Un portrait socio-démographique de Besançon

L'Analyse des besoins sociaux présenté au dernier conseil municipal met l'accent sur le taux de pauvreté alarmant des moins de 30 ans : 35% en 2013, s'aggravant par rapport à 2012. Le document intègre aussi une étude par quartier montrant que la classe ouvrière existe toujours : elle habite notamment Planoise, Palente ou Clairs-Soleils et vit en HLM !

Battant et la Boucle sont les quartiers de Besançon où la proportion des 15-29 ans est, avec la Bouloie, la plus élevée de Besançon... (Photo Daniel Bordur)

Compilation de données socio-démographiques produites par l'INSEE, l'Assurance maladie, la CAF, l'Union sociale de l'habitat, parfois retraitées par l'Agence d'urbanisme, l'Analyse des besoins sociaux (ABS) de Besançon est un document que le CCAS réalise chaque année et dont les conseillers municipaux sont destinataires (voir ici). Derrière les colonnes de chiffres et les tableaux statistiques, se dessine sans surprise une réalité sociale des plus préoccupantes, pour ne pas dire scandaleuse dans l'un des cinq ou six pays les plus riches du monde.

En 2013 à Besançon, plus d'un ménage de moins de 30 ans sur trois (34,9%) vivait sous le seuil de pauvreté, souligne l'ABS 2017. C'est 2,5 points de plus qu'en 2012. Cette proportion est plus importante que dans la plupart des villes de taille équivalente, sauf Limoges.

Par convention, le seuil de pauvreté correspond à 60% du revenu médian50% gagnent plus, 50% gagnent moins du pays, soit 1008 euros en 2014 pour une personne seule, 1310 euros pour une personne seule avec un enfant. On utilise aussi 50%, voire 40% pour le seuil de très grande pauvreté : 672 euros pour une personne seule (voir l'Observatoire des inégalités ici).

10% des moins de 30 ans avec
moins de 544 euros par mois

A Besançon donc, le revenu médian des moins de 30 ans était de 1256 euros par mois en 2012. C'est sensiblement moins qu'au sein de la communauté d'agglo (1329 euros), nettement moins que dans le département du Doubs (1516 euros). Quant aux 10% des Bisontins de moins de 30 ans les plus pauvres, ils vivaient avec moins de 581 euros en 2012, moins de 544 euros en 2013...

Le document n'aligne pas que des chiffres et met quelques mots sur les conséquences de cette situation économique : « précarité énergétique, problématique des gestion de budgets en lien avec des ressources très faibles qui mettent à mal l'équilibre budgétaire... (...) Personnes isolées sans enfant percevant des petites ressources qui ne leur permettent parfois pas de bénéficier de l’APL et qui ne peuvent, de ce fait, être logées dans le parc social. C’est notamment le cas de certains jeunes apprentis, qui recherchent un accompagnement pour un accès au logement autonome (repérés en partie par le Foyer des Jeunes Travailleurs La Cassotte qui accueille des jeunes entre 16 et 30 ans). Les isolés de moins de 30 ans possèdent moins de moyens que les familles (...) Des familles monoparentales, souvent jeunes qui perçoivent le RSA. Un grand nombre de familles monoparentales est constaté chez les moins de 30 ans. Ces ménages sont souvent touchés par l’isolement, le non accès aux loisirs et les difficultés de garde des enfants pour l’accès à l’emploi. Les salaires ne sont pas assez conséquents pour assurer une garde des enfants. »

Un reste à vivre allant de 0 à 3 euros par jour

Mettant précisément l'accent sur les moins de 30 ans, l'ABS 2017 souligne d'autres difficultés telles que « le surendettement, la rupture de droits, les délais de prise en charge de l'APL, les ruptures familiales, les fragilités psychologiques, l'accès aux soins... » La pauvreté conduit souvent à consacrer la moitié des maigres ressources au logement, entraînant un reste à vivre échelonné « entre 0 et 3 euros par jour ».

Le tout est aggravé par des problèmes d'accès aux droits, et pas seulement pour les personnes maîtrisant mal ou pas le français : « il est constaté par ailleurs une perte d’information liée à la dématérialisation et la complexité des démarches. » La « dispersion des dispositifs » d'aide et d'accompagnement « créé de l'illisibilité » et un « manque de clarté qui impacte dès lors la cohérence et l’efficacité des actions, pourtant nombreuses, en direction de ce public. »

Dans ces conditions, les aides d'urgence à la subsistance ou les micro-crédits attribués pour passer le permis de conduire ou acheter un véhicule pour accéder à un emploi paraissent un minimum permettant à nombre de personnes de ne pas se noyer...

