« Yuli », le ballet de sa vie

Le film de Iciar Bollain retrace le destin du danseur étoile cubain Carlos Acosta, « le premier Roméo noir ». Actuellement en salle.

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« Des rues de Cuba au Royal Ballet de Londres ». Après « Noureev » au début de l’été, le film de Ralph Fiennes qui évoque notamment le passage à l’Ouest du danseur russe, voici un autre film qui raconte l’incroyable destin d’un autre danseur, le Cubain Carlos Acosta, qui a d’ailleurs dansé le « Don Quichotte » de Noureev à l’Opéra Garnier à Paris. « Yuli », tel est son surnom depuis toujours, « le nom d’un guerrier », et le titre du film de Iciar Bollain (sortie le 17 juillet).

Carlos Acosta joue son propre rôle et danse sa propre vie dans ce film écrit par Paul Laverty, scénariste habituel de Ken Loach, qui signe ici son troisième scénario pour la cinéaste Iciar Bollain, après le superbe « Même la pluie » et « L’Olivier ». Laverty s’est notamment inspiré de la biographie de Carlos Acosta, « No way home », mais la bonne idée est de faire des allers-retours dans le temps, des flash-backs vers l’enfance, la jeunesse, et les répétitions d’un spectacle chorégraphié par Carlos Acosta lui-même, alternant le récit et le ballet de sa vie.

« Un vrai don, un immense talent »

On le découvre d’abord gamin (incarné alors par le jeune Edilson Manuel Olbera Nunez), dansant dans la rue sur du Michael Jackson, et se faisant alors tirer l’oreille par son père, un camionneur noir avec qui les relations sont difficiles, qui l’aime à sa manière, coups y compris. C’est pourtant ce père qui l’emmènera à une audition de l’école de danse. « Je veux être footballeur, comme Pelé », assure Yuli, garçon têtu qui a un truc que les autres n’ont pas : « un vrai don, un immense talent ».

 

Accepté à l’Ecole Nationale de Danse, c’est un enfant dissipé, menteur, bagarreur, rejeté par les copains de son quartier parce qu’il fait de la danse, et rejeté par les petites danseuses à cause de son infériorité sociale, de la pauvreté de sa famille. Expulsé de l’école « pour indiscipline », ce qui la fiche mal pour un danseur, Yuli est finalement envoyé dans un internat. On avait laissé un môme de onze ans en colère, promis à un avenir de voyou, et on retrouve un jeune homme sérieux et travailleur (incarné alors par le danseur cubain Keyvin Martinez), pour qui la danse est désormais « son refuge, son salut », sa passion, jusqu’à décrocher un contrat à l’English National Ballet à Londres, être nommé danseur étoile, devenir « le premier Roméo noir »…

Un destin unique pour ce métis descendant d’esclave, qui avait de quoi fasciner la réalisatrice espagnole Iciar Bollain. En nous faisant entrer dans sa danse, « Yuli » raconte la douleur de pratiquer cet art, la douleur de la solitude, la douleur de la vie… Mais aussi la triste situation, sociale, économique, de Cuba, où sa famille est restée alors qu’il dansait sur les plus grandes scènes du monde. « Je suis d’ici », affirme Carlos Acosta, « le seul Cubain qui veut rester à Cuba », et qui dirige depuis 2017 sa compagnie de danse à La Havane

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