Denis Sommer : « les ordonnances ne contredisent pas le débat parlementaire »

Candidat LREM dans la troisième circonscription du Doubs, l'ancien syndicaliste vient de quitter le PS. Il entend porter au niveau national le dispositif « former plutôt que chômer » qu'il a contribué à bâtir avec les partenaires sociaux quand il était premier vice-président du Conseil régional de Franche-Comté.

Denis Sommer : « Quand certains, au PS, critiquent les engagements à gauche des uns et des autres, et que je regarde mon parcours, mes pratiques, je ne suis pas gêné ». (Photo d'archives Daniel Bordur)

Faisant partie de la première liste des candidats investis par LREM, Denis Sommer a aussitôt prévenu Nicolas Bodin, le premier fédéral du PS du Doubs, qu'il quittait le parti dont il a aussi été premier fédéral il y a quelques années. Maire de Grand-Charmont, conseiller régional et vice-président de PMA, Denis Sommer a été, lors du précédent mandat, premier vice-président du Conseil régional de Franche-Comté. Connu pour ses longues tirades, argumentées et passionnées, mais aussi ses interventions tonitruantes contre le FN, il brigue la succession du député LR Marcel Bonnot dans la troisième circonscription du Doubs.

Vous n'êtes plus au PS...?

Plus depuis longtemps... J'ai régularisé.

Vous avez été secrétaire du syndicat CGT de PSA-Sochaux, militant communiste, puis socialiste, et maintenant à LREM... Quel parcours ! Comment en expliquez-vous la logique et l'évolution ?

C'est un parcours de plus de 40 ans... Que faisiez-vous à 20 ans ? Pour faire court, j'ai été au PCF, puis en rupture quand a été mise à jour la réalité des pays socialistes. J'ai fait un choix, avec d'autres dont Martial Bourquin, de rejoindre le PS, comme Charles Fitermann... Quand on a milité au PS, le monde a continué de changer, la mondialisation s'est accentuée, mais le PS a été incapable de changer son corpus idéologique. On peut être contre la mondialisation, mais pas comme on serait contre le ciel ou le soleil. Il y a eu des débats entre l'aile gauche du PS et l'aile de centre-gauche mais personne au milieu cherchant un vague compromis. Et quand François Hollande a eu la majorité, les frondeurs lui ont compliqué la vie. Je ne supporte plus cette logique inopérante. C'est une des raisons du développement de l'extrême-droite qui s'appuie sur les désespoirs.

On a un président aujourd'hui, qui depuis un an et demi s'engage dans une autre démarche, rassemble des personnes d'origines différentes, fédérées par le projet, dans un cadre européen, de transformation de l'Europe. Ma démarche est celle du majorité présidentielle dépassant certains clivages. Quand certains, au PS, critiquent les engagements à gauche des uns et des autres, et que je regarde mon parcours, mes pratiques, je ne suis pas gêné. Quand je vois le dénigrement systématique de certains avec un langage très à gauche, et font la bise à des représentants de la famille Peugeot...

De qui parlez vous ?

Ils se reconnaîtront.

Votre engagement auprès de Ségolène Royal en 2007 est dans la même logique ?

Tout à fait ! Elle s'était engagée dans une démarche comparable, s'était fait railler quand elle parlait du drapeau ou de réformes justes. Quand elle avait lancé Désirs d'Avenir, elle avait initié une démarche participative, réuni les gens... Emmanuel Macron a travaillé de cette façon, avec des porte à porte, et beaucoup riaient...

Le Premier ministre est de droite, ça vous va ?

C'est la logique du rassemblement. Qu'aurait-on dit s'il avait nommé un Premier ministre de gauche ! Qu'Emmanuel Macron était le fils de François Hollande. Il va au bout de sa logique. Je lance le pari : en 2022, on pourrait ne pas nous repasser les plats et le FN être vraiment à la porte du pouvoir.

