La CGT de Franche-Comté a perdu 200 adhérents en 2013

A Dole, la conférence régionale du syndicat a traité des enjeux de la réforme territoriale, de la résignation qui semble saisir les salariés, de la négociation sur le passeport professionnel ou des mobilisations réussies qui obtiennent parfois des résultats.

Dans la fournaise de la mezzanine du manège de Brack.

Pour la première fois depuis les années 1990, la CGT a enregistré une baisse du nombre de ses adhérents en Franche-Comté en 2013, passant de 9215 syndiqués en 2012 à 9036. L'année comptable 2014 se terminant fin 2015, on verra alors si le déficit provisoire de 700 adhérents est ou non comblé.

En ouvrant la conférence régionale de la CGT, lundi 8 juin à Dole, le secrétaire du comité régional Michel Faivre-Picon a donc exhorté ses camarades à « être plus offensifs pour proposer l'adhésion, améliorer notre qualité de vie syndicale pour garder nos adhérents » et les syndicats d'entreprises à « régler dans les délais [les cotisations] afin que nous n'ayons pas une deuxième année de baisse ».

La litote de la « marge de progression »

Quand on l'entend également regretter que le magazine national de la CGT, la Nouvelle vie ouvrière, n'ait dans la région que 397 abonnés dont un syndicat sur trois, souligner que 1,92% des salariés adhèrent à la CGT, on réalise que la principale organisation de résistance à l'ultra-libéralisme, qui va bientôt fêter ses 120 ans, est un colosse aux pieds d'argile. « On a de la marge de progression », dit-il en une litote qui peut faire sourire.

Grève annoncée à Familles Rurales Doubs lundi 15 juin
Le syndicat CGT des services à la personne appelle les 227 salariés, dont 180 femmes, de la fédération du Doubs de Familles Rurales à cesser le travail lundi 15 juin. Selon Élisabeth Nédelec, la déléguée syndicale, 70% sont sur des contrats précaires et/ou des temps partiels subis : « sur les accueils de loisir, par exemple, des jeunes viennent trois fois par jour pour une heure et demi ou deux heures, sans déplacements payés... On est dans une dynamique de rentabilité plus qu'une dynamique associative », dit-elle en soulignant les 79% des voix obtenues par son syndicat aux élections professionnelles de décembre 2014.
Parmi les revendications, figure la demande d'une meilleure prise en charge de la mutuelle, obligatoire en 2016, par l'employeur, sinon les 50 € mensuels seront trop lourds pour les temps partiels qui gagnent 500 ou 600 euros. Élisabeth Nédelec pointe aussi la non reconnaissance de certains diplômes : « pour ouvrir une crèche, il faut un minimum de personnes diplômées, mais au-delà des diplômés sont employées au salaire minimum, inférieur à leur qualification ».
Un rassemblement public est prévu entre 11 h et 15 h au rond-point de la RD 461 entre Besançon et Valdahon.

Ces faibles forces sont néanmoins organisées et ont un bilan. La signature de l'acte 1 de la sécurisation de l'emploi en 2009, résumée par « se former plutôt que chômer », n'a pas empêché le chômage de s'aggraver. Du coup, la CGT n'a signé que la déclaration d'intention de l'acte 2 en 2010 mais pas le document. Quant à l'acte 3 déclinant le contrat de génération, elle est « d'accord avec l'intention » mais « attend les dispositifs concrets » pour se prononcer.

