Squat solidaire des migrants à Besançon : audience renvoyée au 7 mars

Les propriétaires de l'appartement de l'avenue Denfert-Rochereau, investi il y a deux mois par des militants qui l'ont ouvert à des demandeurs d'asile, avaient saisi la justice pour occupation sans droit ni titre. Alors que le débat juridique n'a pas encore eu lieu, le juge a curieusement quasiment intimé aux occupants de quitter les lieux.

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Il y a seize noms sur le rôle affiché à l’entrée de la salle d’audience du tribunal d’instance de Besançon ce mardi de la Saint-Valentin, mais ils ne sont que six ou sept à être là, assis sur le dernier banc à attendre leur tour. Les deux assignations qui leur ont été adressées n’ont pas fait le tri entre les personnes de passage au squat de l’avenue Denfert-Rochereau, les militants du collectif l’ayant investi et les demandeurs d’asile qui y logent depuis la mi-décembre.

A l’appel du premier nom, à consonance étrangère, personne ne bouge ni ne pipe mot. « On se lève et on dit présent », gronde le juge Jean-Louis Cioffi. Hélène, Sébastien, Jetmir, Stanly et les autres obtempèrent. Surpris, ils ne voient pas leur avocate, mais Valérie Giacomoni qui la substitue. Elle n’a pas eu le temps de prendre connaissance du dossier et demande le renvoi. Florence Robert, qui assiste les deux propriétaires de l'appartement squaté, absents de l’audience, « tombe des nues ».

Le juge : « j’espère que vous aurez quitté les lieux... »

A la demande du magistrat, les assignés s’approchent. Il leur demande s’ils ont compris. Ils font oui de la tête. Me Robert explique que les assignations datent des 27 et 30 janvier. Le juge Cioffi résume : « vous résidez dans les lieux sans droit ni titre… » Il fixe une nouvelle audience au 7 mars. Puis fait la leçon : « si vous trouvez une solution d’ici là, il faudra l’appliquer. Vous pressentez le sens de la décision : on n’occupe pas des locaux sans bail. J’espère que vous aurez une bonne nouvelle à m’annoncer, que vous aurez quitté les lieux ».

Affaire suivante... Les hébergés et les militants quittent la salle d’audience. Sébastien résume les débats en anglais à l’intention des migrants, des demandeurs d’asile albanais à qui l’Etat n’a pas trouvé d’hébergement en attendant la décision de l’OFPRA comme c’est la loi : « ce n’est pas vraiment cool… » Il explique aux journalistes : « On pensait que la trêve hivernale allait jouer, mais le juge n’a pas l’air enclin à la donner. Il nous demande de quitter les lieux. Si on a fait cette action, c’est parce que les gens n’ont pas de logement, sont à la rue depuis longtemps. Je suis déçu de la décision, même si cela laisse du temps pour des soutiens des élus, des pouvoirs publics, pour avoir des dons… »

« Faire en sorte que la décision soit utile et humainement acceptable... »

En fait, il n’y a pas de décision autre que celle de renvoyer l’audience. Le magistrat a fait un peu monter la pression, laissant augurer une décision d’expulsion alors que le débat contradictoire n’a pas eu lieu... Ce débat ne se résumera à l'évidence pas au seul droit de ne rien faire d'un appartement vide quand des êtres humains sont à la rue en plein hiver.

Lors d'une formation dispensée l'an dernier à l'Ecole nationale de la magistrature, le juge Cioffi se montrait conciliant et compréhensif avec les plus faibles : « Il faut appliquer la règle de droit et garantir le vouloir vivre ensemble », soulignait-il notamment, suggérant qu'il faut « libérer le juge d'instance d'une fonction d'automate ». Il expliquait aussi que son « office est subtil et délicat dans la mesure où il se doit de garder l'impartialité qui fonde sa légitimité, tout en faisant preuve d'humanité, faire en sorte que sa décision soit utile et humainement acceptable... »

Première réponse le 7 mars. Entre temps, des manifestations de soutien aux demandeurs d'asile sont programmées le 18 février en France. Celle de Besançon doit avoir lieu place Pasteur à 14 h.

 

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