Réformer le code du travail par ordonnances contredit vos engagements de 40 ans, non ?

Les ordonnances ne contredisent pas le débat parlementaire. Il faut un débat pour que légiférer par ordonnances soit possible. Quand on a vu les débats interminables lors du précédent quinquennat, créé-t-on les conditions de la confiance ? A un moment, on a besoin de réformes structurelles importantes. Emmanuel Macron veut mettre en avant les négociations de branches et d'entreprises...

En inversant la hiérarchie des normes...

Peut-on gérer de la même façon les jours RTT dans différentes structures ?

Les branches sont quand même importantes pour éviter le dumping à l'intérieur de la même activité...

Oui, mais il y a aussi l'entreprise. Quand on a bâti à la région Franche-Comté le dispositif former plutôt que chômer, avec la CGT et le MEDEF, on renvoyait la mise en œuvre à la négociation d'entreprise. C'est la situation où les chefs d'entreprises et les délégués syndicaux ont les outils pour répondre à des problèmes de sous-activité. Faut-il des normes ? Oui ! Il faut de la norme dans les branches, mais permettre l'adaptation dans les entreprises...

Mais ça existe déjà !

Oui, mais avec beaucoup de lourdeurs...

Si vous êtes député, vous participerez alors au débat interne à la majorité pour éviter la casse de code du travail ?

Il n'est pas question de ça. On ne parle pas de casser le code du travail. Par contre, j'ai gardé des relations avec les syndicats de salariés et les dirigeants d'entreprises. Si on a fait le dispositif former plutôt que chômer en Franche-Comté, c'est parce que j'avais des relations avec les gens... Quand je vois qu'on va avoir quasiment 50% d'intérimaires chez Peugeot, ce n'est pas acceptable. Il faut quand même des CDI. Il faut aussi protéger et former les intérimaires.

Les organisations syndicales se plaignent que le MEDEF ne joue pas toujours le jeu sur ce dispositif...

Au départ, on tablait sur quinze entreprises, il y en a eu plus de soixante dix, et 15.000 salariés ont été concernés. On a fait un sondage sur 600 d'entre eux, 72% avaient apprécié, 65% étaient prêts à y retourner, autant que cela avait amélioré le climat social dans les entreprises. Ce qu'on a fait là doit permettre de tirer des enseignements pour le niveau national.

Le projet du nouveau président est critiqué par ce qu'il met davantage l'accent sur la flexibilité plutôt que sur la sécurité des salariés, et qu'il veut remplacer des instances paritaires par des missions d'Etat...

Sur la sécurité professionnelle, l'emploi, la formation, les parcours de retour à l'emploi, je vais m'investir. Je suis persuadé que nombre de nos problèmes sont là. Et puis, les travailleurs indépendants, les créateurs de start-up, vont avoir accès au chômage si ça se passe mal pour eux, je trouve que c'est juste. On doit pouvoir rebondir, peut-être qu'on aurait davantage de porteurs de projets si c'était le cas.

Vous avez trois mandats : maire, vice-président d'agglomération, conseiller régional. Que ferez-vous si vous êtes élu député ?

C'est réglé. Mon expérience est solide. Et si je suis élu, je ne garderai pas certains mandats.

Lesquels ?

Je le dirai après.

Sidonie Marchal, la candidate investie par le PS, a des mots durs pour vous, dit que votre choix « participe au sentiment de confusion »...

Que dire ? C'est mensonge. J'ai répondu par écrit (ndlr : voir la conversation Facebook ici)

Emmanuel Macron arrive en troisième position dans cette troisième circonscription du Doubs, avec 20,2%, derrière Marine Le Pen (28%) et François Fillon (20,7%). Avec la baisse de participation possible aux législatives, pensez-vous atteindre le seuil de 12,5% des inscrits pour vous qualifier pour le second tour ?

Je pense que j'arriverai premier face à Frédéric Cartier et au FN.

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