Une trentaine de contraventions pour distribution d'imprimés aux automobilistes, entrave à la circulation ou « bruit ou tapage injurieux troublant la tranquillité d'autrui » ont été infligés à des manifestants en novembre et décembre. Quinze auditions sont programmées d'ici le 13 février. Un collectif dénonce une « répression policière ». On dénombre 2500 à 4000 manifestants dans le Jura ce 9 janvier où les voeux de la députée LREM Danièle Brûlebois ont été perturbés.
Le cortège lédonien auquel un bon millier de personnes a participé vient d'arriver sans encombre à son terme ce 9 janvier. Il est passé devant la préfecture et la gare, a longé la voie ferrée, a fait de brèves haltes devant les laiteries Bel et Lactalis, applaudi une défense de la Sécu de 1945 devant le siège de la CPAM : « la casse de la retraite, c'est la casse de la Sécu... La Sécu, c'est pas le budget de l'Etat, c'est le budget du peuple... » Le propos complète le discours d'avant défilé : « les cotisations sociales, ce sont nos salaires quand nous sommes en retraite... »
Plusieurs dizaines de manifestants iront une heure plus tard « pourrir les voeux » que la députée (LREM) Danièle Brûlebois donne à la salle des fêtes de Montmorrot. Entre la manifestation et cette action, une trentaine de militants, essentiellement Gilets jaunes, tiennent une conférence de presse au Centre social pour dénoncer la trentaine de contraventions infligées à une quinzaine d'entre eux depuis le 16 novembre 2019. La plupart sont en outre convoqués pour une audition libre au commissariat de police entre le 27 janvier et le 13 février prochains.
Une douzaine de documents attestant ces procédures sont affichées. Jean-Luc Buguet, gilet jaune, est ainsi « soupçonné d'avoir commis ou tenté de commettre l'infraction d'entrave à la circulation » et convoqué le 11 février par un officier de police judiciaire qui souhaite l'entendre sur ces faits. Christian a pour sa part été verbalisé le 16 novembre à 15 h 12 au rond point du Rocher de Montmorrot pour « distribution d'imprimé ou objet à l'occupant d'une voiture circulant sur la voie publique ». Le procès verbal précise qu'il s'agit d'une infraction réprimée par l'article R 412-52 du Code de la route.
Aline se voit reprocher une entrave à la circulation le même jour au Rocher, mais elle est aussi convoquée, le 27 janvier, pour « bruit ou tapage injurieux troublant la tranquillité d'autrui ». Il semble qu'elle ait scandé un peu trop fort des slogans dans un haut parleur. Résultat : deux amendes de 135 euros...
Certains verbalisés acceptent d'être photographiés, d'autres pas ; les uns ont effacé leur nom et adresse des PV, d'autres les ont laissés. Mais tous tiennent le même langage, hésitant seulement entre la qualification à donner à ce qu'ils estiment être une forme de répression du mouvement social : « C'est du harcèlement policier », dit l'un. « Non, c'est de l'acharnement », corrige l'autre. Un troisième synthétise : « on nous a laissés manifester pendant un an, et on sent qu'ils n'en veulent plus ».
Plusieurs procédures passent mal car elles sont considérées comme visant « des broutilles », voire carrément montées de toutes pièces : « Si j'ai commis une infraction, l'assume, mais je refuse quand c'est fabriqué. J'ai entendu de mes oreilles un policier dire à son collègue "il faut l'arrêter car c'est un meneur », s'indigne Jean-Luc qui a reçu cinq convocations, certaines annulées et reportées. Parmi une procédure le touchant, il fustige une « entrave à la circulation car j'aurais empêché la voiture de la CGT de quitter le cortège le 5 décembre » !
Un autre gilet jaune, déjà convoqué, assure que son audition a été « cordiale » : « j'ai été reçu par une personne très correcte ». Christian déplore un traitement visant spécifiquement les gilets jaunes : « les syndicats n'ont pas d'amende. Même quand est dans leurs manifestations, on peut être verbalisé... »
Entendant contester en droit ces procédures, les contrevenants présumés ont pris un avocat et créé un collectif qui a déjà reçu le soutien de la CGT, de la FSU et d'Attac. Il entend recenser les éventuels autres cas via l'adresse antirep39@riseup.net et a programmé des veilles lors des auditions : il s'agit de montrer par une présence solidaire devant le commissariat à l'heure des auditions, que les gens « ne sont pas seuls ».
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