La « petite pierre » du passeport professionnel

La CGT régionale de réjouit cependant d'être à l'origine de la négociation qui a débouché sur le passeport professionnel : « notre objectif est directement lié à notre revendication d'une sécurité sociale professionnelle. Nous ne partions pas de rien car des expériences avaient commencé dans quelques branches, comme la construction », dit Michel Faivre-Picon en précisant qu'il a fallu passer d'un document « non plus professionnel, mais inter-professionnel » dont « la finalité est de permettre à un salarié de faire noter et reconnaître ses diplômes, ses compétences acquises au travail, ses stages de formation. L'objectif étant ensuite qu'ils soient reconnus en cas de changement d'employeur, reconnus sans le statut et le salaire. Rien n'est gagné dans ce domaine, mais c'est une petite pierre... »

Les CHU, la transition énergétique, les déplacements de fonctionnaires et la fusion des régions...
Le débat interne à la CGT sur la fusion des régions met surtout l'accent sur l'emploi et les services publics. « Le problème n'est pas la fusion, mais ce dont on a besoin sur les territoires », dit Michel Faivre-Picon. « La fusion, c'est une restructuration à grande échelle », renchérit Jacques Bauquier en évoquant l'exemple de la « concurrence entre les deux CHU ».
Pour Pascale Letombe, déléguée au CHRU de Besançon, « le risque est à l'avenir de perdre le R de CHRU, la dimension régionale que Dijon n'a pas en étant seulement un CHU ». Et alors ? « On a des craintes pour l'université de médecine de Besançon et que le CHRU devienne un CH, avec à terme une perte d'attractivité ».
Dominique Gallet, secrétaire du syndicat du conseil régional de Bourgogne, craint des expériences telles qu'un « smic régional ou d'un smic Peugeot dont parle depuis longtemps la présidente de Franche-Comté ». Il y a également la crainte que la restructuration des services de l'Etat de conduise au « déplacement de milliers de fonctionnaires ». Il ne s'agit « pas de dire ça pour faire peur aux gens, mais pour qu'ils se battent », dit Jacques Bauquier.
Michel Faivre-Picon et Raphaelle Manière mettent l'accent sur la politique régionale, qu'ils soutiennent, visant à « la rénovation de 77.000 logements en Franche-Comté dans le cadre de la transition énergétique : c'est un projet utile, donnant du sens à notre syndicalisme ». Il s'intègre au projet de réindustrialisation que revendique la CGT. Pour Jean-Marc Gardère, du syndicat du conseil départemental du Jura, « la réforme territoriale n'apporte rien à la industrialisation, c'est le rôle de l'Etat stratège... et des groupes industriels. L'enjeu, c'est la fin de l'Etat stratège, son dépérissement au profit de l'Europe, des grands groupes et des métropoles... La riposte syndicale est déjà là, mais les média en parlent peu... Dans le Jura, on va être obligé de riposter : le nouveau président du Département a dit qu'il allait supprimer les compétences facultatives, y compris le service économique. La suppression des tablettes numériques dans les collèges pose la question du devenir des cinq ou six personnes recrutées pour ça... »

Comme est un petit caillou dans les chaussures de nombreux salariés le pouvoir d'achat en berne : « la question des salaires fait l'unanimité et fait suite à notre campagne – difficile à engager - sur le coût du capital », souligne le secrétaire régional qui ne désespère pas : « petit à petit nos idées font leur chemin, même si elles ne sont pas encore assez connues et relayées au quotidien dans le syndicats ». Sans doute, ajoute-t-il, parce que « le climat n'est pas à la révolte mais plutôt au fatalisme », ne serait-ce parce que « les espoirs, pour ceux qui en avaient, ont été déçus » après la victoire de François Hollande.

On a vu enthousiasme plus convainquant

Dans ces conditions, le mouvement social n'a pas d'autre choix que d'appeler aux mobilisations et de positiver même si elles n'obtiennent rien. Les manifestations du 9 avril contre la loi Macron n'ont pas empêché son adoption à coup de 49-3, mais ont « donné confiance et ouvert des perspectives ». On a vu enthousiasme plus convainquant. La longue grève, minoritaire, de cinq semaines chez Castmétal à Colombier-Fontaine n'a pas empêché les licenciements de cinq salariés venant de se syndiquer et l'affaire va se poursuivre en justice. Chez Bourgeois, à Besançon, deux jours de grève ont récemment débouché sur une augmentation de 30 € par mois sur les bas salaires...

 

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