La Conf’ ratisse plus large que le monde paysan

Plusieurs centaines de personnes ont découvert le petit village de Communailles-en-Montagne, entre Mignovillard et Nozeroy où la ferme du Soleil levant accueillait dimanche 15 mai la fête de la Confédération paysanne du Jura. Produits bio et locaux, mise en boîte théâtrale de la PAC, stands militants...

conf-transmission

Sylvie et Henri Ratte traient chaque jour 35 vaches laitières à Communailles-en-Montagne, un petit village d'une cinquantaine d'habitants aux confins du Jura et Du Doubs. La production annuelle de 240.000 litres de lait est transformée en comté et morbier par la coopérative des plateaux de Nozeroy. Avec 65 hectares de pâturages, ils sont à la tête d'une exploitation qu'un Breton ou un Normand considérera extensive : un peu moins de 3700 litres par hectare, ils sont 20% sous le maximum autorisé par le règlement d'AOP comté. Avec 0,54 vache à l'hectare, ils sont loin du seuil d'une vache par hectare édicté par le même règlement.

Cela dit, au regard du modèle d'analyse des fermes à comté développé par les agronomes Mathieu Cassez et Christian Barnéoud, la Ferme du Soleil-levant fait paradoxalement partie des plus intensives. Qui l'aurait cru avec 6.857 litres par vache et par an ?

Transmettre une ferme...

Engagés dans la coopérative, Henri et Syvie Ratte le sont aussi à la Confédération paysanne du Jura où Henri siège au conseil d'administration. Aussi, quand il a fallu trouver une ferme pour accueillir la fête annuelle du syndicat, les Ratte ont accepté d'être les hôtes de l'événement. D'autant plus que le thème, la transmission, est leur préoccupation du moment.

Passer le témoin n'a rien d'anodin. Il faut estimer les coûts, du bâtiment au matériel, du troupeau, de mille détails...Trouver le repreneur n'est pas pour eux un problème, le fils est partant. D'autant plus facilement qu'à 28 ans, il a eu le temps de voir ailleurs, d'essayer le salariat, et finalement, il se lance en connaissance de cause : « il aurait eu 20 ans, je n'aurais pas été trop d'accord », dit Henri. En outre, la conjoncture économique est favorable dans la filière comté : c'est plus facile de s'y installer que tenter de produire du lait standard...

Voisins, amis et sympathisants

La fête de la Conf', ce n'est pas qu'une affaire de paysans. Plusieurs centaines de personnes sont venues dimanche 15 mai, faire un tour, voir du monde, partager un repas champêtre ou une fondue, faire quelques provisions de produits bio. On croise des militants venus pour certains de l'autre bout du Doubs, comme Pascale et Patrick Jeannin. Il y a des sympathisants, les amis de Terre de lien, des vignerons, des maraîchers. On y rencontre des voisins, comme Alain Mathieu, le président de la fédération des coopératives laitières du Jura, des presque voisins comme Gérard Coquard, de la commission lait de la Conf, président de la coop d'Arc-sous-Montenot.

On croise aussi des tas de gens pour qui les questions agricoles sont des questions politiques, dans le sens où elles engagent des choix de société. C'est ainsi qu'Attac y a un stand : point commun entre l'association et le monde paysan du massif jurassien, au-delà de la Conf', une opposition commune au Tafta, le projet de grand marché transatlantique. Le Tafta est d'ailleurs l'une des vedettes du spectacle commandé par la Conf' à la compagnie de la Carotte en 2008 sur la politique agricole commune, la PAC.

Monstre Santo et l'Ogre MC
face à Pacman...

Pacman (comme Superman ou Batman) n'avait été joué qu'une fois, il l'a été une seconde, enrichi des dernières évolutions. Sur un mode burlesque, les trois comédiens racontent l'histoire de la PAC, de son difficile accouchement en 1957 à ses évolutions successives. Ils schématisent les règlements, les discussions entre pays européens, la construction des quotas et leur démontage, les primes diverses...

Ils évoquent les interactions avec l'Ogre MC et Monstre Santo qui font écrouler de rire le public conquis assis sur des bancs et des bottes de paille. Chacun reconnaît les caricatures, plus vraies que leurs modèles, de l'OMCl'Organisation mondiale du commerce et du fabriquant de pesticides Monsanto. Ce sont eux qui grognent contre le plafonnement des aides, ce qui fait réagir Pacman : « mais que va dire la Conf' ? » Avis aux amateurs, La Carotte qui travaille à un spectacle militant sur le Tafta, étudie toute proposition de programmation.

Attention avant d'adopter
un border-coolie !

Quand on interroge Nicolas Girod, le président de la Conf' du Jura, sur l'actualité du syndicat, c'est encore du Tafta dont il est question : « J'ai récemment vu Jean-Charles ArnaudPatron de Juraflore, président du conseil permanent de l'Institut national de l'origine et de la qualité. Je le trouve un peu en retrait sur le sujet, l'INAO est seulement dans la protection des noms... Heureusement, il est d'accord pour qu'on renforce le cahier des charges du comté ».

Le sympathique border coolie, fameux chien de conduite de troupeau, est la vedette américaine de la fête. Bernard Gros et Félix Saliot, de l'association comtoise des chiens de troupeau, font des démonstrations très suivi de guidage de brebis suitées (avec agneaux) et d'oies. On est admiratif devant l'efficacité du chien If à faire faire un parcours en slalom aux oiseaux qu'il finit par mener dans un petit enclos.

« Le border est beaucoup plus apte à garder que comme animal de compagnie », souligne Bernard Gros, « il est programmé, sélectionné depuis plus d'un siècle par les Britanniques, pour rabattre des bêtes vers le chef de meute... S'il ne le fait pas, il fait des conneries ». Celle que peuvent faire les humains séduits par son côté amical est de l'adopter trop jeune. Mieux vaut attendre et en choisir un qui ne soit pas fait pour les moutons... C'est rare, mais ça arrive, et justement, l'association les a repérés...

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