« On rattrape un retard... » Le président de l'Université de Franche-Comté, le mathématicien Jacques Bahi, en convient. Le chantier de la MSHE était dans le précédent contrat de plan Etat-Région, il va se terminer durant celui qui couvre la période 2015-2020. Enfin, peut-être, car le 1,6 million annoncé pour finir les travaux est inscrit « en option ». Ainsi va la programmation des investissements publics en France. Souvent sous-estimées au départ, il faut ensuite compter avec les changements de priorités politiques, la désormais « rareté de l'argent public » qui ferait presque culpabiliser d'en demander...
Une fois que la MSHE sera terminée, il faudra s'atteler à la réhabilitation du reste de l'ancienne fac de médecine dont le mauvais état a justifié une rénovation d'attente de 150.000 euros sur trois ans. C'était bien le moins pour des locaux occupés depuis quelques années par la fac des lettres qui n'en peut plus d'être à l'étroit rue Megevand. Pour la suite, « le phasage sera difficile », dit encore Jacques Bahi. Quant à la BU-BM, la future bibliothèque universitaire et municipale, on est dans l'impossibilité de dire aujourd'hui quand elle sera réalité.
Fédérer les sciences humaines et sociales
Mais c'est quoi la MSHE ? C'est quoi la Maison des sciences de l'homme et de l'environnement ? Pour faire simple, c'est une structure faisant travailler ensemble des chercheurs de différentes spécialités sur des programmes interdisciplinaires et internationaux. Ses responsables parlent d'une « plateforme administrative et technique » permettant de fédérer une quinzaine de laboratoires et d'équipes de recherche en sciences humaines et sociales de Franche-Comté.
Jean-Claude Daumas, l'historien de l'économie qui dirige la MSHE, poursuit la description : « Nous avons du personnel administratif et technique : sept permanents et des contractuels à la mission de soutien à la recherche. Par exemple, l'observatoire des dynamiques industrielles territoriales, l'ODIT, a 60 contractuels entre 2012 et 2015, mais ils ne sont pas tous là en même temps. L'important, c'est d'avoir des bureaux pour ces chercheurs, des salles de réunion, des ateliers de numérisation... Nous aurons une salle de géomatique qui nécessite beaucoup d'espace... Les laboratoires ne sont pas tous là, les gens seront présents sur les projets et ça créera des synergies, des mises en commun ».
« Organiser la collaboration entre laboratoires et institutions »
Si l'on comprend bien, les laboratoires conservent leurs locaux propres, mais les communication par téléconférence ne peuvent pas suffire. « Il faut que les gens soient là... La téléconférence, c'est bien pour une réunion formelle ou à contenu administratif... »
En fait, la MSHE est un lieu où s'articulent des recherches entre disciplines différentes qui continuent à avoir leur autonomie. Au total, seize laboratoires de sciences humaines et sociales de Franche-Comté adhèrent à la MSHE. La plupart sont bisontins, mais certains sont de l'Université technologique de Belfort-Montbéliard, et l'un est dijonnais. « Le rôle de la MSHE est d'organiser la collaboration entre laboratoires et institutions, de faire monter la mayonnaise, de monter des grands projets comme celui de l'ODIT qui se monte à 558.000 euros... »
Cette organisation fédérale n'est-elle pas aussi une réponse à l'accroissement de la concurrence universitaire internationale ? « L'objectif est d'atteindre une visibilité locale, nationale, internationale, d'être capable de répondre à des appels d'offres, par exemple européens, mais aussi de nouer des coopérations avec la société civile, comme avec l'ONF, les chambres de commerce et d'industrie, des syndicats patronaux ou des entreprises », répond Jean-Claude Daumas.
« Jouer l'isolationnisme, c'est se vouer à la mort... »
Il s'agit aussi de « représenter l'ensemble des sciences humaines et sociales auprès de l'université ou du conseil régional. Quand la région a réfléchi à son programme de fusion avec la Bourgogne, ça n'a pas transité par les seize laboratoires, mais par la MSHE... » Comment les labos l'ont-ils pris ? A entendre Jean-Claude Daumas, pas si mal : « On fédère, les décisions sont prises au consensus... Ce qui a suscité des discussions, c'est le rapport entre la MSHE et les labos car ça réduit leur autonomie. Mais jouer l'isolationnisme aujourd'hui, c'est se vouer à la mort... »
La MSHE a-t-elle autorité sur les laboratoires ? « Ils restent autonomes scientifiquement et financièrement sur leurs propres programmes de recherche. La MSHE n'intervient que sur ce qui est commun ».