Pontarlier, capitale comtoise du jeune cinéma français

Jusqu'au 1er novembre, la 76 ème rencontre est dédiée au jeune cinéma français à travers l’œuvre de trois cinéastes d’aujourd’hui (Raphaël Jacoulot, Maryline Canto, Jean-Pierre Améris) et un hommage à René Feret aujourd’hui disparu et une approche du travail de l’acteur Antoine Chappey.

Les Émotifs anonymes, de Jean-Pierre Arémis.

La 76 ème rencontre Internationale de Pontarlier est dédiée à la au jeune cinéma français. Regards croisés c’est ainsi qu’on pourrait définir cette édition qui est dans la continuité de l’esprit des fondateurs et dans une lecture du cinéma contemporain à travers l’œuvre de trois cinéastes d’aujourd’hui (Raphaël Jacoulot, Maryline Canto, Jean-Pierre Améris) un hommage à René Feret aujourd’hui disparu et une approche du travail de l’acteur Antoine Chappey.

Le cinéma et le fait divers

Le programme de la rencontre sur le site du Ciné-club Jacques-Becker ici.

Croiser les expériences cinématographiques d’aujourd’hui c’est tenter de regarder de quelle façon le cinéma se fabrique avec l’œuvre de Raphaël Jacoulot présentée en ouverture de la manifestation. En regardant de près l’œuvre du cinéaste, on se rend compte que le réalisateur filme toujours à la lisière de la folie, du dérapage à l’instar de la mère de Barrage qui décidait de déménager dans une maison isolée pour conserver l’amour exclusif de son fils. Dans Avant l’aube, son second long métrage, le réalisateur nous emmenait dans un hôtel de luxe isolé (comme dans Shining). Le spectateur, témoin de l'accident provoqué par le fils de l’hôtelier, découvrait comment on met en place un mensonge et avec quels stratagèmes, les protagonistes (le patron de l’hôtel sa femme et son fils) allaient maquiller les faits pour essayer de s’en sortir.

Enfin dans son troisième film, Coup de chaud, on voit comment une communauté de villageois va tout faire pour exclure un jeune homme considéré comme l’idiot du village. Car Raphaël Jacoulot s’intéresse plus aux faits de société qu’au fait divers ; il regarde à la loupe comment les choses se dérèglent dans une micro-société, qu’il s’agisse d’une famille dans une maison isolée, de bourgeois dans un hôtel de luxe à l’écart du monde ou d’un village dans une chaleur caniculaire.

L’intime au centre des films

Dans un tout autre registre, l’œuvre protéiforme de Jean-Pierre Améris sonde la fragilité et la force de l’être humain. Depuis 1992, le cinéaste s’est attaché à filmer avec subtilité les détresses humaines, à l’instar de l’approche de la phobie sociale dans Les Émotifs anonymes, des pulsions destructrices dans Poids léger, du trajet de Marie Heurtin, née sourde et aveugle, recueillie dans une institution religieuse, de la proximité de la mort dans la maison de soins palliatifs de C’est la vie. Son œuvre, ancrée dans une réflexion profonde sur l’homme, se construit film après film.

La question de la mort revient dans Le Sens de l’humour, de Marylin Canto. Dans son premier long-métrage, la mort occupe une place discrète. Maryline Canto travaille méticuleusement sur le deuil et l’idée de reconstruction avec tout ce que cela implique comme changement. Ces deux cinéastes s’approchent de l’intime, ce lieu étrange où chacun s’interroge sur comment vivre avec de nouveaux repères.

Miroir d’un cinéma français qui capte les méandres de l’intime, le Ciné-Club Jacques Becker rend hommage à René Feret avec la présentation de deux films phares, Comme une étoile dans la nuit, une œuvre qui confronte un couple amoureux à la maladie mortelle, et Le prochain film, son dernier opus, comédie bricolée sur les tracas d’un cinéaste qui utilise toutes sortes de stratagèmes pour se lancer.

Le cinéma de demain

Les liens entre les films présentés dans cette 76 ème édition seraient à l’image de certaines familles du cinéma dans lesquelles les acteurs se retrouvent au gré des tournages : Feret avait travaillé avec Maryline Canto dans Comme une étoile dans la nuit et Le Prochain film dans lequel Antoine Chappey jouait également un rôle.

Tous ces croisements font aussi qu’il s’avère nécessaire de mettre l’accent sur l’acteur discret au jeu subtil qu’est Antoine Chappey et sur le travail de Maryline Canto, actrice avant d’être réalisatrice dans les films de cinéastes représentatifs de la nouvelle génération d’auteurs : Robert Guédiguian, Dominique Cabrera, Manuel Poirier, Pierre Salvadori.

Cette multiplicité de regards éclaire le cinéma français d’aujourd’hui, sa grande diversité, et, les formes nouvelles qu’il tente, non pas pour s’affranchir du passé, mais pour augurer le cinéma de demain. En ce sens, le Ciné-Club Jacques Becker joue un rôle de décryptage. Le cinéma, comme la géologie, se constitue de couches successives et d’une sédimentation qui écrit chaque jour son histoire.
 

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