bien ni un mal, mais le reflet des problèmes de la planète ».

Explosions des contestations de placements en rétention

En cinq ans, le nombre de procédures a doublé, passant de 302 dossiers en 2013 à 620 en 2018. Les contestations d'obligation de quitter le territoire français (OQTF) sont passées dans le même temps de 297 à 508, avec un seul tassement entre 2016 et 2017. Les contestations de placement en rétention, les procédures 72 heures, délais dans lequel la décision doit être rendue, ont explosé. Il y en avait trois en 2013, une en 2014, 22 en 2015, 65 en 2016, 82 en 2017, 112 en 2018.

Un militant associatif accompagnant les étrangers estime pour sa part que cette augmentation est surtout due « au fait que la préfecture prend des arrêtés illégaux ». Reste que le TA n'indique pas la part d'annulations et de confirmations des décisions préfectorales.

« Quand le contentieux urbanisme va, le bâtiment va... »

Autre contentieux en augmentation, ceux concernant la fonction publique (+34%), la police (+54%) ou encore le droit de l'urbanisme (+20%). Le magistrat estime « peu significative » l'évolution du champ police en raison du faible nombre de dossiers. Quant au contentieux fonction publique, alimenté par des contestations d'agents de décisions hiérarchiques, il y voit la résultante du recul de l'âge du départ à la retraite : « quand on garde les gens plus longtemps, s'accentue le poids des années ou de la charge de travail... » Enfin, les litiges en droit de l'urbanisme seraient selon lui une bonne nouvelle économique : « c'est un marqueur de l'activité de la construction : quand le contentieux urbanisme va, le BTP va... »

Le président Faessel est enfin revenu sur deux affaires particulièrement médiatisées que le TA de Besançon a eu à traiter. La juridiction a ainsi tranché en faveur de « l'accueil de tous » [ceux qui le souhaitent] à la restauration scolaire » après qu'une maman bisontine eut contesté l'exclusion de son fils de la cantine de l'école Paul-Bert. La ville a formé un appel, ce qui fait dire au magistrat : « on verra si nous avons bien travaillé ».

La carrière de Ternuay arrêtée...

Quant à « l'arrêté municipal sur la sollicitation de la charité publique », plus communément appelé arrêté anti-mendicité pris par le maire de Besançon Jean-Louis Fousseret, le président du TA a résumé l'interprétation qu'en avait faite sa juridiction : « d'accord avec la fraternité comme liberté fondamentale, mais elle n'est pas méconnue à Besançon ». Au premier rang, Fousseret n'en perd pas un mot. Le magistrat s'adresse à lui : « Que le maire de Besançon ne soit pas blessé qu'on en parle... Nous n'avons pas toujours rendu des décisions en sa défaveur... »

Autre décision importante, cette fois en matière environnementale, prise lors de l'année juridique écoulée : la suspension par le juge des référés, le 19 décembre 2017, d'un arrêté de la préfète de Haute-Saône autorisant l’exploitation d’une carrière à Ternuay-Melay-et-Saint-Hilaire. Il a ainsi fait droit à la demande de l’Association de sauvegarde du plateau des 1000 étangs et de la haute vallée de l’Ognon, ce qui impliquait l’arrêt des travaux.

 

 

Newsletter

Lisez la Lettre de Factuel

ABONNEZ-VOUS À LA NEWSLETTER !