Sanctions judiciaires pour six étudiants et une lycéenne à Besançon

L'occupation du conseil d'administration de l'université, en février 2017, avait été présentée comme une séquestration par la présidence de l'université, la police et le parquet. Des étudiants sont condamnés pour dégradation. Ayant subi lésions et bleus lors de son interpellation par cinq policiers, en mai devant le lycée Pasteur, une lycéenne poursuivie pour violences aux forces de l'ordre, devra payer des dommages et intérêts pour outrage...

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La montagne a-t-elle accouché d'une souris ? Deux interventions énergiques de la police nationale à Besançon, contre des étudiants le 14 février 2017, contre des lycéens le 9 mai, ont connu ce jeudi 8 mars une conclusion se soldant par des sanctions judiciaires sans commune mesure avec les premières qualifications officielles des faits. La séquestration en réunion dans le premier cas est devenue une dégradation en réunion. De violences et outrages aux forces de l'ordre dans l'autre, la justice n'a gardé que l'outrage...

Le 14 février, dix-neuf étudiants faisaient irruption dans la salle du conseil d'administration de l'université de Franche-Comté. Avant même que le séance débute, ils entendaient perturber l'instance dirigeante qui devaient adopter des dispositions dont ils critiquaient l'orientation, notamment la sélection en master. Le siège de l'université était alors bouclé, se transformant en souricière : les forces de l'ordre intervenaient, certains policiers en tenue commando, pour extirper manu-militari les perturbateurs qui étaient alors placés en garde-à-vue.

Trois étudiants ont refusé de plaider coupable

Le président de l'université a finalement retiré la plainte pour séquestration qu'il avait déposée, mais l'information judiciaire du parquet s'est poursuivie et neuf étudiants étaient convoqués jeudi 8 mars au matin pour une composition pénale par le délégué du procureur. Autrement dit, une procédure de reconnaissance de culpabilité pour dégradation en réunion que six ont acceptée, moyennant une condamnation symbolique à suivre un stage de citoyenneté d'une journée leur coûtant 150 euros. Trois étudiants ont refusé et passeront donc en correctionnelle.

Il faut souligner que les étudiants poursuivis avaient un temps envisagé une plainte civile contre l'Etat pour préjudice moral pour avoir subi des gardes à vue sans proportion avec les faits reprochés. Ils avaient trois mois pour le faire et ont renoncé. Les jours ayant suivi l'occupation du conseil d'administration, des témoignages d'administrateurs avaient largement battu en brèche la version officielle. Le recteur était même intervenu pour calmer le jeu, obtenant l'abandon de la saisine du conseil de discipline de l'université. 

Reste le sort des occupants du conseil non convoqué en composition pénale. On parle de comparution en correctionnelle, ce que nous n'avons pu vérifier ce jour, la procureure n'étant pas joignable.

Relaxée des poursuites pour violences à agents

Le 9 mai, deux jours après le second tour de l'élection présidentielle, le lycée Pasteur est bloqué dès 7h30 par des lycéens qui veulent parler politique. Il en reste une vingtaine, vers 14 h, quand la police intervient et demande que le passage soit libéré. Une lycéenne assise sur une poubelle refuse de bouger, elle est, selon des témoins, jetée à terre et tirée par les cheveux. C'est à ce moment que Louna, qui ne participe pas au blocage, s'énerve devant cette violence et s'intègre au dispositif de blocage. Elle est alors poussée contre un mur par cinq policiers, menottée, jetée dans un fourgon. Dans la mêlée, elle donnera un coup de pied et passera deux heures et demi en garde à vue.

S'appuyant sur un certificat de la médecine légale où sa mère l'a faite examinée, elle songe porter plainte pour violence, mais ne le fait pas. Elle est en revanche convoquée, fin mai 2017, pour une composition pénale, mais elle refuse le deal proposé par le parquet. Conséquence, elle comparaissait ce jeudi 8 mars devant le tribunal correctionnel. Le parquet a réclamé 800 euros d'amende dont la moitié avec sursis, deux policiers parties civiles ont réclamé 150 euros de dommages et intérêts chacun. 

Son avocat, Me Yacine Kakkar, a plaidé la relaxe de l'incrimination de violences à agent, soulignant qu'aucun des policiers s'étant plaint, l'un d'un coup de pied, l'autre d'un coup de dents, n'a produit de certificat médical. Alors que Louna a bel et bien fait constater des bleus et des lésions aux membres pour avoir été menottée très serrée et avoir été matraquée. Il a aussi évoqué le contexte des « relations étudiants-police nationale pas très bonnes à Besançon ». Et si Louna a donné un coup de pied, c'est « pour se dégager ».

Tout juste majeure, la jeune fille a cependant été jugée coupable d'outrage pour avoir lancé « enculés ». Elle dit pour sa part être choquée d'avoir été traitée de « pouffiasse » par un policier. Sur une vidéo, on entend l'un d'eux dire également « au boulot les gauchos ! ». Louna a été condamnée à verser 100 euros de dommages et intérêts aux deux policiers et à effectuer un stage de citoyenneté, mais la condamnation ne figurera pas au B2 de son casier judiciaire...

Sortant de la salle d'audience, elle se demandait, avec sa famille et son avocat, si elle allait faire appel. Apprenant l'existence d'une vidéo de l'interpellation, Me Hakkar regrettait ne pas l'avoir vue pour éventuellement la faire visionner à l'audience.

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