Rachel Messousse (FO-25) : « il y aura des recours aux Prudhommes »

L'opposition au passe sanitaire s'exprime de plus en plus vivement et les syndicats FO, FSU, et Solidaires ont lancé un préavis de grève couvrant les salariés du Doubs depuis le 5 août. Il ne semble pas encore avoir suscité de mouvement. Ces trois syndicats et la CGT ont également lancé un appel pour un accès libre à la culture en programmant un rassemblement devant le centre Mandela de Planoise pour jeudi 2 septembre.

La mobilisation contre la politique sanitaire du gouvernement, plus particulièrement à la loi du 5 août qui instaure le passe sanitaire et l'obligation vaccinale dans certaines professions, prend-elle de l'ampleur ? Après des manifestations inédites au cœur de l'été, les initiatives syndicales se multiplient pour la rentrée. Lundi 30 août, à l'appel de trois syndicats de fonctionnaires territoriaux (CGT, Solidaires, UNSA) de l'agglomération bisontine, une trentaine de personnes se sont retrouvées sur l'Esplanade des droits de l'Homme. Jeudi 2 septembre, quatre organisations (FSU, FO, Solidaires et CGT) invitent à un rassemblement à Planoise devant le centre Nelson-Mandela qui comprend notamment une médiathèque. Il s'agit notamment de défendre « un accès libre à la culture (médiathèques, bibliothèques, salles de spectacles), au sport, aux loisirs tout en maintenant une protection sanitaire ». Nous avons demandé à Rachel Messousse, secrétaire départementale de FO du Doubs, comment elle analyse la situation.

D'abord, quelle est la position de FO ?

Nous sommes contre le passe sanitaire et contre l'obligation vaccinale. Nous ne sommes pas contre le vaccin : chacun devrait être libre de se faire vacciner ou pas. Ce qui nous révolte, c'est cette façon de diviser les salariés entre vaccinés et non vaccinés. Ce qui ne passe pas, c'est que les non vaccinés n'ont droit à rien. Si le gouvernement est réjoui de faire comme ça, il est hors de question que nous nous laissions faire.

Allez vous utiliser les armes juridiques qui permettent de s'opposer à certaines disposition de la loi du 5 août qui n'a pas aboli le droit du Travail ?

On est dans le flou... Par exemple, le gouvernement dit qu'il n'y aura pas de licenciement. Or, le Conseil constitutionnel a dit que si un salarié n'est pas vacciné, il pourra prendre des congés ou voir son contrat de travail suspendu sans salaire. Mais trois jours après la suspension, l'employeur doit envisager un reclassement, sinon une rupture selon les procédures communes. Cela signifie un licenciement et ça peut être très rapide. Prenez l'exemple d'un EHPAD privé où la loi du 5 août dit qu'un infirmier doit être vacciné. S'il ne l'est pas, comment le reclasser ?

Pourrez vous invoquer l'absence d'information, ou d'avis, du CSE, le comité social et économique, que les employeurs sont tenus d'effectuer sur les mesures d'application de la loi du 5 août  ?

Oui, mais ça fonctionne quand il y a CSE ! Il n'y en a pas dans de nombreux endroits, comme les petits restaurants...

Vous appuierez-vous, en droit, sur les atteintes au secret médical dont la loi du 5 août semble faire peu de cas ? Un employeur n'a par exemple pas le droit de demander directement au salarié s'il est vacciné, mais doit en principe en passer par le médecin du Travail qui dira seulement si le salarié est apte ou pas.

Oui, ça peut donner du temps si recours aux prudhommes il y a, et il y en aura. Nous avons déjà été interpellés par un salarié de la restauration ne voulant pas se faire vacciner. Nous allons déposer des dossiers de secret médical et de licenciement... On n'a pas fermé cet été pour que les salariés en souffrance viennent nous voir. La loi est très vicieuse : elle liste les salariés avec une obligation vaccinale, mais aussi les établissements où les visiteurs doivent être vaccinés, comme les restaurants... On nous dit que le chômage diminue, mais je ne le vois pas. Et il y a enfin la réforme de l'assurance chômage qui arrive le 1er octobre et pénalisera les salariés qui perdront jusqu'à 17% de leurs indemnités...

Pensez-vous utiliser des arguments comme le caractère expérimental des vaccins ou les effets secondaires ? Les personnes se faisant vacciner doivent signer une décharge indiquant qu'elles ont été bien informées et que leur consentement est libre et éclairé, mais on a vu que l'ARS de Bretagne a demandé au centre de vaccination de Quimper de retirer l'information complète que ses médecins donnaient aux personnes, par exemple une efficacité à 95%, mais aussi une absence d'étude concernant les femmes enceintes...

En effet, on n'a pas de recul... D'un côté, on signe une décharge, de l'autre on est sujet à obligation ! Cela veut dire que l'Etat ne sera pas responsable en cas de souci...

Les recours au droit sont-il jouables ?

Des dossiers arrivent, les juristes regardent... Par exemple, le Conseil européen n'avait pas conseillé l'obligation vaccinale : cela a-t-il force de loi ou est-ce seulement un conseil ? Eh bien, c'est seulement un conseil...

Combien avez vous de dossiers ?

Quatre pour le moment à Besançon.

Et les autres syndicats ?

Je ne sais pas... On a tous la tête dans le guidon. On a déjà tenu deux ou trois réunions intersyndicales depuis début août...

La fédération santé-sociaux CGT a lancé un préavis de grève nationale... FO l'a-t-il fait ?

Oui, en intersyndicale avec la FSU et Solidaires, nous avons lancé un préavis illimité sur le Doubs depuis le 5 août pour l'ensemble des scteurs.

Cela signifie-t-il que tous les salariés sont couverts par ce préavis ?

Oui. Et cela nous permet de soutenir toutes les grèves qui peuvent avoir lieu dans le département.

Il y en a beaucoup ?

Je n'ai pas de retour, mais ça va venir... Je reviens à l'action de jeudi 2 devant le centre Mandela : il faut le passe sanitaire pour lire des bouquins ! Il n'y aura plus d'accès à la culture, c'est innommable.

Sollicitez vous la CFDT ?

Oui, ils ne répondent pas.

Percevez-vous des inquiétudes de la part des employeurs ou des professions libérales ?

Oui. Un médecin ou un pharmacien non vacciné est suspendu, et l'ARS informe les ordres professionnels... Le serment d'Hippocrate n'est plus là, ils ne peuvent plus soigner des gens non vaccinés.

On peut quand même aller voir son médecin sans être vacciné !

Le médecin traitant, oui. Mais s'il demande des examens complémentaires ? Sans test ou sans vaccin, ce sera impossible de faire un scanner. Et le test PCR va coûter 50 euros le 15 octobre... Macron devrait se méfier.

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