« La Nuée » a le goût du sang

Primé au Festival du film fantastique de Gérardmer, le film de Just Philippot est une sorte de mix de « Petit paysan » et de « La Mouche ».

Suliane Brahim (qui fut l’héroïne de la série « Zone blanche ») incarne une jeune femme qui a deux enfants à élever et une ferme à diriger.

Sélectionné par la Semaine de la Critique de Cannes 2020, le premier film de Just Philippot, « La Nuée » (sortie le 16 juin), fut ensuite doublement primé (Prix du Public et Prix de la Critique) au 28ème Festival du film fantastique de Gérardmer, qui s’est déroulé en ligne en janvier. Suliane Brahim y incarne Virginie, jeune femme qui a deux enfants à élever, et une ferme à diriger, seule. Une ferme un peu particulière puisqu’elle s’échine à faire prospérer un élevage de sauterelles.

« La Nuée » est ainsi une sorte de mix de « Petit paysan » et de « La Mouche ». Avec le thriller rural d’Hubert Charuel, le film de Just Philippot a en commun un personnage solitaire, qui s’agite frénétiquement pour éviter la faillite de son exploitation. Avec l’œuvre de science-fiction de David Cronenberg, il a en commun la mutation d’insectes et la transformation du corps. Découragée par l’hostilité ambiante et le faible rendement de sa production, « maman sauterelle » donne plus d’herbe, plus d’eau, à ses satanées bestioles, mais en vain. Jusqu’à ce jour où, après un coup de colère et un accident, elle se retrouve inanimée, blessée, dans la serre, et s’aperçoit que les insectes se sont abreuvés de son sang.

Suliane Brahim formidable en fermière fiévreuse

Grâce à cette « potion magique », les sauterelles deviennent de meilleures pondeuses, plus nombreuses, plus grosses… La fermière leur tend son bras cicatrisé, blessé, leur fait don de son sang, et ça marche, la récolte est meilleure, elle agrandit son élevage, rajoute une serre, puis une autre. Elle peut enfin offrir un scooter à sa fille, un stage de foot à son fils. Mais les petites bêtes sont aussi plus affamées, plus voraces, elles ont désormais le goût du sang et de la chair. Huguette, la petite chèvre de la famille, et le chien du voisin n’y survivront pas.

Doté d’une bonne idée de scénario (écrit par Franck Victor et Jérôme Genevray), « La Nuée » est notamment porté par sa formidable interprète. Suliane Brahim, qui fut l’héroïne de la série « Zone blanche » (tournée dans la région de Gérardmer et qui flirtait déjà avec le fantastique) incarne fiévreusement la folie et la douleur d’une femme et d’une mère, jusqu’au final sacrificiel. D’abord drame familial et rural, « La Nuée » vire à l’horreur et au film de genre. Just Philippot fait habilement monter la tension, avec de gros plans sur les pattes et mandibules, fout la trouille avec la stridence et le crissement des sauterelles, certes devenues mutantes et assoiffées de sang, et déclenche la panique avec l’attaque de « La Nuée ». Vous n’êtes pas prêt d’oublier le bruit des sauterelles, le soir, au fond des bois.

« La Nuée », un film de Just Philippot avec Suliane Brahim (sortie le 16 juin).

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