« Une porte d’entrée unique pour plus de clarté et de simplicité » ?

Ayant travaillé avec une vingtaine de partenaires institutionnels, humanitaires ou associatifs, les auteurs du document concluent à la nécessité de « coordonner, simplifier et rendre plus lisibles les dispositifs afin qu’ils soient mieux utilisés, et amener les personnes à solliciter les plus adaptés ». Dans cette optique, il est question de « créer une porte d’entrée unique pour plus de clarté et de simplicité ». Il s'agirait d'une « coordination et une structure qui recensent toutes les actions des différentes associations, pour permettre une plus grande cohérence dans l’action de communication menée auprès de ce public. »

Trois « pistes d’amélioration » sont enfin suggérées qui relèvent de politiques plus générales que l'intervention locale : « 1) la pérennisation des emplois et le renforcement de l’accompagnement pourraient être portés par un système de parrainage au sein des entreprises. 2) un recours et une facilitation aux soins psychiques devraient être renforcés. 3) il est proposé qu’un travail d’étude sur le revenu inconditionnel soit réalisé. »

La classe ouvrière est nombreuse à Planoise, Palente-Orchamps, Clairs-Soleils...

Traitant ensuite plus globalement de l'enfance, des personnes âgées, du handicap, de la précarité, du logement et de la santé, l'Analyse des besoins sociaux intègre une étude assez fine par quartier. Nous en avons extrait des données afin de croiser les catégories socio-professionnelles, les différents âges de la vie et le statut de la résidence principale avec la localisation dans la ville. Cela nous permet de rendre un peu plus visibles des invisibles. Et de constater par exemple que la « classe ouvrière » – les employés et les ouvriers – bien que quasiment absente des grands médias ou du parlement, n'a pas disparu.

On la retrouve à Planoise où elle représente 40% de la population et 71% des actifs, et même 52% de la population et 83% des actifs dans le secteur Ile-de-France... Elle est importante aux Clairs-Soleils : 36% de la population et 61% des actifs ; à Palente-Orchamps : 35% de la population et 59% des actifs, voire 48% de la population du secteur Chopin et 75% des actifs... Comme par hasard, c'est là où la classe ouvrière est la plus nombreuse que l'on trouve le plus de locataires HLM : 82% à Ile-de-France, 77% à Chopin... Ile-de-France est également le quartier de la ville qui a le plus fort taux de moins de 15 ans : 32%, soit plus du double de Besançon.

Quartiers bourgeois, jeunes ou retraités...

Quant aux quartiers dits « bourgeois », on les reconnaît par une proportion de CSP+cadres et professions inteelctuelles supérieures, chefs d'entreprise et de propriétaires de leur logement nettement au-delà de la moyenne de la ville : Velotte, Mouillère, Bregille, Tilleroyes, Saint-Laurent... Ceci étant, les écarts statistiques avec les quartiers populaires ne sont pas aussi grands que dans des villes très bourgeoises, comme Paris, Lyon ou Bordeaux...

Les 15-29 ans – 29% des Bisontins, notamment grâce aux étudiants – sont en force dans la Boucle (43%), à Battant (44%), autour de la rue de la Rotonde (37%) et bien entendu à la Bouloie (70%)... Quant aux retraités – 26% des Bisontins – ils sont en nombre dans la combe Saragosse (43%), aux Chaprais (41%), à Velotte (35%) ou Bregille (33%)...

 

Tous les « grands quartiers » sont présents sur ce tableau, mais pas la totalité des secteurs internes à chaque quartier qu'on peut retrouver dans le document de l'AUDAB ici qui est intégré à l'ABS. Les chiffres des catégories d'âges et de statut de la résidence principale sont des pourcentages. Nous avons mis en rouge les valeurs supérieures à la moyenne de la ville.

 

Les chiffres des catégories socio-professionnelles sont des pourcentages. Nous avons mis en rouge les valeurs supérieures à la moyenne de la ville. Tous les « grands quartiers » sont présents sur ce tableau, mais pas la totalité des secteurs internes à chaque quartier qu'on peut retrouver dans le document de l'AUDAB ici qui est intégré à l'ABS.

 

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