Toute la CGT de PSA à Vesoul en vain pour garder les 35 heures

Des délégations sont venues de Poissy et Valenciennes, Mulhouse et Sochaux car la crainte des salariés est réelle de voir généralisé au groupe le passage de 35 heures à 37 heures 45 avec une hausse de salaire inférieure à celle de l'augmentation du temps de travail accepté par FO, CFTC et CFE-CGC moyennant une prime. Les ordonnances Macron-Pénicaud facilitent les projets du groupe alors que la métallurgie allemande vient de passer aux 28 heures...

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Il est un peu plus de 15 heures sur le parking du CE de l'usine PSA de Vesoul. Les délégations CGT des autres sites du groupe reprennent la route. Si les militants sont venus de Valenciennes ou Poissy, de Mulhouse ou Sochaux, c'est que les salariés de l'usine haut-saônoise sont sous haute pression. « Voir l'implication des autres sites, ça fait plaisir », sourit Gregory Grosjean, délégué local.

La direction vésulienne a proposé il y a un mois aux salariés de passer de 35 à 37 heures 45 avec une augmentation salariale de 2,8%, inférieure à l'augmentation du temps de travail (7,8%). Le groupe invoque la nécessité de nouveaux efforts pour les salariés, le site n'étant plus concurrentiel donc menacé. Refrain connu. Il doit quand même passer par une négociation, table sur une faible résistance des salariés. Mais son plan ne passe pas comme une lettre à la poste. Ce jeudi 14 juin, pour la cinquième réunion avec les syndicats FO, CFTC et CGT, un quatrième débrayage était initié par la CGT.

« On est 35 aujourd'hui, c'est l'atelier de couture qui a le plus bougé », dit Cédric Fischer, le délégué CGT, « on était une centaine la première fois, 24 la deuxième fois, à nouveau 100 la troisième... » Cela semble peu au regard des quelque 3000 personnes travaillant sur le site, dont 2000 permanents, 500 intérimaires et des sous-traitants... « Notre pétition a obtenu 700 signatures, c'est le triple des voix qu'on a eu aux élections d'avril », ajoute Cédric Fischer qui sait que « pour la direction Vesoul est un site tranquille ».

Attendre la fin du cycle électoral...

Tranquille justement parce que les élections sont passées. « A Vesoul, le vote est récent, ils pensent qu'ils peuvent attaquer », analyse Julien Wostyn, délégué CGT à PSA-Mulhouse où les élections auront lieu en février 2019. Auparavant, il y aura celles de Rennes en septembre et de Sochaux en décembre. « Toutes les usines du groupe vont voter et ils ne remettront pas en cause les 35 heures avant l'élection... Ils vont attendre la fin du cycle électoral... »

Car les syndicalistes en sont persuadés, le projet d'accord vésulien est un galop d'essai. « On est venu en soutien, mais ça peut aussi concerner Sochaux où la direction remet en cause les horaires de week-end. Il est question de travailler 28 heures payées 24 », souligne Aurore Métais, une des secrétaires du syndicat CGT de l'usine historique.

A Poissy, dit Jean-Pierre Mercier, le délégué syndical central CGT du groupe, l'annonce du projet de Vesoul « a été un choc, les gars n'y croyaient pas... Le groupe a 47.000 CDI et 10.000 intérimaires... Ils ont supprimé 25.000 CDI en cinq ans pendant qu'on passait de 860.000 voitures construites par an à 1,1 million... »

Dans un bref discours à la quarantaine de militants, il défend l'idée que « les milliards de bénéfice de PSA doivent servir à l'emploi... » La pétition réclamant le maintien des 35 heures à Vesoul a également été signée dans les autres usines du groupe. Au total, il annonce 10.200 paraphes qu'il confie aux cégétistes locaux, pas mécontents du coup de pouce.

« Si Peugeot y passe, les autres suivront : Renault, Toyota... »

Tous savent que peut ensuite s'enclencher un effet de dominos. Non seulement au sein de PSA, mais dans la branche automobile et toute la métallurgie dont la convention collective est en renégociation. « C'est une attaque de portée nationale. Si Peugeot y passe, les autres suivront : Renault, Toyota... Cela concerne tous les travailleurs et au-delà : c'est la direction de PSA qui mène la délégation de l'UIMM sur la convention collective », ajoute Jean-Pierre Mercier.

Dans le projet d'accord soumis à la signature des syndicats de Vesoul, figurent également en toutes lettres les dispositions issues de la loi travail et des ordonnances Macron-Pénicaud : « en cas de refus [par un salarié de voir l'accord s'appliquer à lui] le contrat de travail pourra être rompu pour un motif spécifique constituant une cause réelle et sérieuse de licenciement ».

Le texte proposé le matin aux syndicats présentait quelques évolutions par rapports aux précédentes moutures. Les premières réunions avaient vu passer l'augmentation salariale de 2,86% à 3,1% pour 7,8% d'augmentation du temps de travail. C'était évidemment insuffisant. Lors de la troisième réunion, la direction a accepté de revoir à la hausse le taux des heures supplémentaires, mais avec le lissage, le compte n'y était toujours pas. 

FO a demandé une prime annuelle de 200 euros pour signer. « Ça coûtait 1,320 million, mais la direction a trouvé ça démesuré », rapporte le délégué syndical FO Sébastien Galmiche. Le syndicat accepte alors de différer sa demande à trois, ce qui ne coûtait plus que 400.000 euros. Nouveau refus de la direction qui a proposé jeudi matin 100 euros bruts, ce qui met Sébastien Galmiche en colère. « Ils se foutent de notre gueule », lançait-il au téléphone au délégué syndical central Christian Lafaye, sur la route en train de rouler vers Vesoul pour rencontrer le directeur du site...

En début de soirée, une sixième réunion se concluait par la signature de l'accord avec FO, CFTC et CFE-CGC contre une prime variable dès 2019. « Pour la pérennité du site », assurait FO.

 

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