Patrimoine d’Emmanuel Macron : deux franc-comtois s’interrogent

Serge Grass (photo) et Jean-Philippe Allenbach sont, avec l'Alsacien Paul Mumbach, à l'origine de la saisine de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, puis du Parquet national financier. Ils estiment qu'il y a « une anomalie entre le patrimoine et les revenus » du candidat d'En Marche. L'association Anticor a, à son tour, saisi mardi, la HATVP.

Serge Grass a saisi la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique et le Parquet national financier à propos du patrimoine d'Emmanuel Macron (photo Daniel Bordur)

Cela fait un mois que Serge Grass, Jean-Philippe Allenbach et Paul Mumbach ont écrit à la Haute autorité pour la transparence de la vie publique au sujet des déclarations d'Emmanuel Macron, s'interrogeant sur ce qu'ils considèrent être une incohérence entre les revenus et le patrimoine du candidat d'En Marche (voir ici et ci-contre). Ces interrogations sont depuis lundi reprises par l'association Anticor, également sollicitée par les trois hommes, qui dans un communiqué, explique se poser les mêmes questions que Le Monde et Médiapart.

Serge Grass et Jean-Philippe Allenbach ne sont pas des inconnus de la vie publique franc-comtoise. A 72 ans, le premier a été conseiller régional vert (1992-1998), a créé l'association Agro bio conso et l'Union civique des contribuables citoyens de Franche-Comté. A 69 ans, le second a créé le Mouvement Franche-Comté et fut en 2002 candidat du Parti fédéraliste européen à la présidentielle, sans obtenir les 500 signatures. Paul Mumbach, président de l'Association des maires ruraux du Haut-Rhin, est candidat des « Maires en colère » à l'actuelle présidentielle, mais n'a à ce jour que treize parrainages.

« Pas trace du portefeuille ayant sécrété des revenus de valeurs mobilières »

Sans réponse de la HATVP, les trois comparses saisissent la parquet national financier début mars : « Il nous paraît surprenant que M. Macron ayant perçu plus de 3.000.000 € de revenu entre 2010 et 2013 sa fortune nette déclarée le 24 octobre 2014, lors de son arrivée au gouvernement, n’ait été que de 156.000 €, pour ensuite n’être plus que de 63.048 € quand il en est parti (cf. sa déclaration du 28/10/2016). Également surprenant qu’on ne trouve pas trace dans son patrimoine du portefeuille ayant sécrété des revenus de valeurs mobilières à hauteur de 291.000 € en 2011 et de 270.000€ en 2012, lequel se devait, à tout le moins, d’avoir une valeur de 3 000 000 € », écrivent-ils en supposant des « omissions cachées » et en demandant des vérification sur les comptes bancaires du candidat (voir ici).

 Expliquant dans un premier temps avoir « adapté [son] train de vie à ses revenus », Emmanuel Macron a réagi mardi 14 mars en indiquant que c'était une « très bonne chose » que la HATVP à qui il dit avoir « donné toutes les informations » fasse son travail. Il ajoutait qu'elle « rend publics » ses doutes quand il y en a, mais qu'elle ne l'avait en l'occurrence pas fait. CQFD, selon lui...

« S'il était un flambeur, il serait disqualifié pour gérer la France »

Jean-Philippe Allenbach est pour sa part « sûr » que le candidat n'a pas tout dit : « je suis dans le métier (ndlr : le traiding), c'est une certitude mathématique ». Pour lui, il est impossible de n'avoir qu'un patrimoine de 156.139 euros après avoir gagné 3,14 millions d'euros en 5 ans : « Même si on en enlève la moitié en impôts, il reste un smic par jour pendant quatre ans. Je ne crois pas qu'il n'ait rien acheté. Et pour toucher 270.000 euros de valeurs mobilières, il faut un portefeuille d'au moins 3 millions : où est-il ce portefeuille ? S'il a été liquidé avec qu'il soit ministre, il devrait être sur son compte courant, mais alors comment n'arriver qu'à une fortune nette de 156.000 euros ? »

Alerté par Paul Mumbach, Jean-Philippe Allenbach explique avoir « fait une analyse financière » et avoir ensuite demandé à Serge Grass, grand éplucheur de comptes publics, de la vérifier. Ce dernier confirme et dit avoir demandé à « deux juristes parisiens » de corroborer l'analyse : « une hypothèse permettrait d'expliquer la disparition du patrimoine : on peut s'en décharger pour une durée indéterminée, c'est la donation temporaire d'usufruit, et en tirer quand même des revenus financiers... qui n'existent plus dès lors qu'il est devenu ministre... »

Jean-Philippe Allenbach et Serge Grass doutent que l'ancien associé de la banque Rothschild « ait dilapidé autant d’argent en si peu de temps. Si tel devait être le cas, un tel flambeur serait disqualifié pour gérer la France ». Ils ne l'accusent pas pour autant : « ses déclarations de patrimoine laissent à penser qu’une partie de sa fortune n’a pas été déclarée à la HATVP. Ses placements ne sont pas forcément illicites, mais ils auraient dû être présentés dans ses déclarations. Ces incohérences auraient dû conduire la haute autorité à engager les démarches nécessaires conformément à sa mission qui est de "s’assurer de la cohérence des éléments déclarés ; rechercher des omissions importantes ou variations inexpliquées du patrimoine" ».

 

 

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