Le désir plutôt que le projet

A part le saut générationnel, on voit mal ce qu'il y a de changé dans la pratique du pouvoir.

Ceux qui pensaient avoir le changement sont servis. Ils ont la continuité.

A part le saut générationnel, on voit mal ce qu'il y a de changé dans la pratique du pouvoir propre à la 5e république.

C'est même pire. Autoritarisme, formules creuses, jouissance du faste désuet de la fonction, politique brutale à l'égard des classes moyennes et populaires, dictats financiers en direction des collectivités locales, humiliations, provocations à l'égard des élus et des corps intermédiaires, agenouillisme devant la divinité de la dette méthodiquement creusée depuis des lustres par les privilèges fiscaux accordés au capital et poussant aux privatisations des communs... On en passe, on en oublie...

On assiste non seulement à la continuité de la politique qui échoue depuis trente ans en matière d'emplois, d'industrie, d'agriculture, d'environnement, d'éducation ou de démocratie, mais à son aggravation au nom des orientations européennes ultra-libérales. Celles-ci réussissent ce pour quoi elles sont conduites : creuser les inégalités, accroître le tas d'or des rentiers, alimenter la machine à construire et entretenir des bulles spéculatives de toutes sortes. Tout ce que sait faire à merveille l'industrie financière dont le représentant, désormais à l'Elysée, entend capter pour Paris une part de celle qui va quitter Londres après qu'elle a ruiné l'économie britannique réelle et épuisé les Anglais...

Nous avons dû supporter les caprices de Sarkozy dont les outrances verbales nous ont fait honte, dont la désastreuse politique lybienne a aggravé les maux de la Méditerranée dont il prétendait vouloir l'union... Nous avons soupiré face aux volte-face et aux faux-fuyants de Hollande dont la superficialité gestionnaire a fini par consterner...

Macron est leur synthèse et tente de faire croire qu'il est leur antithèse. Mais il leur ressemble. Tous ont été dépassés, dévorés, par des institutions dépassées depuis des années. Il se pense gaullien, il n'a qu'un projet comptable, désincarné, virtuel, à mille lieux d'une civilisation humaniste. Il accélère la construction du nouvel ordre féodal notamment théorisé à la fin du siècle dernier par feu Bernard Marris et Philippe Labarde dans Ah dieu ! Que la guerre économique est jolie !.

Comme le dit aussi, et simplement, le titre d'un roman de Milan Kundera, la vie est ailleurs. Dans le désir plutôt que dans le projet.

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