Aéroport de Tavaux : des manifestants réclament la reconversion de l’aéronautique

La fréquentation de l'aéroport jurassien est en chute libre en raison de la pandémie et l'on ne sait toujours pas qui va régler le déficit d'un million d'euros enregistré en 2019. Alors que les collectivités publiques ont dépensé cinq fois plus que prévu depuis 2010, des militants associatifs défendent une réorientation des aides à ce secteur sinistré.

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Postés ce pluvieux samedi 3 octobre sur le rond-point du carrefour qui dessert l'aéroport de Tavaux, Sylvie et Christian tiennent une banderole qui fait penser aux messages de danger des paquets de cigarettes. « On est là pour nos petits enfants qui vont déjà payer la dette du covid en plus d'avoir l'effet du réchauffement », disent-ils en choeur. Si ces habitants de Saint-Vit ont jadis pris l'avion, ils ne l'ont plus fait depuis qu'ils ont été « sensibilisés à l'écologie, il y a environ 5 ans », assure Christian tandis que Sylvie promet : « on ne le prendra plus pour un court trajet ».

De l'autre côté de la chaussée, Michel est venu de Besançon. Ce militant associatif et politique (LFI) critique « le financement public de l'aéronautique plutôt que la recherche d'alternative » au transport aérien. Que pense-t-il des suppressions d'emplois annoncées à Lons-le-Saunier chez le sous-traitant aéronautique SKF ? « Il faut trouver des emplois alternatifs. Il y a énormément de possibilités d'emplois avec le verdissement de notre société. Il faut développer les alternatives plutôt que de s'enferrer dans le même sens... »

Alain et Mathilde sont également venus de Besançon. « Je suis convaincu qu'il faut arrêter le tourisme de masse en avion, surtout payé par le contribuable. Un seul vol consomme ce que ma voiture consomme toute l'année. C'est un délire complet de soutenir l'aviation », assure Alain, ancien infirmier hospitalier. Mathilde n'a voyagé en avion q'une seule fois dans sa vie : « pour aller en Grèce alors que je n'avais que quinze jours de vacances... » Interrogés aussi sur SKF, ils répondent d'une même voix : « reconversion ! »

« Une erreur de laisser dépérir le train,
une autre de maintenir sous perfusion l'industrie aérienne »

A cet instant, le représentant bisontin d'Alternatiba, une des deux organisations nationales à avoir fait du 3 octobre une journée nationale de critique du transport aérien, prend le micro. Le carrefour ne borde aucune habitation et les automobilistes ne s'arrêtant pas, il s'adresse à la centaine de manifestants... et à la presse. Son message est le même que celui de nos premiers interlocuteurs : pour la réduction du trafic aérien et la reconversion du secteur. Il ajoute que « c'était une erreur de laisser dépérir le train » et que c'en serait une autre de « maintenir sous perfusion l'industrie aérienne ». Il a aussi un message social, ce qui est relativement nouveau de la part du mouvement environnemental : « Nous soutenons les travailleurs de l'aéronautique, il faut organiser avec eux la reconversion, réorienter les subventions aux aéroports régionaux et aux compagnies low cost ».

Organisatrices d'une vingtaine de rassemblements similaires dans le pays, Alternatiba et ANV-COP21 ont été rejointes à Tavaux par France Nature Environnement BFC, la FNAUT, les Amis de la Terre, Greenpeace-Dijon ou encore ATTAC. Quelques heures avant de se présenter devant les instances régionales d'EELV dans le cadre de la préparation des élections régionales, Pascal Blain, qui siège encore au CESER pour FNE-BFC qui « représente plus de 300 associations », tient un propos traçant des perspectives : « Le moment est venu de choisir entre le climat et les activités humaines biocidaires et liberticides. Le soutien au secteur aéronautique ne peut se concevoir que comme un accompagnement vers d'autres activités ».

« Relancer les transports collectifs
et les modes doux »

Son camarade de Greenpeace-Dijon rappelera que le contexte est aussi celui « d'une Convention climat dont toutes les propositions sont rejetées » par Emmanuel Macron. Et de souligner que dans la grande région, il y a également en projet « la toujours possible extension de 30 hectares de l'aéroport d'Auxerre-Branches, uniquement pour l'avantage de quelques personnes ». Il déplore qu'il n'y ait « aucune contrepartie aux subvention à Air France ». Il suggère qu'on remette en service des trains de nuit « pour remplacer les vols courts et les principales destinations européennes ».

Le représentant de la FNAUT vient aussi dire le choix de son organisation pour une « priorité à la relance des transports collectifs et des modes doux ». Il précise ne « pas demander la fermeture de l'aéroport de Tavaux et de ses 10.000 vols annuels, mais seulement l'arrêt des 500 vols low cost ».

Après quoi, il y eut quelques tentatives de réchauffer les corps avec des slogans adaptés au sujet, mais la fraicheur de la météo n'a pas incité les participants à les reprendre exagérément. Ils se sont en revanche plus facilement allongés quelques instants sur la voie d'accès à l'aéroport, histoire de souligner à quel point ils pensent que c'est bel et bien la mort qui est au bout de la logique actuelle du développement techno-économique symbolisé par l'aviation de masse.

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