Portraits de femmes

Deux films explorent des sujets en marge de la production cinématographique française  habituelle. Prendre le large, de Gaël Morel, fait le portrait d'une ouvrière, interprétée par Sandrine Bonnaire, qui accepte un reclassement au Maroc après la fermeture de son usine. Diane a les épaules, comédie de  Fabien Gorgeart, traite de la gestation pour autrui...

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Deux films à l’affiche explorent des sujets très en marge de ce que le cinéma français produit  habituellement : Prendre le large de Gaël Morel et Diane a les épaules de  Fabien Gorgeart.

De l’autre côté de la mer…

Tout d’abord Prendre le large, portrait d’Edith une ouvrière du textile convoquée dans le bureau de la DRH pour s’entendre dire, en vue  d’une délocalisation prochaine de l’usine, qu’elle peut accepter une indemnité de licenciement ou partir au Maroc et, dans ce cas, garder son emploi. Elle décide de partir et débarque à Tanger où elle se retrouve à un poste déclassé et dans les conditions salariales extrêmement basses. A cela s’ajoute la difficulté de créer de nouvelles relations. Elle tente de militer pour améliorer les conditions de travail de l’atelier, mais  rien ne se passe comme elle le prévoit.

On l’a compris, le film de Gaël Morel explore la condition ouvrière dans une situation inhabituelle, mettant Sandrine Bonnaire au défit de composer un personnage à contrecourant du modèle de l’immigration économique. A Tanger, où on l’appelle « La Française », elle découvre le monde du travail où le code du travail n’existe pas et où la vétusté des machines abîme les mains. Dans ce décor inhospitalier, elle tente de se reconstruire. De prendre le large alors qu’elle menait une vie étriquée suite à un veuvage et dans l’éloignement d’un fils avec lequel les liens sont rompus.

Gaël Morel, fils d’ouvriers, sait de quoi il parle et n’omet pas au passage de citer certains films de sa cinéphilie. La chute de Sandrine Bonnaire dans un champ de fraises évoque bien sûr l’épuisement de la Mona de Sans toit ni loi (clin d’œil à Agnès Varda) et son rôle de composition la femme rebelle dans A nos amours de Pialat. En prenant le risque de délocaliser son personnage, Gaël Morel n’exclut pas la rencontre avec le large du titre. Au-delà de la souffrance, le cinéaste choisit la possibilité d’un nouvel horizon dont on taira ici la nature.

Vivre sa vie

Diane a les épaules, de Fabien Gorgeart, est l’histoire d’une jeune femme (Clotilde Helme) qui accepte sans contrepartie de porter un enfant pour deux amis homosexuels.

Ce premier film réussit de manière très audacieuse à dresser le portrait d’une trentenaire, joyeuse et bohême qui choisit la GPA (gestation pour autrui) parce qu’elle ne se sent pas maternelle, et capable de vivre une grossesse sans  attachement. Elle et le dit à plusieurs reprises : « j’arrive à séparer ma tête de mon ventre », « être enceinte et avoir un enfant, ça n’a rien à voir ».

Au cours de sa grossesse, elle rencontre un électricien et tombe amoureuse. De là naît un improbable et étrange quatuor autour de la naissance prochaine de l’enfant. La comédie fonctionne grâce au personnage tonique et presque hilarant d’une Clotilde Helme qui manie aussi bien l’humour que l’outil pour casser une cloison de sa maison. Comme si le réalisateur s’amusait  derrière la mécanique de la comédie à faire éclater les conventions tout en se donnant la possibilité de montrer de près les visages de la féminité (l’accouchement et le baby blues). Et là où le film risquait de prendre une drôle de tournure, le cinéaste  se détourne du piège du mélodrame au profit de la légèreté tendre d’une comédie.



 

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